Pour permettre aux citoyen·ne·s de comprendre les enjeux et de se mobiliser face au projet de loi Travail, Attac et les Économistes atterrés ont rédigé un Petit guide de résistance à la loi Travail XXL.

Les réformes qui depuis plus de 30 ans ont flexibilisé l’emploi en France n’ont pas permis de lutter efficacement contre le chômage. Au contraire, elles ont précarisé l’emploi, aliéné le travail et fragilisé l’économie. Avec son projet d’ordonnances, Emmanuel Macron veut aller encore plus loin en soumettant le travail aux exigences du patronat et de la finance.

[2/9]  Les ordonnances, c’est légal, légitime et démocratique !

Pourquoi réformer le code du travail par ordonnances ? « Pour des raisons d’efficacité et de rapidité », a déclaré Emmanuel Macron.

En effet, ça va vite, trop vite. Les Assemblées commencent par voter une « loi d’habilitation », sorte de vague déclaration d’intentions. Puis le gouvernement rédige tranquillement les ordonnances à l’abri des regards indiscrets, et les publie après signature par le président. La beauté de la chose est là : les ordonnances s’appliquent dès leur publication. Le Parlement doit à la fin ratifier des textes déjà en vigueur. C’est légal, puisque c’est prévu par l’article 38 de la Constitution. Reste à savoir si c’est légitime…

« Il a été élu pour ça »

Emmanuel Macron a obtenu 24 % des voix au premier tour de la présidentielle, il a été ensuite élu par défaut contre Marine Le Pen. L’Assemblée a été élue avec une participation inférieure à 50 %, une première dans l’histoire de la République. Malgré l’« état de grâce » et la béatitude amorphe des grands médias, les sondages d’opinion montrent une majorité (61 %) de personnes opposées aux ordonnances.

« C’est légitime »

Ça peut l’être pour des textes purement techniques, où la procédure d’ordonnances allège le travail des Assemblées. Mais pas pour des dispositions majeures comme celles ici discutées : la procédure réduit le rôle du Parlement au simple enregistrement. Comme pour le 49-3, un refus de ratification des ordonnances signifierait une épreuve de force entre l’Assemblée et l’exécutif : peu probable avec la majorité écrasante, servile et inexpérimentée dont dispose Emmanuel Macron.

« C’est démocratique ! »

Evidemment non : sous couvert d’efficacité le but est de limiter tout débat sur le fond et de restreindre les possibilités de contestation par les parlementaires ou par les citoyen·ne·s. La démocratie n’est pas une opération spéculative sur les marchés financiers, elle demande du temps pour l’information, la délibération et la décision. Le recours au 49-3 ou aux ordonnances pour imposer des régressions sociales majeures montre que nos gouvernants ont parfaitement conscience de l’illégitimité profonde de ces réformes.

« C’est banal »

De Gaulle et ses successeurs immédiats ont peu utilisé les ordonnances. C’est à partir de Jacques Chirac que la procédure devient courante : 405 ordonnances ont été ratifiées entre 1984 et 2013, dont… 307 entre 2003 et 2013. Cette augmentation est en partie liée à l‘obligation de mieux assurer la transposition en droit français des directives prises par l’Union européenne. Un autre signe de l’affaissement de la démocratie parlementaire, désormais jugée trop contraignante par nos élites pressées.

 

Sommaire  et liens aux articles  publiés :

[1/9]  Il faut libérer le travail !

[2/9]  Les ordonnances, c’est légal, légitime et démocratique !

[3/9] Le travail coûte trop cher !

[4/9]  Le code du travail tue l’emploi !

[5/9] Licencier : une course d’obstacles pour les employeurs !

[6/9] Les accords d’entreprise, ça répond mieux aux nécessités du terrain !

[7/9] La fusion des IRP renforcera le dialogue social !

[8/9] Le pouvoir des syndicats sera renforcé !

[9/9] Tous micro-entrepreneurs, c’est l’avenir du travail !

 

Rédactrices/rédacteurs : Thomas Coutrot, Evelyne Dourille, Anne Eydoux, Karl Ghazi, Jean-Marie Harribey, Sabina Issehnane, Julien Lusson

Maquette et illustration : Stéphane Dupont, Jean Jullien, Mélanie Poulain

L’article original est accessible ici