Aujourd’hui directrice générale d’Horizon pour Elle, une maison de Cowansville qui accueille des femmes cherchant à échapper à la violence conjugale, Cathie Sombret a suivi un long parcours avant et après s’être installée au Québec en 1998.
À dix-huit ans, la jeune fille originaire de Mazingarde, dans le nord de la France, quitte la maison familiale pour aller vivre à Annemasse, une ville située à la frontière franco-suisse où elle travaillera pour une entreprise de métallurgie. Elle sera d’ailleurs la première femme à assumer le rôle de chef d’équipe dans ce milieu dominé par des hommes. Six ans plus tard, elle décide de changer de métier et se fait dame de compagnie au service de la marquise Trédicini de St-Séverin.
« J’ai rencontré une dame extraordinaire avec qui j’ai tissé des liens forts, confie-t-elle. Je devais l’emmener marcher, faire ses repas et gérer le château. » Avec son conjoint et sa fille, elle habite une aile du château de la marquise.
Les chemins de la vie, particulièrement ceux que suivent les immigrants et les voyageurs, son parfois inusités. Un jour de 1996, Cathie Sombret héberge Marte, une femme médecin espagnole qui est sur le point de partir pour le Québec. Reconnaissante de sa générosité, celle-ci l’encourage à l’y rejoindre en promettant de l’aider à s’y installer. De son côté, la marquise lui offre de payer le billet d’avion.
Devant cette chance unique, la jeune femme décide de tout quitter et de prendre l’avion avec sa fille, alors âgée de trois ans. Le père de la petite reste derrière, le couple ayant rompu entre-temps.
« Les premières semaines, je me sentais perdue, raconte-t-elle, il n’y avait pas de bruit ! Mais après, je me suis dit que c’est ici que je veux habiter. »
En fait, elle a obtenu un visa temporaire d’une durée d’un an dans le but de suivre une formation de croissance personnelle. Pour survivre, elle se trouve des petits boulots ici et là, d’abord comme concierge de son immeuble, ensuite comme cuisinière à une auberge de Sutton, puis comme collaboratrice chez Zayat Aroma de Bromont.
Entretemps, elle suivra une formation en massage suédois, se fera éducatrice spécialisée et, plus tard, donnera des cours en gestion.
« J’étais séparée, j’avais un enfant et pas beaucoup d’argent. L’adaptation n’a pas toujours été simple ou facile », rappelle celle qui, en 1999, retournera temporairement en France dans le but de suivre une formation en encadrement et intervention.
De retour au Québec, elle acquiert une boutique offrant des produits et services en esthétique et en massothérapie qui, au meilleur de son activité, fera travailler sept employées. En outre, elle coanime des groupes sur le thème de la violence conjugale, se rapprochant ainsi de la véritable vocation qui l’occupera de nombreuses années.
En 2001, elle est embauchée à temps partiel comme intervenante à l’organisme Ressources pour Hommes de Granby. En 2002, c’est à Horizon pour Elle qu’elle obtient un poste d’intervenante, cette fois à temps plein ; elle y anime des ateliers en processus de dévictimisation auprès de groupes de femmes. Littéralement habitée par son travail, elle vend son fonds de commerce pour s’y consacrer entièrement.
« La chose la plus importante que les femmes retrouvent à Horizon pour Elle, c’est la récupération de leur pouvoir », explique celle qui, au bout de quinze ans, deviendra coordonnatrice clinique, puis, peu après, coordonnatrice générale de cette ressource qu’elle a fait grandir et dont l’équipe compte aujourd’hui plus de vingt employées.
En 2021, sous sa gouverne, une toute nouvelle maison, plus grande et plus adéquate, sera construite dans le but d’y accueillir un plus grand nombre de femmes et d’en améliorer les conditions. Ce projet d’envergure est à la hauteur de la détermination de la gestionnaire hors pair qu’elle est et dont les cartons comprennent un projet de suivi visant à contrer la pénurie du nombre de places disponibles pour les femmes violentées de la région.
Depuis plus de vingt ans, celle qui a traversé l’océan et s’est bâtie une nouvelle vie au Québec fait avancer la cause des femmes dans la province.
« Faire confiance à la vie, je sais de quoi je parle, conclue-t-elle. Je me laisse bercer par la vie. »
Nathalia Guerrero Vélez