À l’approche des élections au Venezuela, nous sommes plus attentifs à ce qui s’y passe. Depuis la Guyane, Marco Rubio, secrétaire d’État et conseiller à la sécurité nationale de l’administration de Donald Trump, menace Nicolás Maduro. Que se passe-t-il en Guyane ?

Divers médias rapportent qu’El Esequibo, comme l’appellent les Vénézuéliens, est l’endroit où l’administration étasunienne tente d’étouffer l’industrie pétrolière vénézuélienne. Il s’agit d’un territoire de 60 000 kilomètres carrés que Caracas revendique comme sien et que la Guyane, ancienne colonie britannique située dans les Caraïbes, contrôle effectivement. Le conflit autour de ce territoire explique en grande partie ce qui se passe dans la région.

Il s’avère qu’une énorme quantité de pétrole y a été découverte il y a quelques années. Les projections économiques prévoyaient une énorme puissance pétrolière pour la Guyane. Pour l’extraire, Exxon Mobil s’y est installé avec le soutien politique de Washington.

L’augmentation des tarifs douaniers contre le Venezuela, la révocation des licences et la stratégie visant à étrangler sa production pétrolière ne peuvent être comprises sans prendre en compte les intérêts américains dans le pétrole. En effet, Trump a révoqué la licence de Chevron, la seule entreprise opérant aux côtés de PDVSA au Venezuela, et a imposé des droits de douane de 25 % sur toutes les importations de pétrole vénézuélien, punissant non seulement le Venezuela, mais aussi tous ses acheteurs : Chine, Malaisie, Singapour, République dominicaine, Cuba et Russie, autant de pays qui importent du pétrole vénézuélien.

Sans annuler les sanctions contre la Russie, qui n’a pas pu continuer à vendre son pétrole aux États-Unis, elles ont également été imposées à Caracas, avec une punition indirecte pour ses autres acheteurs.

Le manque de pétrole brut russe et vénézuélien sera compensé, comme le souhaitait Marco Rubio, par ce qu’Exxon Mobil extrait de la Guyane, et plus précisément du territoire contesté. On estime que la Guyane possède environ la quatrième plus grande réserve de pétrole au monde. C’est pourquoi les États-Unis investissent des sommes considérables dans l’extraction pétrolière à long terme.

Au cours des trois dernières années, l’administration de Joseph Biden a tenté de normaliser les relations avec le gouvernement de Nicolás Maduro en levant les sanctions imposées à l’industrie vénézuélienne.

La Guyane possède environ 11 milliards de barils de pétrole, des milliards de dollars en or et une chaîne d’approvisionnement en bauxite exceptionnelle qui n’est pas contrôlée par la Chine. Si Maduro annexe définitivement El Esequibo, tout cela et plus encore ne sera plus accessible aux États-Unis et sera plus facile pour des « adversaires » comme Pékin.

Lorsque Donald Trump a annoncé l’introduction de droits de douane de 25 %, Marco Rubio a entamé sa tournée dans les Caraïbes dans le but de « renforcer la sécurité » des lignes d’approvisionnement en Jamaïque, au Suriname et, bien sûr, en Guyane. Pour renforcer la Guyane contre d’éventuelles menaces, des exercices militaires conjoints entre la marine américaine et les forces de défense guyanaises ont été organisés – coïncidant avec la visite de Rubio – transformant la région en un point chaud. En fait, début mars, une corvette vénézuélienne s’est approchée d’une plateforme d’Exxon Mobil, quelques mois après que le Venezuela a organisé un référendum consultatif sur le territoire contesté.

La carte énergétique des Caraïbes est en train d’être reconfigurée en faveur des intérêts de l’administration Trump. Pour ce faire, le Venezuela a été mis sur la touche, mettant fin à l’initiative Petrocaribe de sorte qu’aucun pays n’achète de barils à Caracas, et s’ils le font, ils sont condamnés à une amende, dans le but de couler le Venezuela et de remplacer sa production par celle d’entreprises situées en Guyane.

Comme si cela ne suffisait pas, il y a quelques jours, des informations ont émergé sur un prétendu accord énergétique secret entre la dirigeante de l’opposition, María Corina Machado, et le fils du président américain, Donald Trump Jr, qui a dû être démenti par l’envoyé spécial américain, Richard Grenell, via son compte sur les médias sociaux. Selon les spéculations, le pacte aurait impliqué le soutien des États-Unis à ses aspirations à la direction du Venezuela en échange du contrôle de l’infrastructure énergétique du pays sud-américain. Si cela est vrai, le comportement de Mme Machado constituerait une trahison des intérêts de la nation et du peuple vénézuéliens.

Entre-temps, à quelques jours des élections régionales et législatives au Venezuela, le chef d’état-major de la défense de la Guyane, le brigadier Omar Khan, a annoncé que tout Vénézuélien participant aux élections à El Esequibo « sera arrêté et déporté », dans le but d’empêcher la participation aux élections du 25 mai, qui incluent Guyana Esequiba comme 24e État et une région revendiquée par la République bolivarienne sur la base de droits historiques sur la région. Par ailleurs, les forces armées nationales bolivariennes, en collaboration avec le Conseil national électoral, poursuivent le déploiement et la protection du matériel électoral sur l’ensemble du territoire national, y compris El Esequibo.

Le samedi 3 mai, la vice-présidente vénézuélienne Delcy Rodríguez a clairement indiqué que le 25 de ce mois,

« le peuple vénézuélien élira le gouverneur de Guyana Esequiba et ses législateurs régionaux ainsi que l’Assemblée nationale conformément à sa Constitution nationale ».

Elle a affirmé que Caracas défendra ses droits historiques sur cette région, qu’ils ont l’intention de dépouiller, et que la Guyane n’a pas d’autre choix que de négocier dans le cadre de l’accord de Genève. « Non seulement la Guyane se soustrait au droit international et à ses obligations, mais elle joue aussi très bien son rôle de contremaître d’Exxon Mobil », a-t-elle déclaré.