Selon de nombreuses sources, l’exploitation sexuelle commerciale des enfants est devenue monnaie courante dans  de nombreuses localités du Cameroun. Malgré les interventions des pouvoirs publics et des  ONG qui ne ménagent aucun effort pour enrayer ce phénomène, le fléau progresse de façon inquiétante dans les rues des villes du Cameroun.

L’institut national de la statistique (INS) aidé par le Bureau International du Travail (BIT) avait mené une étude pilote en 2010 sur l’ensemble du  territoire au sujet de l’exploitation sexuelle des enfants. De là a ce jour, deux ans après, rien n’a fondamentalement changé. Un nombre important et grandissant d’enfants de moins de 18 ans, filles et  garçons, continuent de pratiquer le commerce du sexe. L’enquête pilote sur l’exploitation sexuelle  commerciale des enfants a permis  d’interviewer 1376 jeunes dont l’âge varie  entre 11 et 17 ans. Une extrapolation de cet  échantillon permet d’estimer qu’environ 4 000 enfants de 11 à 17 ans sont impliqués dans l’exploitation sexuelle commerciale au Cameroun. Dans cette activité, on relève une très forte présence des filles (98,6%) par rapport aux garçons (1,4%), quelle que soit la tranche d’âge. Une part importante d’enfants sont obligés de migrer vers les milieux urbains, la principale raison évoquée étant la recherche du travail et des moyens de survie pour leurs familles respectives.

L’analyse de la migration des travailleurs du sexe relève une propension de ceux-ci à quitter les villes moyennes ou les villages pour venir s’installer dans des chefs-lieux de départements pour être anonymes ou à la recherche d’autres opportunités plus rentables ou encore pour des raisons familiales.

La principale raison justifiant leur migration est la recherche du travail (37,2%). D’autres, par contre, soulignent que leur principale raison est liée au déplacement ou à la séparation de la famille pour respectivement 17,9% et 7,8%.  Les enfants utilisent plusieurs canaux pour exercer leur activité : résidences personnelles, « rues de la joie », hôtels, téléphones, etc. les uns au grand jour et les autres plus discrets, de jour comme de nuit.   En ce qui concerne le lieu d’exercice des activités de ces jeunes, les résidences sont des lieux où ces derniers exercent principalement leur métier. C’est le cas de 30,5% d’entre eux. Ils exercent également dans la rue/parcs (25,7%) et dans les hôtels (21,6%). Signalons par ailleurs qu’environ 6% d’entre eux utilisent le téléphone pour être contactés par les éventuels clients.

Une majorité d’enfants continue à garder  un lien avec leur famille d’origine (53,6%),  et il s’agit essentiellement d’un lien basé  sur le transfert de l’argent aux membres  plus démunis. Ce sont les filles qui  envoient plus de l’argent que leurs  homologues garçons. Plus de 95% des enfants travaillant dans la prostitution sont principalement  indépendants ou à leur compte propre.  Plus de la moitié des enfants exerce ce  commerce comme activité principale,  tandis que d’autres en font une activité  secondaire. L’âge des enfants à l’entrée dans la prostitution varie entre 9 et 17 ans, la moyenne d’âge étant inférieure à 15 ans. Au sujet des canaux d’entrée dans la prostitution, près de 66,5% des enfants déclare y être entré de leur propre initiative. Par contre, 11,3% d’entre eux y a été amené par déception ou tromperie, près de 5% y sont vendus par un membre de famille/autre parent ou sur demande d’un parent (victimes de la traite).

L’activité du commerce du sexe chez les enfants au Cameroun se pratique sous plusieurs facettes, soit au grand jour, soit de manière voilée. L’exploitation sexuelle des enfants ne sévit plus désormais dans les seules rues des agglomérations urbaines, mais elle a également envahi les autoroutes des nouvelles technologies de l’information et de la communication via internet.

Aussi quelques recommandations sont-elles faites en l’endroit des autorités, des familles et des éducateurs  à savoir: Sensibiliser les adultes et les jeunes sur les dangers liés la production et l’utilisation du matériel pornographique ; Introduire, tout au long du cycle scolaire, des cours spécifiques de l’éducation sexuelle dans les programmes scolaires ; Informer de plus en plus les jeunes sur les risques auxquels ils s’exposent en pratiquant les métiers du sexe, notamment via Internet ; mettre en œuvre des structures qui auront pour mission de recenser les jeunes, de les former afin qu’ils trouvent leur métier dans un autre domaine ; Intensifier l’information des jeunes sur la traite des enfants ; Mettre sur pied un programme de suivi et de protection des jeunes travailleurs de sexe interpellés par les forces de maintien de l’ordre public ; s’attaquer aux causes sous-jacentes de l’exploitation sexuelle des enfants, à savoir, la pauvreté, les dysfonctionnements familiaux, la toxicomanie, l’éthylisme, le proxénétisme, etc.