Lors de sa conférence, sur le bouddhisme face à la mort, Fabrice Midal a clairement voulu remettre les pendules à l’heure. Sur un ton à la fois plein d’humour mais aussi de fermeté, il a resitué pour nous le livre des morts tibétain dans son contexte du 8ème siècle. Tout d’abord, la traduction correcte et littérale est « le Livre sur la Libération » Bardo signifiant intermédiaire et Total, libération par l’entente. Au départ c’était un livre difficile destiné aux initiés. Il y a des livres écrits par des hommes et puis des livres écrits par une inspiration. Ce qui est le cas ici. Aujourd’hui, c’est un des livres les plus vendus dans le monde. Pourtant, F.Midal se demande bien ce que l’on peut comprendre alors que les illustrations (des personnages souvent animalisés aux couleurs criardes et aux expressions monstrueuses) correspondent aux illustrations de l’époque. Si l’on voulait illustrer aujourd’hui les mêmes propos avec des images actuelles, on choisirait des Goldorak ou des Casimirs. Cela aurait plus de sens !

En parlant de la méditation, là aussi, il met en garde : la méditation ne sert pas créer une zone de protection ni d’introspection narcissique. On parle aujourd’hui de « gérer les émotions » comme on gère un compte en banque ! Au contraire, la méditation, c’est avoir le courage de s’ouvrir de plus en plus à une relation vivante d’émotion et faire face à tout ce qui pourrait advenir. Ce n’est pas « je suis triste » mais « la tristesse vient  à moi» A quoi cela servirait-il de devenir des vaches ou des grenouilles, paisibles et insensibles aux autres ?

L’attitude de méditation se crée dans un environnement paisible et tranquille, de veille. Mais dans notre société, c’est emmerdant de ne « rien faire » et de s’écouter quand on est préoccupé par l’action !

Il est essentiel d’enseigner à partir de la réalité, pour y répondre et non pas pour chercher à s’en protéger. Justement, notre époque est une époque formidable dans laquelle être bouddhiste amène à offrir des réponses différentes par rapport à la confusion du monde actuel.

En revenant sur le thème de la mort, il rappelle que, pour les bouddhistes, la mort est un processus inhérent à l’existence, illustrant ce propos par l’histoire de cette maman qui, folle de douleur d’avoir perdu son fils, supplie Bouddha de le ramener à la vie. Face à son imploration, Bouddha lui répond qu’il lui rendra son fils si elle lui ramène des graines de moutarde (épice très courantes en Inde) provenant d’une maison où l’on n’a jamais connu le deuil. Heureuse de cette demande si simple, la femme s’en va frapper aux portes des maisons du village. Mais dans chaque maison, les habitants ont perdu soit un grand-père, soit un enfant, soit un autre membre de la famille. Il n’existe aucune maison qui n’ait connu le deuil.

Lors de notre entretien avec Fabrice Midal, nous l’avons interrogé sur son regard face au Salon de la Mort.

« *Pourquoi votre présence à ce Salon ?* »

A mon avis, ce Salon est un projet très important, d’ailleurs, je fais partie depuis ses origines, du comité de soutien.
Je dénonce la culture actuelle « d’absence de conscience ». On passe en moyenne 3h30 devant la TV mais on n’a « pas le temps » de 15 min de méditation par jour.
Actuellement, on met la mort de côté, il y a déni. Et cela entraîne des conséquences sur l’existence humaine et sur sa recherche.
Or, la vie et la mort sont indissociables.

Au lieu d’une devise pour nos lecteurs, F.Midal préfére inviter les lecteurs à lire les poésies de Eric Maria Rilke, qui échappent à la compréhension immédiate, et qui permettent de passer à un autre rapport que celui d’un expert qui sait tout.
La phrase à laquelle il pense est celle écrite sur la pierre tombale de Rilke : « Rose, oh pure contradiction, volupté de n’être le sommeil de personne sous toutes ces paupières ».