Le Psychisme

Le passage de Cro-Magnon à Homo sapiens marque le changement de la forme mentale et une nouvelle façon de structurer le monde et les phénomènes de conscience. La structure de base du psychisme change.

            À chaque moment de l’évolution, il y a transformation, tant de l’environnement que de l’être vivant. Il s’agit d’un paradoxe intéressant : pour préserver son unité, la structure doit transformer l’environnement et aussi se transformer elle-même

Il serait faux de penser que les structures vivantes changent et transforment uniquement l’environnement, car cet environnement devient de plus en plus compliqué et il n’est pas possible de s’adapter tout en conservant l’individualité telle qu’elle a été créée au départ. C’est le cas de l’homme, dont l’environnement, au fil du temps, cesse d’être seulement naturel pour devenir social et technique. Les relations complexes entre les groupes sociaux et l’expérience sociale et historique accumulée créent un environnement et une situation dans lesquels la transformation interne de l’homme sera nécessaire. Après ce détour où la vie semble s’organiser avec des fonctions, des tropismes et de la mémoire pour compenser un environnement changeant, et ainsi s’adapter de plus en plus, nous voyons qu’une coordination (même minime) est également nécessaire entre ces facteurs, et pour l’orientation opportune vers des conditions favorables de développement. Lorsque cette coordination minimale apparaît, le psychisme émerge comme une fonction de la vie en adaptation croissante, en évolution.

La fonction du psychisme consiste à coordonner toutes les opérations de compensation de l’instabilité de l’être vivant avec son environnement. Sans coordination, les organismes réagiraient partiellement sans compléter les différentes parties de la composition, sans maintenir les relations nécessaires et, enfin, sans préserver la structure dans le processus dynamique d’adaptation. [1]

File : Comparaison des caractéristiques du crâne d’Homo naledi et d’autres espèces humaines primitives.jpg – Wikimedia Commons

À une époque où la complexité de l’environnement de l’individu s’est accrue, le psychisme est apparu pour compenser le déséquilibre. Aujourd’hui, l’humanité dans son ensemble est en danger (nous éprouvons un besoin profond) et quelque chose de nouveau doit donc émerger.

La singularité pourrait représenter une opportunité de faire, en ce moment, un saut dans le niveau de conscience.

Aux premiers jours de la pandémie de Covid19, beaucoup ont pensé : c’est l’occasion pour le monde de changer. Malheureusement, il n’a pas changé de manière substantielle ; le système macroéconomique s’est développé à un rythme vertigineux, rendant les riches plus riches. La pauvreté étant plus aiguë et plus répandue, la liberté a été perdue. Tous les problèmes humains se sont aggravés avec la pandémie, augmentant l’incertitude quant à l’avenir.

Depuis quelque temps, de nombreuses personnes dans les pays appauvris, négligés, dévastés, ont le sentiment que la vie qui leur a été donnée ne vaut pas la peine d’être vécue et qu’il est préférable de s’exposer au risque de mourir sur un bateau dans le noir d’un océan sombre.

Face à cela, il n’est toujours pas question d’une nouvelle législation internationale pour équilibrer le monde et fournir des ressources à ceux dont les matières premières continuent à leur être arrachées.

Pixabay

Face aux progrès de l’intelligence artificielle et du développement ultra-technologique, nombreux sont ceux qui affirment que l’éthique est la question fondamentale. Le monde du futur dépendra de la manière dont il sera programmé – avec quels critères éthiques, affirme le scientifique José Ignacio Latorre. Et de nombreuses autres voix s’élèvent dans divers domaines. Tous s’accordent à dire qu’une civilisation hautement développée doit être humaniste, mais comme nous le savons, la puissance mondiale est aux antipodes de l’humanisme

Nous sommes arrivés à notre époque à une situation étrange où nous devons développer au maximum la recherche dans tous les domaines, et où les bases de l’étape précédente n’ont pas encore été résolues.

La limite de la Singularité fait référence au monde à court terme du profit immédiat qui tend à son extinction, tandis que quelque chose de nouveau émerge. Il appartient alors à chacun d’entre nous de se placer sur la bonne fréquence. D’où l’émergence d’une nouvelle spiritualité. C’est un acte lancé avec de nombreuses questions, dont le but n’est pas de saisir une idée, mais un acte de conscience ouvert qui résonne intérieurement avec l’Univers.

Wikimedia Commons: Supernova termonucléaire 1-A
File:Explosions — Large and Small.gif 

Systèmes binaires

Dans l’article 3, nous avons évoqué la règle de la variété redondante d’Akop, la diversité interne excédentaire d’Alexander et la loi de Silo qui consiste à surmonter l’ancien par le nouveau.

Ce que ces points de vue ont en commun, c’est que quelque chose de nouveau apparaît au moment de la Singularité, lorsque le système s’effondre totalement.

Nous considérons maintenant, non plus l’émergence de quelque chose de différé dans l’ancien système, mais l’émergence de quelque chose de nouveau provenant d’un autre système qui, en interaction avec le premier, produit une nouvelle synthèse et un saut évolutif.

Un exemple de ce processus (système binaire) peut être observé dans les supernovae

Dans l’univers originel, après le Big Bang, seuls des atomes d’hydrogène, d’hélium et des traces de lithium ont pu être créés. Pour suivre leur évolution, des étoiles primordiales ont été formées. L’étoile, comme l’atome, possède un noyau et une enveloppe.

Il s’agit d’équilibrer deux forces : d’une part, la gravité, qui rend la matière compacte (elle aura tendance à tout comprimer), et d’autre part, l’énergie de fusion nucléaire, qui produit l’effet inverse, une pression vers l’extérieur de l’étoile. La friction entre ces deux forces colossales engendre une élévation de température qui produit les différents éléments chimiques du tableau périodique.

Il faut 15 millions de degrés Kelvin (N.d.T.: La température en degrés Celsius est égale à celle en degrés Kelvin moins 273 degrés;  une température de 15 millions de degrés Kelvin est pratiquement égale à une température de 15 millions de degrés Celsius) pour faire fusionner du carbone. Ce n’est pas n’importe quelle étoile qui peut y parvenir, il faut que ce soit une très grosse étoile, sinon un noyau de carbone inerte provoquera l’effondrement de l’étoile.

Mais même lorsque le processus de combustion a généré le fer, l’étoile atteint sa limite car le fer est un élément très stable. Ainsi, lorsque l’étoile tente de faire fondre le fer, au lieu d’augmenter son énergie, elle perd de l’énergie. Lorsque l’étoile a un noyau de fer qu’elle ne peut pas fusionner, il lui reste 6 secondes de vie. Une supernova à effondrement gravitationnel se produit à cet instant.

Le déséquilibre fait que les éléments du tableau périodique sont projetés dans l’espace.

Dès lors, d’autres processus sont nécessaires pour compléter le tableau périodique des éléments de l’univers. Cela nécessite un système binaire de deux étoiles.

Parfois, il y a une autre étoile à proximité, une naine blanche, qui absorbe toute la matière éjectée par une étoile après son effondrement gravitationnel.

Dans ces conditions, une supernova thermonucléaire 1-A peut être produite. L’étoile devient très grosse et donne de la matière à la naine blanche à un rythme accéléré, et la naine blanche explose en raison de la réaction thermonucléaire en chaîne. C’est ainsi que l’or, par exemple, tout ce qui existe dans l’univers, est généré dans des conditions très particulières et extrêmes. Plus important encore, les éléments constitutifs de la vie y sont générés. [2]

IHPS. Ermitage de Punta de Vacas, Aconcagua

 

Projection du nouvel humanisme

Au XXIe siècle, l’humanité est confrontée à la nécessité de déterminer son évolution commune

Bien que l’intelligence et l’inventivité de l’espèce aient augmenté, un esprit commun ne s’est pas encore configuré chez les êtres humains de la planète. Un grand champ de résistance est en place.

Il y a toujours une forte tendance à se battre pour les ressources. La vue est très courte et il y a apparemment une grande peur de tout. Depuis l’époque des hominidés, il existe une peur des autres humains, qui implique la défense et l’attaque. En outre, il existe une peur de sa propre existence qui s’exprime dans le déni du plan transcendantal. Ce qui s’éloigne de l’immédiat – de la subsistance de la coutume – est inquiétant.

La peur de l’incertitude se manifeste sous la forme d’un refus de s’élever dans les niveaux de conscience. On cherche des sorties rapides. Dans les cas extrêmes, on descend très bas et on va à la dérive, ce qui consiste à produire des catastrophes et des crimes sur des bases irrationnelles, religieuses et paranoïaques.

Dans cet espace, tu peux être épouvanté par le paysage désertique et immense ainsi que par le silence terrifiant de la nuit transfigurée par
d’énormes étoiles immobiles. Là, exactement au-dessus de ta tête, tu verras, clouée dans le firmament, la forme insinuante de la Lune Noire… une étrange
lune éclipsée qui s’oppose exactement au Soleil. Là, tu dois attendre l’aube avec patience et foi, car rien de mal ne peut t’arriver si tu restes calme.

Il pourrait arriver que, dans une telle situation, tu veuilles tenter une sortie immédiate. Si cela se produisait, tu pourrais te diriger à tâtons vers n’importe
quel endroit, au lieu d’attendre le jour avec prudence. Tu dois te rappeler que là (dans l’obscurité) tout mouvement est faux et reçoit de façon générique le
nom “d’improvisation”. Si, oubliant ce que je dis maintenant, tu commençais à improviser des mouvements, sois sûr que tu serais alors entraîné par un
tourbillon, parmi les sentiers et les demeures, jusqu’au fond le plus obscur de la dissolution. [3]

Au-delà du domaine de la résistance, une tendance évolutive est également observée simultanément dans de nombreux domaines.

La pensée siloïste, qui a émergé dans la seconde moitié du 20e siècle, a apporté une approche néo-humaniste à la question de l’évolution. Cette pensée a eu des répercussions dans les sphères politiques, sociales, spirituelles, etc. Et à l’heure actuelle, elle aurait tendance à se manifester dans le domaine de la connaissance dans un système où les piliers de la connaissance se fissurent.

Au cours de l’ère moderne, l’humanité a cru s’être émancipée de l’être humain primitif, elle a configuré tout un système de croyances dissimulées dans la pensée rationnelle.

Conformément à ces limites, la science fondée sur la pensée analytique/rationnelle a très mal compris nos systèmes sociaux et économiques complexes et ne nous a pas permis de les gérer efficacement. La psychologie scientifique n’a fourni que des aperçus simples et insignifiants du fonctionnement réel de notre esprit. Et le décalage entre la pensée scientifique linéaire et les écosystèmes complexes qui constituent notre environnement naturel menace notre existence même : l’écologie scientifique s’est révélée incapable de comprendre et de prévoir les répercussions complexes de nos actions sur le monde naturel. [4]

Tibet 

Nous aspirons à une inspiration profonde, à une compréhension lucide. Des inspirations qui apparaissaient chez les méditants obsessionnels, parfois soudaines, parfois rêvées… Lorsque ces intuitions se produisent, c’est comme si leur sens venait du futur, à un moment où le penseur est suspendu, en état d’équilibre, et où surgit soudain le phénomène d’une intuition soudaine ; la mystique à travers l’histoire a laissé cette trace.

Une autre grande force qui peut être mobilisée est la foi en l’avenir. La question de la foi est essentielle dans la pensée scientifique. Cela est apparu clairement au cours du 20e siècle, lorsque la science a commencé à devenir très peu intuitive. Sans la foi dans les théories les plus incroyables, il n’aurait pas été possible de développer les grands appareils de recherche et d’expérimentation qui sont aujourd’hui déployés dans le monde entier et au-delà.

Y a-t-il une intention évolutive dans l’Univers ?  L’être humain est-il susceptible d’atteindre l’illumination ? Il faut le demander et en faire l’expérience.

Un premier pas serait de parvenir à un style de vie plus ou moins correct, bienveillant, compatissant, altruiste, harmonieux et heureux, en tant que grande réalisation de l’humanité, et un autre, d’affronter courageusement la nécessité d’être éclairé par le dessein créateur de l’Univers. Il est possible que l’un ne soit pas possible sans l’autre, il s’agirait donc plutôt d’un processus simultané.

Dans l’article cité ci-dessus, John E. Stewart soutient que les capacités associées à l’illumination sont d’une importance capitale pour s’adapter et évoluer dans le futur.

Deux de ces capacités sont : (i): l’auto-évolution ou la capacité d’un organisme ou d’une organisation à se libérer des dictats biologiques et culturels de son passé évolutif, de sorte qu’il puisse choisir d’évoluer dans la direction nécessaire pour bénéficier de son avenir évolutif ; et (ii) la sagesse métasystémique : la capacité d’un organisme ou d’une organisation à développer des modèles mentaux des interactions entre lui-même et son environnement complexe et à utiliser ces modèles pour identifier les actions qui servent son avenir évolutif.

Le développement de ces deux capacités est essentiel pour que les processus vivants qui apparaissent sur une planète participent avec succès à l’évolution future de la vie dans l’univers. L’humanité se rapproche rapidement de circonstances qui exigent le développement de ces capacités, individuellement et collectivement.

[…] La société mondiale développera la capacité de se déplacer, de s’étendre au système solaire, puis à la galaxie et au-delà, de remodeler son environnement physique, d’avoir un impact physique sur les événements qui lui sont extérieurs, de former des intentions, de fixer des projets et des objectifs à long terme pour l’organisation, de communiquer et de faire en sorte que les gens se sentent bien. [5]

 

Notes

[1] Silo. Notes de Psychologie. Éditions Références. Paris. 2011.

[2] Le système binaire SVS 13, composé de deux embryons stellaires dont la masse commune est similaire à celle du Soleil, est situé à environ 980 années-lumière dans le nuage moléculaire de Persée. Les deux étoiles du système sont très proches l’une de l’autre, avec une distance d’environ quatre-vingt-dix fois seulement celle entre la Terre et le Soleil.
Ce disque montre une structure en spirale qui alimente en matière les disques individuels, et dans chacun d’eux des systèmes planétaires pourraient se former à l’avenir. Ceci est une preuve claire de la présence de disques autour des deux étoiles et de l’existence d’un disque commun dans un système double.
Ces travaux ont permis d’étudier la composition du gaz, de la poussière et de la matière ionisée dans le système. Près de trente molécules différentes ont été identifiées autour des deux proto-étoiles, dont treize molécules organiques complexes précurseurs de la vie. « Cela signifie que lorsque des planètes commenceront à se former autour de ces deux soleils, les éléments constitutifs de la vie seront là ». Díaz-Rodríguez

[3] Silo. Humaniser la Terre. Le regard intérieur. Éditions Références. Paris. 1997.

[4] John E Stewart. Iluminación y la evolución del mundo material. Spanda Journal, Vol. VII, 2017, 1, pp 107-111.

[5] Ibid.

 

Voir aussi

Partie 1. Singularité : Principes fondamentaux 
Partie 2. Atracteurs et scénarios
Partie 3. Singularité : Représentation
Partie 4. Singularité : un saut évolutif  ?

 

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Traduction de l’espagnol par Evelyn Tischer