Sous un soleil lumineux, plus de 100.000 personnes ont à nouveau défilé aujourd’hui dans les rues de Bruxelles pour brandir ensemble un carton rouge aux dirigeants d’Israël mais aussi à la complicité de la Belgique et  de l’Union européenne, Carton rouge aux entreprises complices, au soutien militaire, économique et diplomatique du génocide. 

Photos Mikael dC, Anna L  & Renelde D.

Une nouvelle fois, à Bruxelles, l’appel était clair : brandir un carton rouge à Israël, à la complicité de la Belgique et de l’Union européenne, aux entreprises impliquées, ainsi qu’au soutien militaire, économique et diplomatique au génocide en cours à Gaza. Plus d’une centaine d’organisations et d’ONG étaient à l’initiative de la mobilisation, parmi lesquelles le CNCD-11.11.11, Amnesty International, Médecins sans Frontières, Greenpeace, Save the Children, ainsi que des syndicats, des mouvements d’étudiant-e-s et d’enseignant-e-s, des collectifs palestiniens, des associations et des activistes venus de plusieurs pays.

La manifestation a aussi réuni des milliers de familles, d’individus et de citoyen-ne-s de tous âges, sans nécessairement appartenir à des structures organisées, mais animés par la même volonté d’exprimer leur indignation face à l’inaction des gouvernements.

Des départs groupés en train étaient organisés depuis plus de 15 villes belges, ainsi que depuis plusieurs dizaines de villes néerlandaises.

La marche a débuté par un rassemblement à la gare du Nord, où plusieurs discours ont donné le ton. Ensuite, la foule, grossissant sans cesse, a traversé les artères de Bruxelles pour une marche de près de 4 kilomètres de longueur, traçant une nouvelle « ligne rouge » de corps en direction de la place Jean Rey, à deux pas des institutions européennes. La journée s’est conclue par des performances artistiques et militantes, bouleversantes, illustrant la réalité de la colonisation et l’oppression subie sous l’occupation israélienne.

Des colonies illégales

Le 20 septembre 2024, l’Assemblée générale de l’ONU a soutenu la décision de la Cour internationale de justice (CIJ) de juillet 2024 : Israël avait un an pour se retirer intégralement de ses colonies illégales en territoire palestinien.

Les Etats tiers devaient tout mettre en oeuvre pour faire appliquer l’avis de la CIJ.

Un an plus tard, non seulement Israël n’a pas reculé, mais la colonisation s’accélère. Les crimes se poursuivent. L’impunité demeure. La famine organisée tue. Le génocide continue.

La Belgique contrainte de sortir de son immobilisme

Dans les semaines précédentes, et après un échange de vues au Parlement le 14 août, la Belgique semblait enfin sortir de son inertie. Alors que la population de Gaza demeure soumise à l’horreur absolue, le gouvernement fédéral s’est accordé début septembre sur un paquet de mesures visant à accroître la pression sur Israël afin qu’il respecte le droit international, laisse entrer l’aide humanitaire et mette fin à sa politique annexionniste en Cisjordanie.

Parmi ces mesures réclamées depuis longtemps par la société civile figurent :

  • l’interdiction des produits issus des colonies, à élargir aux services, aux investissements et aux exportations belges, conformément à l’avis de la Cour internationale de justice de juillet 2024 ;
  • l’interdiction d’exporter ou de faire transiter des armes vers Israël, ainsi que l’interdiction de survol du territoire belge pour les vols militaires israéliens, afin de mettre fin à toute complicité ;
  • des sanctions ciblant les colons violents : interdiction d’entrée sur le territoire, gel des avoirs, exclusion des services consulaires et de toute possibilité de long séjour.

 

La Belgique complète ainsi la politique de différenciation initiée en 2021 et se conforme aux obligations internationales. La décision de déclarer les ministres israéliens Itamar Ben Gvir (Sécurité) et Bezalel Smotrich (Finances) personae non gratae sur le sol belge a été saluée, mais la société civile réclame l’élargissement de cette liste à d’autres responsables, à commencer par le Premier ministre Benjamin Netanyahou, visé par un mandat d’arrêt de la Cour Pénale Internationale, et le ministre de la Défense Israël Katz.

La pression sur l’Union européenne et reconnaissance de l’État palestinien

Le gouvernement belge s’est également engagé à pousser l’Union européenne à adopter des sanctions, notamment la suspension de l’Accord d’association UE–Israël, en raison des violations répétées de l’article 2 relatif au respect des droits humains. Il soutient ainsi la suspension du volet commercial, ainsi que des coopérations en matière de recherche, d’innovation et de technologie.

Concernant la reconnaissance de l’État palestinien, le gouvernement belge a annoncé son intention de rejoindre les cosignataires de la déclaration de New York lors de l’Assemblée générale de l’ONU en septembre, aux côtés notamment du Royaume-Uni et de la France. Il a également pris l’engagement de soutenir des sanctions contre Israël, mais « sous certaines conditions ».

Si de nombreux manifestants reconnaissent qu’il s’agit d’un pas en avant, ils jugent cependant le compromis insuffisant et réclament des mesures plus fermes et sans équivoque, non seulement de la Belgique mais aussi de l’ensemble des États membres et des institutions européennes.

La solidarité mondiale se renforce

La manifestation a également résonné avec les mobilisations internationales. Le Global Movement to Gaza, une coalition citoyenne mondiale, poursuit ses efforts pour briser le blocus. La semaine dernière, une flottille de 20 navires avec plus de 300 membres d’équipage est partie du port de Barcelone pour tenter d’établir un corridor humanitaire. Des bateaux d’autres pays, dont la Tunisie et l’Italie, viendront renforcer la Global Sumud Flotilla, à laquelle participent plusieurs eurodéputées, parmi lesquelles Benedetta Scuderi et Annalisa Corrado.

Des pancartes créatives et des messages de soutien à la Flottille étaient nombreux lors de la marche bruxelloise, soulignant l’interconnexion des luttes et l’urgence de briser l’isolement de Gaza et le blocus du gouvernement d’Israël.

Espérons que cette révolte populaire légitime, pleine d’émotion et d’empathie entraine nos politiques à rejoindre les prises de position courageuses et porteuses de paix.  Il est temps.

Pour en savoir plus, mieux comprendre la chronologie des évènements :

https://www.association-belgo-palestinienne.be/%C3%A9v%C3%A8nement/manifestation-nationale-save-the-date/