Une importante manifestation rassemblant un demi-million de personnes scandant le slogan « Nous n’avons pas peur » a eu lieu le 27 août à Barcelone, suite aux attaques du 17 août à Barcelone et à Cambrils. La manifestation a été marquée par des protestations, des revendications et des choses inattendues dépassant le cadre des évenements eux-mêmes.

Les protestations, visant les politiques bellicistes ayant constitué le terreau de ces attaques terroristes, ont atténué la tension d’une manifestation qui aurait pu prendre une tournure islamophobe : une agression contre une religion, une culture ou un pays qui aurait été tenu pour responsable et attaqué.  Mais non !  La société catalane ne s’est pas permise de tomber dans ce piège : ce n’est pas la faute d’une religion, mais plutôt des politiques au service du militarisme et liées directement à la généralisation de la peur.  Les informations circulant auprès des participants ont blâmé des personnalités vendant des armes à l’Arabie Saoudite comme le roi Felipe VI.

Les huées à l’encontre des représentants de la famille royale et de certains politiciens ont résonné tout le long du Passeig de Gracia et de la Place de Catalogne durant la manifestation.  Ce rejet fort de la présence du roi a incité 170 associations et plateformes militant principalement pour les droits de l’homme à organiser une manifestation prévue une heure avant sous le slogan : « Vos politiques, nos morts » et où les participants étaient invités à venir habillés en bleu.

Les revendications rejetant « la terreur et la peur » et la défense de chaque être humain indépendamment de ses croyances peuvent être ajoutées aux nombreux actes de solidarité avec la communauté musulmane et au soutien de tous ceux ayant prêté main forte suite aux attaques.

Néanmoins, la manifestation a pris une tournure inattendue,  une tournure différente des précédentes.  Des milliers de roses rouges et jaunes ont été distribuées aux participants ; les gens ont été invités à donner ces roses comme symbole de gratitude car les protestations et les revendications n’ont pas seulement été le moteur de la manifestation.  La manifestation a démontré comment une action transférentielle comme une accolade, un témoignage de gratitude et l’expression des émotions possède le pouvoir d’effacer toutes les différences culturelles.  Les politiques n’ont pas été les protagnistes, mais le peuple.

Dix jours après les attaques, la société catalane a répondu de manière imprévisible : l’amour a triomphé de la haine.  Les victimes ne sont pas seulement celles qui ont été percutées par la fourgonette, mais aussi les assaillants eux-même (qui peuvent être qualifiés d’assassins), qui morts ou vifs, sont la conséquence d’une société irrationnelle.  « Nous avons perdu huit enfants de Ripoll », a déclaré l’un des voisins, incrédule du fait que ces enfants, de jeunes hommes entre 17 et 20 ans, ont pu commettre de telles atrocités.  Nous n’allons pas aborder ce sujet maintenant, mais on se doit d’évoquer le fait que ces jeunes hommes, ces tueurs assassinés, ont le droit d’être jugés comme n’importe quel être humain, sous une loi qui n’est pas basée sur la punition et la vengeance, mais sur l’intégration.  Mais cela n’est plus possible pour ceux qui sont déjà morts.

La manifestation a pris une tournure inattendue dans le sens où les services de sécurité, qui ont été jusqu’ici blâmées par tout un pan de la société approuvant le « non à la peur », sont devenus complices des citoyens, des héros à remercier, à embrasser et à applaudir.

Si l’on doit retenir quelque chose, en regardant dans quelle direction ces événements et leurs réponses peuvent nous mener dans l’avenir, il s’agit du fait que la société sait que les musulmans ne sont pas la cause et que la société catalane ne sera pas réduite au silence et à la peur que les marchands d’armes et les va-t’en-guerre tentent de véhiculer.  Parce que nous le crions haut et fort, « Nous n’avons pas peur ! »

Traduction de l’anglais : Coralie Fournier.