Quand la Russie a lancé son invasion à grande échelle de l’Ukraine en février 2022, l’idée largement répandue à travers l’Occident était qu’il y avait un choix binaire à faire : aider les efforts militaires de l’Ukraine pour riposter, ou laisser la Russie gagner. L’heure n’était pas à l’idéalisme pacifiste naïf.[1]

Alexandre Christoyannopoulos (*)

Cependant, caractériser et rejeter le pacifisme comme un idéalisme naïf, c’est mal comprendre ce qu’il peut offrir comme analyse. Le pacifisme accueille des courants très divers. Rares sont les pacifistes qui s’opposent réellement à toute guerre en adoptant une posture absolutiste et puriste. Certains pacifistes se distinguent en critiquant la guerre et en s’engageant dans des options alternatives de manière beaucoup plus stricte que d’autres, mais leurs justifications sont fondées sur des arguments divers, et leur analyse s’étend souvent au-delà de la seule guerre pour critiquer plus largement les nombreuses composantes du « système de la guerre » [war system].[2] Le pacifisme a beaucoup à offrir aux Relations internationales (RI) sur « des sujets pertinents tels que la guerre, la violence, la sécurité, la défense, la protection, la consolidation de la paix et autres »[3], et son « assujettissement » historique jusque dans la recherche académique sert les intérêts de ce que Cady décrit comme le warism (« guerrisme ») et l’économie politique qui lui est associée.[4]

L’invasion de l’Ukraine par la Russie pose néanmoins un défi de taille au pacifisme. Peu de pacifistes nieraient la légitimité des efforts visant à étouffer les ambitions coloniales du Kremlin. La question cruciale est de savoir comment. Le choix tel que présenté proposait la voie militaire comme la seule option possible. L’était-ce bien ? Existe-t-il d’autres modes de résistance efficaces ? Et la voie militaire est-elle la plus susceptible de produire de meilleurs résultats à long terme ?

Ce chapitre vise à explorer ces questions. La première section réfléchit à ce qu’aurait pu être une résistance non-violente à l’invasion russe d’une ampleur comparable aux efforts de guerre de l’Ukraine. La deuxième identifie et critique, d’un point de vue pacifiste, deux suppositions courantes qui sous-tendent la voie « guerriste » qui a été choisie. La troisième développe la critique pacifiste en réfléchissant à certaines des implications plus larges de cette voie militaire.

En appliquant la pensée pacifiste à une nouvelle étude de cas, ce chapitre permet donc d’enrichir l’analyse pacifiste et de fournir une lecture de la guerre en Ukraine qui attire l’attention sur des aspects peu étudiés de celle-ci. Il fournit aussi aux critiques du pacifisme des réflexions qui leur permettent de revoir leur appréciation de ce que le pacifisme peut apporter aux questions difficiles en RI. De plus, il ouvre la voie à des propositions concrètes, ancrées dans le pacifisme, à considérer comme des alternatives à la défense militaire.

Plus généralement, avec l’accélération de l’urgence climatique, les tensions géopolitiques croissantes dans un monde de plus en plus multipolaire, la prolifération des armes légères et de destruction massive, le développement soutenu de nouvelles technologies de guerre, et l’expansion continue des budgets militaires, la menace de guerre ne parait que croissante. Démontrer que des réponses efficaces à des défis sécuritaires aussi sérieux qu’une invasion militaire n’ont pas nécessairement à engendrer davantage de violence et de destruction pourrait être important pour aider à désamorcer toutes tensions présentes et futures, et potentiellement interrompre les cycles mimétiques de guerrisme et de violence organisée. Cette analyse pourrait donc trouver un écho au-delà du monde universitaire et contribuer à éclairer les débats et les politiques publiques relatifs à la défense, à la sécurité et à la politique étrangère.

Ce chapitre se concentre sur les réponses à l’agression massive de la Russie, et non sur ses causes. L’objectif n’est pas non plus de condamner ceux qui, en Ukraine, ont adopté des moyens violents pour se défendre. Ces réactions sont compréhensibles, notamment en raison du paradigme dominant évoqué ci-dessous. Il est également plus difficile d’opter pour des manières alternatives de réagir et de résister à une invasion lorsque ces alternatives sont peu connues, peu étudiées, et mal comprises. Ce chapitre arrive trop tard pour modifier l’histoire récente. Mais la question de savoir comment réagir à une invasion, et comment s’y préparer en amont, est une question qui restera d’actualité. C’est surtout sur de telles préparations futures que ce chapitre espère avoir un impact.

1. La « résistance » non-violente ?

Comment peut-on espérer résister efficacement et de manière non-violente à une invasion de grande ampleur ? Gene Sharp a dressé en 1973 une liste de 198 méthodes de résistance non-violente. Elles vont des protestations symboliques (discours, pétitions, affiches, tracts, marches, piquets de grève, conférences d’éducation populaire) à la non-coopération (boycott de consommateurs, refus de payer, grèves ordinaires ou générales, boycott d’élections, docilité lente), et à des formes d’intervention plus conflictuelles (désobéissance civile, grèves de la faim, sit-in, occupations non-violentes). D’autres ont été testées depuis,[5] et l’avènement du numérique a ouvert encore plus de possibilités.[6] Certaines de ces tactiques non-violentes ont été utilisées au début de la guerre en Ukraine,[7] bien qu’elles aient été rares, et que le conflit violent ait rapidement pris le dessus.

1.1. L’efficacité de la résistance non-violente

De telles méthodes peuvent-elles être efficaces ? Les discussions entre partisans de la violence et de la non-violence sont souvent peu concluantes : des exemples historiques peuvent être échangés sur les méthodes préférées qui semblent avoir « fonctionné » et les méthodes rejetées qui ont « échoué », et de toute façon, de nombreuses campagnes comprennent souvent des exemples de tactiques violentes et non-violentes, ce qui rend difficile la détermination de la méthode décisive dans le « succès » ou l’ « échec ».

Néanmoins, une étude majeure de Chenoweth et Stephan a réorienté le débat,[8] parce qu’elle a examiné 323 cas de résistance violente et non-violente entre 1900 et 2006 et a constaté que, même si le succès n’est certainement pas garanti, la résistance non-violente semble fonctionner globalement deux fois plus souvent que la résistance violente. En outre, lorsqu’elle fonctionne, la résistance non-violente engendre généralement des sociétés plus respectueuses des droits humains et des principes démocratiques que lorsque la résistance violente réussit. Ces conclusions ne sont pas incontestées et ont été nuancées par certains, et il existe un débat considérable, et jusqu’à présent non concluant, sur l’efficacité de la « violence collective non-armée » et celle des « flancs radicaux » (et potentiellement violents) des campagnes plus « modérées ».[9] Dans l’ensemble, cependant, les principales conclusions de Chenoweth et Stephan n’ont pas encore été réfutées de manière convaincante, et leur travail de pionnier a suscité un nombre croissant d’études qui l’affinent et s’en inspirent.

Quoi qu’il en soit, lorsqu’il s’agit d’appliquer ces conclusions à l’Ukraine, les critiques peuvent faire valoir que la base de données de Chenoweth et Stephan couvre des exemples de résistance essentiellement nationale, et non de guerre interétatique. Néanmoins, cette base de données contient de nombreux cas de résistance à des régimes répressifs et autoritaires. Et c’est en fait la voie qu’il convient d’envisager pour notre réflexion : une résistance ukrainienne non-violente d’abord à l’invasion russe, mais aussi probablement ensuite à l’occupation répressive russe. La discussion qui suit est donc inévitablement spéculative, imaginant une histoire contre-factuelle d’une réponse ukrainienne différente à l’invasion à grande échelle de la Russie. Mais une telle spéculation est inévitable lorsqu’on envisage des histoires alternatives, même si la discussion laisse plus de questions ouvertes que de réponses. En outre, cette spéculation n’est pas moins discutable en ce qui concerne la fiabilité de son pronostic que n’importe quel conseil de politique étrangère donné dans le présent au sujet de l’avenir.

1.2. Comparaison des scénarios en Ukraine

Les manifestations de « l’Euromaidan » de 2013-2014 qui ont renversé le gouvernement de Viktor Ianoukovitch, soutenu par le Kremlin, ont permis aux Ukrainiens d’acquérir une expérience considérable en matière d’expérimentation et d’adaptation de méthodes de résistance non-violentes. Quelques jours après ce succès, la Russie a envahi la Crimée, et ses opérations dans le Donbass ont suivi quelques semaines plus tard. De 2014 à 2022, le conflit avec la Russie quelque peu gelé mais toujours présent dans l’esprit des Ukrainiens, l’Ukraine a poursuivi une stratégie consistant à presque doubler ses dépenses militaires tout en cherchant à se rapprocher de l’OTAN.

Et si, au lieu ou en plus de cela, le gouvernement ukrainien avait mis en œuvre une stratégie et une politique de formation massive de l’ensemble de sa population aux méthodes de résistance non-violente ? Les partisans de la résistance non-violente ont toujours souligné l’importance de la formation et de la planification. Il faut de la discipline et de l’entraînement pour rester non-violent face à une répression violente. La formation à la non-violence implique également de se familiariser avec un large éventail de campagnes non-violentes, couronnées ou non de succès, qui sont autant de sources d’inspiration et de créativité. La mise en œuvre d’un programme visant à former l’ensemble de la population ukrainienne à la résistance non-violente nécessiterait des efforts financiers et administratifs considérables, mais c’est exactement ce qu’un État a la capacité d’organiser. Imaginons donc qu’en 2022, l’ensemble de la population ukrainienne ait été formée aux méthodes non-violentes de résistance civile. Si une telle voie avait été choisie, que se serait-il passé à partir du 24 février 2022 ?

On pourrait commencer par réfléchir à la manière dont les perceptions (et les descriptions) de l’Ukraine par le régime russe auraient été différentes dans un tel scénario. Sans la montée en puissance militaire de l’Ukraine, et sans ses tentatives d’adhésion à l’OTAN, certains des arguments choisis par le Kremlin pour justifier l’invasion de 2022 seraient moins crédibles et plus difficiles à faire accepter pour l’opinion publique nationale et pour les soutiens internationaux potentiels.

Imaginons toutefois que des troupes russes franchissent les mêmes lignes le 24 février 2022. Les Ukrainiens les rencontreraient sans armes. Ils sortiraient dans les rues. Ils bloqueraient les routes. Ils s’adresseraient directement aux troupes russes (souvent dans leur langue), peut-être au moyen d’affiches, de chansons et de tracts, et en utilisant divers canaux médiatiques. Cela empêcherait-il la violence russe ? Probablement pas. Les troupes russes tireraient, blesseraient, et tueraient. Elles écraseraient des civils. Elles continueraient à marcher. Mais les Ukrainiens continueraient à ne pas recourir à la violence. Les faits se feraient savoir via les canaux d’informations et réseaux sociaux. Les soldats russes continueraient à obéir aux ordres pour l’instant, mais certains au moins commenceraient bientôt à trouver cela troublant. Certains remettraient en question les récits officiels russes. Certains seraient traumatisés par la violence qu’ils infligeraient à des Ukrainiens pacifiques les affrontant de manière non-violente.

Imaginons néanmoins que les troupes russes progressent et finissent par occuper toute l’Ukraine. Il y aurait eu de nombreuses victimes ukrainiennes, mais pas de représailles violentes. Commencerait maintenant, pour le gouvernement russe, le défi d’occuper l’Ukraine, de changer sa structure politique, de recadrer les médias et les récits éducatifs, et de gérer l’Ukraine au diapason du Kremlin. Mais les Ukrainiens auraient été préparés. Ils résisteraient, de manière non-violente mais tenace, à chaque initiative. Comme les enseignants norvégiens qui ont refusé d’enseigner le programme scolaire nazi, les médecins néerlandais qui ont refusé la nazification de leur profession, les enseignants polonais qui ont organisé un enseignement clandestin pendant l’occupation, comme les nombreux travailleurs de l’industrie lourde et administrateurs publics dans les territoires occupés par les nazis, et malgré les menaces, les arrestations et les persécutions, ils refuseraient de collaborer, ils travailleraient au ralenti, ils feraient grève et ils exploiteraient des canaux parallèles pour poursuivre ce que la Russie voudrait arrêter.[10] Il y aurait des pétitions, des grèves, des sit-in, de la désobéissance civile, des occupations, des boycotts. Les alliés de l’Ukraine y ajouteraient boycotts économiques et politiques. En Russie aussi, un nombre croissant d’opposants à l’invasion organiserait des actions similaires. Peu d’Ukrainiens collaboreraient à l’occupation, et un nombre potentiellement croissant de Russes la désavouerait également.

En fait, dans les premiers temps de l’invasion, il y a bien eu diverses initiatives non-violentes de résistance populaire par des groupes de civils.[11] Mais ces initiatives furent peu nombreuses, et eurent tendance à être sous-médiatisées et noyées par les tambours plus bruyants de la guerre. Elles ne bénéficièrent que d’un soutien limité de la part des gouvernements, et ne furent que peu amplifiées ou discutées dans les grands médias.

Imaginons que ces initiatives aient bénéficié d’une planification et d’une préparation gouvernementales beaucoup plus poussées, conduisant presque tous les Ukrainiens à organiser obstinément et courageusement une résistance non-violente à grande échelle à l’invasion russe. Le Kremlin se retrouverait de plus en plus incapable de gouverner, étendu sur un vaste pays occupé, et confronté à un mécontentement intérieur croissant. Il s’efforcerait de vilipender les Ukrainiens qui résistent, mais il n’y parviendrait pas. Même s’il s’efforçait de diaboliser ses opposants, des aperçus de la réalité se diffuseraient à travers la Russie via les médias sociaux, les soldats de retour au pays et le bouche à oreille, que les Russes compareraient et recouperaient avec les récits officiels. L’invasion et l’occupation resteraient violentes. Des milliers, voire des dizaines de milliers d’Ukrainiens pourraient avoir été tués et blessés. Mais les Ukrainiens auraient été entraînés à rester non-violents dans leur résistance déterminée. Ils auraient été préparés au « jiu-jitsu moral » ou « politique »[12] de la non-violence, parfois appelé « effet boomerang » [backfire effect],[13] par lequel la résistance résolument non-violente à la violence de l’adversaire modifie le rapport de force moral et érode le consentement dont la l’agresseur a besoin de la part de sa propre population pour poursuivre son action.

Les spécialistes de la désobéissance civile considèrent que l’efficacité apparemment supérieure de la résistance non-violente est en partie due au fait que ces actions affaiblissent les piliers du soutien au régime, alors que la résistance violente a tendance à les renforcer.[14] Lorsqu’ils sont violents, les adversaires sont plus facilement rejetés et déshumanisés. Leurs actions peuvent facilement être qualifiées de menaçantes, justifiant une coordination et une mobilisation accrues au nom de la sécurité et de l’autodéfense. Lorsque votre adversaire est constitué de civils qui s’adressent à vos troupes avec respect et avec une absence troublante de violence, en dépit de votre propre violence à leur égard, les doutes sont plus susceptibles de s’insinuer. L’esprit des principaux architectes de l’opération ne sera peut-être pas affecté, mais de nombreux rouages de la machinerie nécessaire à la mise en œuvre de la politique pourraient l’être. Combien de temps cela pourra-t-il durer ? L’opération restera-telle viable face aux défections croissantes, allant des troupes sur le terrain à certains responsables plus haut placés, et probablement face aussi au mécontentement non-violent croissant dans le pays ? En effet, combien de temps le régime de Poutine durerait-il, en Ukraine mais aussi en Russie ?

Soyons clairs : cette voie ne serait pas exempte de violence et de souffrance. Il y aurait probablement plusieurs milliers de victimes ukrainiennes. Il s’agirait d’endurer des dommages considérables, sans garantie de succès. Mais comment cela se compare-t-il avec le chemin parcouru depuis février 2022 ? En novembre 2024, selon certaines estimations, au moins 12 000 civils et 542 000 soldats – beaucoup à l’origine des civils mais enrôlés, et donc comptés comme soldats – avaient été tués, et beaucoup d’autres blessés. Des millions de personnes ont été déplacées. Des villes ont été ravagées. Au début de l’année 2024, la Kyiv School of Economics a estimé le coût économique de la guerre à plus de 600 milliards de dollars.[15] En outre, non seulement cette voie a déjà été très violente, mais il n’y a pas de fin en vue, et aucune garantie de succès. Tout cela avant de considérer les implications plus larges de la voie militaire, discutées ci-dessous.

La question impossible mais cruciale qui se pose alors est la suivante : est-il certain qu’une voie de résistance non-violente à grande échelle aurait été pire que la voie militaire qui a été empruntée ? La voie non-violente semble difficile, incertaine, et violente, mais la voie militaire ne l’est pas moins. Toutes deux impliquent des souffrances considérables, et aucune n’est assurée de fonctionner. Le bilan de la voie guerrière à ce jour est au mieux ambivalent, et l’avenir toujours incertain. Est-il certain que la voie de la résistance non-violente à grande échelle aurait été pire en termes de processus et de résultats ?

Pourtant, la réaction militaire ne fut guère remise en question. Le peuple et le gouvernement ukrainiens se sont mobilisés et ont combattu, héroïquement, et les alliés de l’Ukraine se sont joints à eux en fournissant des armes. Pourquoi ? L’une des raisons est sans doute que les méthodes de résistance non-violente ne sont pas largement connues et restent peu étudiées, notamment en RI et dans les groupes de réflexion proches du pouvoir politique. Une autre raison, cependant, est que le choix par défaut d’une réponse militaire repose sur des postulats tenaces concernant le fonctionnement de la violence organisée.

2. Présuppositions tenaces

Parmi les postulats sur le fonctionnement de la violence que les pacifistes remettent en question, deux semblent particulièrement pertinents pour cette guerre.

2.1. Efficacité de la violence

La première est l’hypothèse, répandue dans les milieux militaires mais aussi dans la culture populaire au sens large et renforcée par les mythes nationaux et les mémoires collectives, selon laquelle la violence est une méthode ou un moyen efficace pour arriver à ses fins, ne serait-ce qu’en dernier recours.

Il y a pourtant de quoi en douter. D’une part, dans tout conflit violent, si l’une des parties gagne, l’autre perd : la violence échoue donc au moins une fois sur deux. Par ailleurs, la réaction de ceux contre qui la violence est utilisée peut être de se conformer ou de résister. En outre, peu de guerres au cours du siècle dernier se sont soldées par une victoire militaire décisive, et l’une des leçons à tirer d’exemples tels que la guerre du Viêt Nam, les guerres (soviétique et de l’OTAN) en Afghanistan, ou encore la guerre en Ukraine, est que les États dotés d’une plus grande capacité militaire ne sortent pas nécessairement vainqueurs. Contrairement aux hypothèses dominantes en RI sur la violence militaire, les données empiriques suggèrent que la violence n’est pas particulièrement efficace pour atteindre les objectifs politiques déclarés, et qu’une plus grande capacité à l’infliger n’est pas non plus une garantie de succès.[16]

Ce que le recours à la violence garantit, en revanche, c’est une série de dommages, qu’il s’agisse de violence interpersonnelle (y compris sexiste) ou de destruction matérielle et environnementale. Les fins ne seront peut-être pas atteintes, mais les moyens auront certainement leurs impacts. La violence militaire détruit les infrastructures. Elle afflige les victimes et leurs proches. Elle fait des brutes de ses auteurs. Elle traumatise toutes les personnes concernées. Pour paraphraser Arendt, les moyens violents ont beau ne pas garantir les objectifs pour lesquels ils sont ostensiblement déployés, ils transforment le monde en un monde plus violent.[17]

Cela ne signifie pas que le recours à la violence ne profite à personne. De larges profits peuvent être réalisés par la production d’armes. Des agendas et des carrières politiques peuvent être avancées. Des concurrents peuvent être discrédités. Des cibles spécifiques peuvent être éliminées. Des images d’actions décisives peuvent être projetées. Les pacifistes s’inquiètent depuis longtemps de la manière dont ce genre d’intérêts pèsent lourdement sur les décisions de faire la guerre.[18]

2.2. La nature humaine

 Un deuxième postulat, tenace et pourtant contestable, est que riposter en cas d’attaque fait partie de la « nature humaine », et que cela s’applique aussi bien aux États qu’aux individus.

Premièrement, le pacifisme ne doit pas être confondu avec la passivité. Les pacifistes ne nient pas l’existence d’une tendance « naturelle » à réagir, voire à résister. La question est de savoir comment. Lorsqu’un individu est attaqué, il peut envisager toute une série d’options (plaider, crier, voire résister physiquement) avant de tuer immédiatement l’agresseur. Si l’on considère des groupes d’individus plus larges, là encore, de nombreuses réponses possibles peuvent être envisagées de manière créative avant de recourir à la violence meurtrière.

La violence entre États est de toute façon différente de la violence entre individus. Les êtres humains ont des instincts, des émotions. Leur intégrité physique peut être détruite. Les États sont des institutions, des administrations complexes dont le fonctionnement efficace est plutôt entravé quand les émotions sont trop fortes. La machine de guerre exige de chacun de ses rouages l’exécution froide et rationnelle de leur fonction. En outre, un État n’est pas « détruit » de la même manière qu’un individu. Le régime et l’élite peuvent être remplacés, mais la nature de la menace n’est pas identique.

Quoi qu’il en soit, pour qu’un État puisse riposter violemment lorsqu’il est attaqué, il faut une préparation qui est sensiblement différente de celle des individus. Pour les États, cela nécessite une armée permanente (ou des réservistes entraînés ou des paramilitaires facilement disponibles), donc aussi la mobilisation de ressources humaines, un programme d’entraînement et de discipline pour créer des soldats obéissants, la production ou l’achat d’armes, des récits sur « notre » culture et celles qui sont menaçantes – en bref, ce que les pacifistes (et d’autres) ont décrit comme un « système de guerre » ou un « complexe militaro-industriel » [military-industrial complex].[19] Et cela, à son tour, génère ses propres risques d’effet Pygmalion, y compris de « dilemme de la sécurité » [security dilemma] classique, d’orgueil militariste malavisé, et de propagation de culture militariste dans la société plus large. Anthropomorphiser les États et les traiter comme s’ils se comportaient comme des êtres humains repose donc sur des raccourcis discutables, et occulte l’effet « constitutif » (sur lequel nous reviendrons plus loin) de la préparation à une guerre éventuelle.

En outre, peut être aussi remise en question l’idée que « la violence est partie intégrante de la nature humaine » . D’une part, cette affirmation s’accompagne souvent de préjugés genrés douteux concernant la « nature » féminine et surtout masculine, préjugés qui se reflètent ensuite, par exemple, dans la prescription de la conscription obligatoire pour tous les hommes d’un certain âge.[20] Quoi qu’il en soit, étant donné que les êtres humains tendent à vivre pacifiquement la plupart du temps, on pourrait tout autant dire que la condition humaine « naturelle » est la paix, non la guerre. Il ne s’agit pas de nier que la violence peut éclater. Pourquoi elle éclate quand elle le fait, et comment la prévenir ou la combattre, sont évidemment des questions importantes, mais ce sont des questions que les pacifistes abordent avec des yeux aussi grands ouverts que ceux qui proviennent d’autres écoles de pensée.

Il pourrait donc être « naturel » que les Ukrainiens soient poussés à résister à l’invasion russe, mais supposer qu’une telle réaction ne peut qu’être violente et que cela n’est que la nature humaine revient à simplifier à l’extrême la « nature humaine » et à projeter cette simplifaction de manière douteuse sur les relations interetatiques.

3. L’impact productif de la voie militaire

La critique pacifiste réfléchit également aux conséquences plus larges de la voie militaire telle que celle choisie en Ukraine. Les pacifistes s’inquiètent non seulement de la légitimité et de l’efficacité de la violence en tant qu’instrument, mais aussi de son impact « constitutif », en d’autres termes de la manière dont elle transforme les agents de la violence.

3.1. Auto-renforcement du militarisme et du guerrisme

Les guerres ont tendance à favoriser le durcissement des attitudes et la déshumanisation des sociétés. L’invasion a commencé comme un projet orchestré par le Kremlin sans soutien massif évident de la population russe, et à une époque où de nombreux Occidentaux étaient encore favorables à l’engagement et à l’interaction avec les Russes. Les sanctions occidentales et le soutien à l’Ukraine ont toutefois renforcé la méfiance des Russes à l’égard de l’Occident. En miroir, les opinions publiques occidentales se sont ralliées à une plus grande allégeance à l’OTAN et à une perception consolidée de la Russie et de la Chine en tant qu’ennemis. Les guerres forgent et renforcent les « communautés imaginaires » [imagined communities][21] à partir de mémoires violentes et de méfiance mutuelle. Tout autrement, les méthodes de résistance non-violentes cultivent un degré plus élevé de respect mutuel et sont plus susceptibles de stimuler un changement de volonté et une éventuelle réconciliation.

Les guerres accélèrent également les processus de centralisation et de formation d’État hiérarchique.[22] Elles génèrent des pressions pour centraliser le commandement et le contrôle et pour instaurer des politiques répressives, afin de maximiser la mobilisation des ressources pour l’effort de guerre. Cela inclut la conscription militaire obligatoire des citoyens identifiés comme des « ressources » humaines. Dans cette guerre particulière, des milliers de citoyens ukrainiens et russes ont été contraints de s’enrôler (et par conséquent de tuer ou de mourir). Les deux États ont également pris de multiples mesures répressives à l’encontre de ceux qui s’y sont opposés ou qui ont cherché à s’y soustraire. La guerre a aussi relancé les discussions sur la réintroduction ou l’extension de la conscription en Europe.

La guerre a également eu de multiples conséquences économiques. Les revenus et les profits des industries de défense des deux camps ont considérable cru. En termes de coût d’opportunité, chaque centime du budget gouvernemental dépensé dans le complexe militaro-industriel est de l’argent qui n’est pas consacré à d’autres priorités telles que la santé publique, l’éducation, ou d’autres politiques publiques contribuant à la « sécurité humaine » et à la « paix positive ». L’économie de guerre a également tendance à s’enraciner et à générer sa propre dynamique de renforcement. En d’autres termes, la guerre redonne de la vitalité au complexe militaro-industriel. Les conséquences de cette guerre sur les économies de toutes les parties concernées se feront donc sentir pendant des années.

La guerre a également déclenché un réalignement et un durcissement des alliances internationales et géopolitiques. L’OTAN a retrouvé sa raison d’être originelle . Des pays historiquement neutres sur le plan géopolitique l’ont rejointe (Finlande, Suède) ou ont subi des pressions pour contribuer à l’effort de guerre (Suisse). Le Belarus est désormais plus étroitement aligné sur le Kremlin, dont la coopération et la coordination avec l’Iran et la Corée du Nord se sont également intensifiées. Les risques d’escalade sont réels, y compris en ce qui concerne les armes nucléaires ou d’autres armes de destruction massive.

Le système de guerre est alimenté par un état d’esprit ancré dans des pratiques géopolitiques, des cultures politiques et une économie militaro-industrielle qui constituent à leur tour les conditions de guerres futures, renforçant l’attrait de la guerre en tant qu’option dans le présent et l’avenir. Ce conflit illustre donc comment la guerre devient une pratique sédimentée récurrente qui constitue et perpétue les conditions de sa reproduction.

3.2. Des horizons de sécurité contrastés

Imaginons néanmoins que cette voie militaire ait pu déboucher sur une victoire de l’Ukraine (qui parrait de moins en moins probable). Aurait-il été raisonnable d’attendre d’une Russie encore plus militarisée, mais désormais blessée, qu’elle accepte la paix des vainqueurs ? Même si le régime de Poutine avait été renversé par un coup d’État, comme cela peut arriver aux régimes autocratiques lorsqu’une aventure militaire échoue, le nouveau régime aurait-il été moins militarisé, moins menaçant et moins préoccupé par les élargissements de l’OTAN ou de l’UE ? Or imaginons une victoire russe. Tous les voisins indépendants de la Russie craindraient désormais la prochaine action du Kremlin. Les Ukrainiens jureraient de se venger. Les tensions resteraient vives dans toute l’Europe et les complexes militaro-industriels seraient sous stéroïdes. De même pour une paix basée sur les lignes de démarcation actuelles. En bref, aucune paix extraite de la voie guerrière actuelle ne semble particulièrement apte à assurer la démilitarisation ou les ingrédients d’une coexistence pacifique.

Imaginons, en revanche, la paix qui pourrait émerger d’une résistance non-violente, engagée et à grande échelle. Imaginons d’abord une victoire ukrainienne, dont les contours peuvent être déduits du bilan empirique des campagnes de désobéissance civile réussies. La population russe, tout comme un nombre croissant de ses soldats, aurait du mal à percevoir l’inimitié de l’ « ennemi ». Des changements de loyauté affaibliraient le régime russe. L’exemple ukrainien rajeunirait la résistance civile russe, ce qui pourrait conduire à un changement politique radical en Russie – et peut-être à son tour stimuler des changements similaires au Belarus, en Géorgie, etc. L’Ukraine, devenue ingouvernable pour le régime de Poutine, aurait retrouvé son indépendance. Les héros ukrainiens élevés au rang d’idoles pour les générations futures ressembleraient à Gandhi et à Luther King plutôt qu’à Stepan Bandera. Les populations d’allégeances pourtant différentes seraient plus enclines à travailler ensemble.

Bien entendu, la voie de la résistance non-violente pourrait elle aussi échouer tout comme celle de la guerre. Mais quel échec serait le pire ? Si l’on compare l’échec de la voie guerrière avec celui d’une voie non-violente, laquelle des deux laisserait en son sein des sociétés moins militarisées, moins déshumanisées, et des outils et techniques plus efficaces pour que la résistance se poursuive malgré tout ?

L’une des raisons pour lesquelles le « guerrisme » continue de séduire est qu’il permet d’obtenir ce qui semble être des résultats tangibles sur le champ de bataille. Pour l’Ukraine et ses alliés, la réponse guerrière a permis de repousser l’invasion – pour l’instant. Mais il ne faut pas oublier qu’un territoire considérable a été concédé, que les lignes de démarcation sont instables, que l’issue probable est incertaine, que les coûts humains et matériels sont élevés et en augmentation, et que le militarisme est encore plus enraciné dans toute l’Europe. La non-violence fonctionne différemment. Elle peut avoir des résultats tangibles sur les lignes de front contestées, mais ceux-ci sont parfois moins immédiats et, par exemple, davantage de territoires pourrait être cédés à court terme, parce qu’au lieu d’imposer violemment ses préférences à l’adversaire, le champ de bataille central de la voie non-violente est l’état d’esprit des opposants. La résistance non-violente cherche à s’adresser aux adversaires plutôt qu’à les détruire. Et elle n’alimente pas la machine de guerre.

Le pacifisme et la défense civile non-violente ouvrent la voie à un horizon européen différent. Investir dans la formation de masse à la défense civile non-violente semble au moins aussi susceptible d’assurer la sécurité en Europe que de parier sur la realpolitik traditionnelle des grandes puissances, la « dissuasion élargie », et le militarisme croissant.

4. Conclusions

Il est trop tard pour refaire la réponse ukrainienne à l’invasion à grande échelle du Kremlin. Mais il n’est pas trop tard pour examiner la critique pacifiste et le potentiel des options non-violentes, que ce soit en parallèle ou à la place des tactiques violentes, au fur et à mesure du conflit. Il n’est pas non plus trop tard pour former la population de l’Ukraine ou celles de ses alliés à la résistance non-violente. Et il n’est pas trop tard pour que les décideurs politiques et le grand public réfléchissent aux conflits potentiels et futurs dans le monde entier en gardant ces considérations pacifistes à l’esprit.

Le pacifisme attire l’attention sur le risque d’ « autoréalisation » inhérent à la planification militaire. Tout comme la violence ou l’action agressive tend à déclencher une violence ou une agression mimétique, la résistance non-violente fondée sur le respect de l’humanité de l’adversaire peut également déclencher un respect mimétique. En d’autres termes, l’une des idées pacifistes est que, pour avoir un avenir où nous ne nous sentons pas menacés par nos voisins, nous devons déjà veiller à ce qu’ils ne se sentent pas menacés par nos propres politiques.

La question de savoir si une résistance ukrainienne non-violente à l’invasion russe aurait donné de meilleurs résultats est contrefactuelle et impossible à prouver. Plus généralement, on ne saura pas si la résistance non-violente peut être efficace dans de tels scénarios tant qu’elle n’aura pas été expérimentée à une échelle suffisamment grande. Faire cela nécessitera une planification, une formation à grande échelle aux méthodes de résistance non-violente et un soutien populaire. Cela requerra à son tour plus de diffusion et de discussion d’analyses et de recherches pacifistes.

Howes disait que, compte tenu du « poids des preuves empiriques », ce sont peut-être les partisans et les « praticiens de la violence », et non les pacifistes, qui sont « les idéalistes tragiques »[23] – « idéalistes » parce que leurs hypothèses sur la façon dont leurs méthodes préférées fonctionnent manquent de réalisme, « tragiques » en raison de l’énorme souffrance qu’elles causent. La guerre en Ukraine est déjà tragique. L’idéalisme avec lequel les deux camps l’ont commencée s’est estompé. Il est grand temps de réfléchir à ce que le pacifisme peut apporter à ce conflit et à tous les scénarios futurs lorsque les tambours de la guerre se feront plus bruyants.

(*) Alexandre Christoyannopoulos est maître de conférences en sciences politique et relations internationales à l’Université de Loughborough. Il est l’auteur de Tolstoy’s Political Thought (2020) et de Christian Anarchism(2010), ainsi que de nombreux articles et chapitres sur Léon Tolstoï, l’anarchisme religieux, le pacifisme et l’anarcho-pacifisme. Il est rédacteur en chef du Journal of Pacifism and Nonviolence. La liste complète de ses publications est disponible sur son site web :

https://sites.google.com/site/christoyannopoulos/publications-by-theme.”

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[1] Ce texte est une version condensée et traduite (par l’auteur, avec l’aide de DeepL, Google Translate, et puis surtout de Cécile Dubernet et Edith Buissart, que je remercie) de « Questioning the Warist Orthodoxy: Pacifist Critical Reflections on Russia’s Invasion of Ukraine, » International Affairs 101, no 1 (2025), https://doi.org/10.1093/ia/iiae275. Les citations d’autres auteurs dans l’original ont été traduites de la même manière. Afin d’économiser l’espace, seules les références bibliographiques essentielles sont reprises ici, la liste complète des sources étant disponible en accès libre dans la version anglaise originale.

[2] Alexandre Christoyannopoulos, « An Anarcho-Pacifist Reading of International Relations: A normative critique of international politics from the confluence of pacifism and anarchism, » International Studies Quarterly 66, no 4 (2022), https://doi.org/10.1093/isq/sqac070; Andrew Fiala, dir., The Routledge Handbook of Pacifism and Nonviolence (Abingdon : Routledge, 2018); Richard Jackson, « Pacifism: the anatomy of a subjugated knowledge, » Critical Studies on Security 6, no 2 (May 2018), https://doi.org/10.1080/21624887.2017.1342750.

[3] Jackson, « Pacifism: the anatomy of a subjugated knowledge, » 166.

[4] Duane Cady, From Warism to Pacifism: A Moral Continuum Paperback (Philadelphia : Temple University Press, 2010).

[5] GNAD, « Global Nonviolent Action Database, » (Swarthmore College, 19 December 2023 2023). https://nvdatabase.swarthmore.edu/browse-methods.

[6] « Civil Resistance 2.0: 198 Nonviolent Methods Upgraded, », consulté le 19 September, https://commonslibrary.org/198-nonviolent-methods-upgraded/.

[7] Felip Daza, Ukrainian Nonviolent Civil Resistance in the Face of War: Analysis of trends, impacts and challenges of nonviolent action in Ukraine between February and June 2022, ICIP & Novact (Barcelona, 2022); Marta Kepe et Alyssa Demus, Resisting Russia: Insights into Ukraine’s Civilian-Based Actions During the First Four Months of the War in 2022 (Santa Monica : RAND Corporation, 2023), https://www.rand.org/pubs/research_reports/RRA2034-1.html.

[8] Erica Chenoweth et Maria J. Stephan, Why civil resistance works: the strategic logic of nonviolent conflict (New York : Columbia University Press, 2011).

[9] Erica Chenoweth, « The Role of Violence in Nonviolent Resistance, » Annual Review of Political Science 26, no 1 (2023), https://doi.org/10.1146/annurev-polisci-051421-124128.

[10] Jacques Semelin, Sans armes face à Hitler 1939-1945: la résistance civile en Europe (Paris : Les Arènes, 2013).

[11] « Ukraine Reflections: Pacifism, Violence, and Nonviolent Resistance, », Peace Catalyst International, consulté le 8 March 2024, https://www.peacecatalyst.org/blog/2022/3/14/ukraine-reflections-pacifism-violence-and-nonviolent-resistance; Daza, Ukrainian Nonviolent Civil Resistance in the Face of War: Analysis of trends, impacts and challenges of nonviolent action in Ukraine between February and June 2022; « Ukraine, », consulté le 28 September, https://nonviolentpeaceforce.org/ukraine/.

[12] Richard B. Gregg, The Power of Nonviolence, abridged éd. (London : James Clarke & Co, 1960); Gene Sharp, The Politics of Nonviolent Action (Boston : Porter Sargent, 1973).

[13] Brian Martin, « How nonviolence works, » Borderlands E – Journal: new spaces in the humanities 4, no 3 (2005).

[14] En anglais les spécialistes parlent de piliers qui « s’écartent » ou qui « se resserent ». Chenoweth et Stephan, Why civil resistance works: the strategic logic of nonviolent conflict; Dustin Ells Howes, « The Failure of Pacifism and the Success of Nonviolence, » Perspectives on Politics 11, no 2 (2013); Sharon Erickson Nepstad, Nonviolent Struggle: Theories, Strategies, and Dynamics (Oxford : Oxford University Press, 2015); Brian Martin, « How nonviolence is misrepresented, » Gandhi Marg 30, no 2 (2008); Kurt Schock, « Nonviolent Action and Its Misconceptions: Insights for Social Scientists, » PS: Political Science and Politics 36, no 4 (2003).

[15] Tymofii Brik et al., « Introduction: special issue on the political economy of the War in Ukraine, » Journal of Public Finance and Public Choice 39, no 1 (01 Apr. 2024 2024), https://doi.org/10.1332/25156918y2024d000000006.

[16] Howes, « The Failure of Pacifism and the Success of Nonviolence. »; Richard Jackson, « Pacifism and the ethical imagination in IR, » journal article, International Politics 56, no 2 (December 2017), https://doi.org/10.1057/s41311-017-0137-6; M. S. Wallace, Security without Weapons: Rethinking Violence, Nonviolent Action, and Civilian Protection (Oxon : Routledge, 2017); M. S. Wallace, « Wrestling with another human being: the merits of a messy, power-laden pacifism, » Global Society 34, no 1 (January 2020).

[17] Citée dans Helen Dexter, « Terrorism and violence: another violence is possible?, » Critical Studies on Terrorism 5, no 1 (April 2012).

[18] Alberto Castelli, The peace discourse in Europe, 1900-1945 (London : Routledge, 2018); Sebastian Kalicha, Anarchisme non-violent et pacifisme libertaire: une approache théorique et historique, trad. Gaël Cheptou (Lyon : Atelier de Création Libertaire, 2020).

[19] Jackson, « Pacifism: the anatomy of a subjugated knowledge. »; Cheyney Ryan, « Pacifism(s), » The Philosophical Forum 46, no 1 (2015), https://doi.org/10.1111/phil.12053.

[20] R. Brian Ferguson, « Masculinity and War, » Current Anthropology 62, no S23 (2021), https://doi.org/10.1086/711622.

[21] Benedict Anderson, Imagined Communities (London : Verso, 2006).

[22] Cheyney Ryan, « War, Hostilities, Terrorism: A Pacifist Perspective, » dans Pacifism’s Appeal: Ethos, History, Politics, dir. Jorg Kustermans et al. (Cham : Springer International Publishing, 2019).

[23] Howes, « The Failure of Pacifism and the Success of Nonviolence. »