Pressenza publie des articles de la lettre d’information de ‘Santé Nature Innovation’ afin de contribuer à la diffusion d’autres points de vue sur la santé.

Voici le thème d’ antidépresseurs.

 

Cher lecteur,

Avant toute chose, une mise en garde : cesser brutalement un traitement antidépresseur peut souvent être plus dangereux que de le poursuivre. Il est important de ne diminuer le traitement que très progressivement, et sous la surveillance d’un médecin qualifié. Cesser ce type de traitements peut causer des problèmes plus graves encore que le symptôme qui avait causé la prise du traitement.

Le but de cet article n’est donc surtout pas de vous inciter à arrêter votre traitement de votre propre chef, si vous êtes actuellement sous antidépresseur.

Mais voici les faits.

Un nombre impressionnant de tueries ont eu lieu ces dernières années dans des établissements scolaires.

Une page Wikipedia (en langue anglaise) en recense soixante-quatre depuis la fin du 19e siècle et le développement des écoles à grande échelle.

Parmi eux 50 se sont produits entre 1989 et aujourd’hui, soit 78 % des cas, avec une accélération depuis les années 2000.

En fait, tous sauf trois ont été commis depuis 1964.

Parmi les 3 massacres scolaires commis avant 1964, un a été commis en Allemagne en 1913 par un homme de 27 ans, et un aux Etats-Unis en 1927 par un homme de 55 ans, diagnostiqué fou.

Le troisième cas avant 1964, et le seul impliquant des mineurs, a eu lieu à Vilnius (actuelle Lituanie) en 1925 où deux lycéens militant communistes ont attaqué le jury d’un examen, tuant un professeur et plusieurs élèves, pour des raisons probablement politiques.

Voici où je veux en venir : lorsque vous apprenez à la télévision qu’un nouveau massacre a eu lieu dans une école, n’écoutez plus les commentateurs qui expliquent que « ce type de violence a toujours existé », ou qui laissent entendre que ce sont les moyens de communication modernes qui font qu’on parle de ce type de cas, que l’on n’était tout simplement pas au courant avant, mais qu’ils se produisaient quand même.

C’est faux, archi-faux. La vérité, c’est que c’est une totale nouveauté que des enfants se mettent ainsi à perpétrer des crimes de masse.

Le cas du serial-killer de 14 ans assoiffé de sang, assassinant un à un des petits camarades selon une mise en scène macabre, et dans l’espoir de paraître à la télé comme le plus épouvantable meurtrier de l’histoire de l’humanité, est une nouveauté extrêmement inquiétante, qui peut être datée historiquement, à partir des années 60.

Les armes sont-elles seules responsables ?

A chaque fois, la réaction des médias est la même : il faut interdire les armes à feu !

Il est vrai que, si les armes à feu n’existaient pas, il serait difficile à quelqu’un de tuer autant de monde à la fois.

Toutefois, cela fait des siècles que les Américains sont en majorité équipés d’armes à feu. En France aussi, d’ailleurs, tous les paysans ou presque avaient traditionnellement une carabine suspendue au-dessus de leur cheminée. Quand l’essentiel de la France était rurale, cela représentait des millions d’armes à feu en circulation dans le pays, aisément accessibles aux écoliers.

Et pourtant, à l’époque de Jules Ferry, on ne répertorie aucun cas d’élève fou ayant sorti de son cartable une carabine bourrée de chevrotine et ayant commis un carnage sur son professeur, ses camarades, etc.

Au 19e siècle, on recense des affrontements entre lycéens, dont plusieurs célèbres révoltes organisées par les élèves de Louis-Le-Grand, qui nécessitèrent l’intervention de la police. Mais il s’agissait de violences dans le but de protester contre une situation ou un enseignement considérés collectivement comme insupportable, à tort ou à raison.

On a connu, bien sûr, des règlements de compte. Mais il s’agissait alors d’assassinat visant une personne en particulier, pour une raison précise (ce qui ne veut pas dire qu’elle était bonne…). Et encore cela n’était-il pas courant du tout.

En France, le premier rapport sur la violence des jeunes à l’école, confidentiel, est rédigé par l’inspecteur général Georges Tallon en 1979.

Comment expliquer les crimes de masse ?

Les assassinats de masses commis par des jeunes, voire des enfants, contre des innocents, sont apparus en même temps que des bouleversements majeurs du mode de vie, comme l’éclatement des familles, la télévision à haute dose dès la petite enfance, la violence au cinéma et dans les jeux vidéos, la pornographie « hard » accessible aux enfants, les drogues, le déracinement géographique des populations, le phénomène des bandes et le succès de la « culture gothique » et des musiques sataniques dans nos sociétés, mais également la hausse des toxines, métaux lourds, malbouffe et autres facteurs environnementaux (environnement urbain dégradé, bruit, stress, et traumatismes), qui ont favorisé l’apparition des maladies mentales telles que schizophrénie et dépressions, favorisant le passage à l’acte…

Qui peut dire avec certitude, parmi toutes ces causes, celle qui a joué le rôle principal ?

C’est une question qui ne sera pas résolue avant longtemps. Tout au plus peut-on dire que l’explication est sans doute multifactorielle.

La piste des antidépresseurs

Néanmoins, de nombreux psychiatres, dont l’américain Peter Breggin, mettent aujourd’hui en cause les antidépresseurs « inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine » (ISRS, type Prozac) comme potentiellement responsables de plusieurs tueries récentes. Les effets secondaires de ces antidépresseurs incluent en effet une hausse de l’agressivité, une baisse des remords et une altération de la personnalité susceptible d’avoir pu jouer un rôle, d’autant que de nombreux serial-killers et autres auteurs de meurtres particulièrement barbares et « inexplicables » prenaient ces médicaments.

De plus, la brutale hausse des cas de violence extrême chez les jeunes fut concomitante avec l’apparition des antidépresseurs ISRS, en 1987, et leur prise de plus en plus massive par les jeunes.

Plusieurs experts ont alors cherché à recenser les cas où ces serial-killers prenaient ces médicaments ISRS qu’ils soupçonnent d’avoir un effet « désinhibant », c’est-à-dire supprimant les barrières psychologiques naturelles qui empêchent de commettre de telles cruautés.

Un site Internet a été créé, « Histoires d’ISRS » (SSRI Stories) (1) où sont répertoriés tous les crimes barbares récents qui ont fait l’objet d’une couverture médiatique où le criminel était officiellement sous ISRS, ainsi que des témoignages individuels. La liste est, en effet, édifiante, et comporte notamment :

– la tuerie de Columbine, aux Etats-Unis : le 20 avril 1999, deux lycéens de 17 et 18 ans tuent 12 camarades et un professeur avant de se suicider chacun d’une balle dans la tête. Il se trouve que l’un des deux meurtriers, Eric Harris, était suivi par un psychiatre qui lui avait prescrit du Zoloft, un antidépresseur de la classe des inhibiteurs sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS). Eric s’étant plaint d’effets secondaires, son médecin lui avait donné un nouvel antidépresseur, du Luvox, peu de temps avant le crime. Le dossier médical du second, Dylan Klebold, n’a pas encore été rendu public.

– Jeff Weise, 16 ans, qui prenait 60 mg de Prozac par jour (trois fois la dose de départ moyenne pour les adultes) lorsqu’il tua son grand-père, l’amie de celui-ci et de nombreux camarades de son école de Red Lake, dans le Minnesota. Puis il se tira une balle dans la tête. 10 morts, 12 blessés.

– Cory Baadsgaard, 16 ans, au lycée de Wahluke dans l’état de Washington était sous Paxil (qui lui donnait des hallucinations) lorsqu’il prit un revolver et prit 23 élèves de sa classe en otages. Il n’a aucun souvenir de l’événement.

– Eric Harris, 17 ans, était sous Zoloft puis Luvox ; Dylan Klebold, 18 ans, dossier médical scellé. École de Columbine à Littleton, Colorado. 13 morts, 23 blessés.

– Chris Fetters, 13 ans, Prozac : 1 mort

– Christopher Pittman, 12 ans, Zoloft : 2 morts

– Mathew Miller, 13 ans, Zoloft : suicide

– Jarred Viktor, 15 ans, Paxil : a poignardé 61 fois sa grand-mère

– Kip Kinkel, 15 ans, Prozac et Ritaline : 4 morts : ses parents, puis 2 élèves + 22 blessés

– Luke Woodham, 16 ans, Prozac : 3 morts : sa mère et 2 élèves + 6 blessés

– Un jeune garçon anonyme (moins de 12 ans) sous Zoloft : suicide

– Pocatello, Idaho : s’est retranché en salle de classe avec une arme pendant des heures.

– Michael Carneal, 14 ans, Ritaline, au lycée de West Paducah, Kentucky : 3 morts, 5 blessés

– Un jeune homme sous Ritaline à Huntsville, Alabama : a massacré ses parents et deux autres proches à la hache

– Andrew Golden, 11 ans, Ritaline, et Mitchell Johnson, 14 ans, Ritaline. Au collège : 5 morts, 10 blessés

– TJ Solomon, 15 ans, Ritaline au Lycée de Conyers, Géorgie : 6 blessés

– Rod Mathews, 14 ans, Ritaline : 1 autre élève battu à mort

– James Wilson, 19 ans, plusieurs médicaments, à l’École primaire de Breenwood, Caroline du Sud : 2 morts, 9 blessés

– Mitchell Johnson, 13 ans, antipsychotiques à Jonesboro, Arkansas : 5 morts, nombreux blessés

– Elizabeth Bush, 13 ans, Paxil : Tirs au collège en Pennsylvania

– Jason Hoffman, Effexor et Celexa. Tirs à l’école à El Cajon, Californie

– Chris Shanahan, 15 ans, Paxil à Rigby, Idaho : 1 mort

– Jeff Franklin, Prozac et Ritaline à Huntsville, Alabama : tue ses parents avec des outils, puis blesse ses frère et sœur

– Neal Furrow, Prozac et autres médicaments prescrits par décision judiciaire. Tirs à l’école juive de Los Angeles

– Kevin Rider, 14 ans, Prozac. Suicide présumé, puis suspecté d’avoir été abattu par un autre élève de 14 ans sous Zoloft et d’autres antidépresseurs

– Alex Kim, 13 ans, Lexapro. Suicide

– Diane Routhier, Welbutrin. Suicide

– Billy Willkomm, Prozac. Suicide

– Kara Jaye Anne Fuller-Otter, 12 ans, Paxil
Suicide après le refus de son médecin de stopper son traitement

– Gareth Christian, 18 ans, Paxil
Vancouver : suicide

– Julie Woodward, 17 ans, Zoloft
Suicide

– Matthew Miller, 13 ans, Zoloft
Suicide

– Kurt Danysh, 18 ans, Prozac
1 mort

– Woody ***, 37 ans, Zoloft
Suicide

– Garçon de 10 ans anonyme, Prozac
A abattu son père

– Hammad Memon, 15 ans, Zoloft
A abattu un autre élève

– Matti Saari, 22 ans, antidépresseur et benzodiazépine
10 morts et un blessé à son université

– Steven Kazmierczak, 27 ans, Prozac, Xanax et Ambien
Northern Illinois University : 5 morts, 21 blessés

– Pekka-Eric Auvinen, 18 ans, antidépresseurs
Jokela High School, Finlande : 8 morts, 12 blessés

– Asa Coon, 14 ans, Trazodone
Cleveland : 1 mort

– Jon Romano, 16 ans, antidépresseurs
New York high school : tir sur un enseignant

– Seung-Hui Cho, antidépresseurs. Virginia Tech : 23 morts, 19 blessés

– Robert Hawkins, 19 ans, Valium et autres antidépresseurs. Centre commercial à Omaha : 8 morts, 5 blessés

Bien entendu, cette liste « ne prouve rien ». Beaucoup de psychiatres expliqueront que, si ces personnes ont commis de tels actes, c’est précisément parce qu’elles avaient un problème psychique à la base que leurs médicaments cherchaient à traiter (sans y parvenir, manifestement). Et que si ces personnes n’avaient pas été sous antidépresseur, elles auraient sans doute fait encore pire.

Mais le fait est que, avant les antidépresseurs, il n’était pas si courant que de jeunes enfants assassinent leurs grands-parents à la hache ou massacrent leurs petits camarades d’école à l’arme à feu. Or, encore une fois, les armes à feu (et les enfants), existent depuis bien avant les années 70 et la mise massive sous antidépresseurs des jeunes.

Les autorités américaines s’alarment

Le 22 mars 2004, l’autorité de santé américaine (FDA) a publié à nouveau une mise en garde au sujet des effets secondaires de ces médicaments, citant « anxiété, agitation, attaques de panique, insomnie, irritabilité, hostilité, impulsivité, akathisie (agitation sévère), hypomanie, et manie chez l’adulte et les enfants traités aux antidépresseurs pour des troubles dépressifs majeurs (2)

Le 14 septembre 2004, la FDA a fait imposer une mise en garde sur les antidépresseurs et le risque de suicide chez les moins de 18 ans. Cette mise en garde a été étendue aux personnes de moins de 25 ans le 13 décembre 2006.

La revue scientifique « Journal of American Physicians and Surgeons », Volume 14, Number 1, du printemps 2009, a publié un article du Dr Joel M. Kauffman, Ph.D., intitulé « Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine : plus de risques que d’avantages ? ». Concernant les affaires citées ci-dessus, le Dr. Kaufmann explique :  « Dans la mesure où aucune étude clinique impliquant des homicides multiples ne pourra jamais être menée, aucune preuve supplémentaire ne risque d’être trouvée. ».

Et en effet, la réalité est que ce ne sont pas les médecins ou les chercheurs en médecine qui sont susceptibles de découvrir un lien entre les antidépresseurs et les crimes de masse, mais les journalistes d’investigation et les avocats cherchant à obtenir justice pour leurs clients, qui se lancent dans des recherches pour réunir de telles preuves.

N’attendez pas que la nouvelle soit publiée dans le « Quotidien du médecin »

Pour débusquer la relation de cause à conséquence, il faut en effet éplucher la presse, locale, nationale, et internationale, à la recherche de faits probants, sachant que la plupart des cas de violence ne sont pas rapportés dans les journaux, et que le fait que l’agresseur soit ou non sous anti-dépresseur au moment des faits n’est que rarement porté à la connaissance du public, ou même des journalistes eux-mêmes, pour cause de « secret médical ».

Nous pourrons donc attendre longtemps encore, avant que la nouvelle d’un lien entre antidépresseurs et actes d’ultraviolence soit établie et publiée dans Le Quotidien du Médecin (la revue qui informe les praticiens au coin de la rue des nouveautés de la médecine officielle).

Il n’empêche que ces faits doivent inciter à la plus grande prudence concernant cette classe de médicaments que sont les ISRS, toute médication devant être prise extrêmement au sérieux par les patients, et plus encore par les parents du patient lorsqu’il s’agit d’un mineur.

Bien à vous,

Jean-Marc Dupuis

Sources :

 

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