Rachel Shabi, une journaliste britannique spécialiste du Moyen-Orient, ne pourrait pas mieux exprimer le sentiment général –et la conviction- qui domine les media occidentaux et arabes ainsi que les analystes politiques depuis que les révolutionnaires libyens soutenus par l’OTAN sont entrés dans Tripoli.

* »Ainsi, par exemple, c’est dans cette section que The Independent rapporte « une ruée sur le profit dans le désossage de la Libye d’après-guerre »*, analyse-t-elle sur Al Jazeera *.

« De la même façon, Reuters, sous le gros titre « promesse pour l’œil des investisseurs dans la Libye post-Kadhafi « a noté qu’un nouveau gouvernement dans ce pays pourrait annoncer une bonne affaire pour les entreprises occidentales et les investisseurs », cite Shabi.

**En train d’évaluer leur intervention rémunératrice**

Et Reuters continue : « Avant que Tripoli soit complètement tombée, avant que Kadhafi et ses fidèles soient déchus et avant que le sang sèche sur les corps qui doivent encore être comptés, les pouvoirs occidentaux sont déjà en train d’évaluer ce qu’ils considèrent comme seulement des récompenses pour leur intervention. »

Il n’y a plus d’illusions sur les interventions des forces de l’OTAN qui ont outrepassé la résolution sécuritaire de l’ONU « , ajoute Shabi, « pendant des mois, les fonctionnaires de l’OTAN ont répété qu’il s’agissait d’une opération dans les limites du mandat – une campagne aérienne, conçue pour protéger des civils menacés d’attaque. »

« Mais maintenant l’opération est décrite comme un « secret dévoilé » : les pays de l’OTAN opéraient au sol en secret », a écrit Shabi le 26 août, l’auteur du livre primé  » Not the Enemy – Israel’s Jews from Arab Lands « .

**Pétrole, « Reconstruction » …**

Concernant le business du pétrole, elle fait référence au rapport Reuters qui dit « les entreprises occidentales ont l’air bien positionnées au moment où des milliards de dollars sont à prendre en contrats d’exploration pétrolière et de construction comme éléments de l’effort de reconstruction. »

« Sans parler des profits énormes de la reconstruction dont la Libye aura maintenant besoin, il y a de vastes intérêts pétroliers qui restent à distribuer », dit Shabi. « L’industrie pétrolière libyenne a produit 1,6 million de barils par jour avant la guerre. Le pays est censé avoir 46 milliards de barils de réserve, la plus importante d’Afrique. »

**La grande ruée vers l’argent**

Il ne faut pas s’étonner que, propulsés par le pétrole, la  »reconstruction » et les corporations privées d’armement, alors qu’ils sont englués dans une profonde crise financière, les gouvernements européens et américains se soient lancés dans une course frénétique pour s’emparer de la Libye avant même la chute caractérisée du dictateur Kadhafi, a écrit Osman Sharif pour Human Wrongs Watch le 24 août * *

Pour commencer, la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis ont réussi à persuader le Conseil de sécurité de l’ONU de consentir le 25 août, à procéder au déblocage de 1,5 milliard de dollars des fonds gelés de la Libye.

Ces fonds seront délivrés directement à « des organisations humanitaires internationales (500 millions) avec 1 milliard pour les « vendeurs tiers qui fournissent combustible et autres marchandises humanitaires d’urgence ».

Pour sa part, les Etats-Unis pensent à des moyens de dégeler progressivement jusqu’à 37 milliard dollars qu’ils détiennent encore. De précédents rapports datés du 23 août estimaient les avoirs gelés totaux de Kadhafi dans les banques étrangères à quelque 100 milliards de dollars.

**Négocier avec l’ex-ministre de Kadhafi Mustafa Jalil**

Pendant ce temps, les pouvoirs occidentaux, principalement la France, les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l’Italie, ont lancé une campagne diplomatique frénétique pour sceller le nouvel accord commercial avec le Conseil Transitionnel National libyen (CTN).

Dans ce but, le président du Conseil, Mustafa Abdul Jalil, et ses meilleurs collaborateurs ont été invité d’urgence en France et en Italie pour discuter des détails du nouvel accord.

Jalil a servi le régime de Kadhafi pendant quatre années (2007-2011) comme ministre de la Justice. Il a été considéré par l’opposition libyenne comme un des cerveaux officieux de l’establishment libyen. Maintenant ils le voient comme l’homme qui s’est opposé « en douceur » au dictateur.

Parallèlement à « l’accord commercial » et comme l’une de ses composantes, des fonctionnaires de l’OTAN et de l’UE semblent avoir dit à Bruxelles le 23 août qu’ils se préparaient à soutenir l’organisation des élections, à financer les média libyens, à installer un système judiciaire et concevoir des politiques économiques pour augmenter la croissance, le développement et la création d’emplois.

Beaucoup de questions subsistent –l’une d’entre elles étant le rôle militaire que l’OTAN et ses pays membres prévoient de jouer dans la période post-Kadhafi. Des déclarations successives de diplomates mèneraient à penser que l’armée est allée en Libye pour y rester, très probablement sous le voile habituel de « maintien de la paix ». (Human Wrongs Watch)

* Lire le rapport complet de Rachel Shabi sur Al Jazeera:

[http://english.aljazeera.net/indepth/opinion/2011/08/201182511546451332.html](
http://english.aljazeera.net/indepth/opinion/2011/08/201182511546451332.html)

* * Lisez aussi « Libye : les rois du marché s’y précipitent » de Osman Sharif sur :
[http://human-wrongs-watch.net/](http://human-wrongs-watch.net/)

And: “Who Will Replace The Libyan ‘Mad Dog’?” at:

[http://human-wrongs-watch.net/2011/08/24/who-will-really-replace-the-mad-dog-in-libya/](http://human-wrongs-watch.net/2011/08/24/who-will-really-replace-the-mad-dog-in-libya/)