Il devient de plus en plus manifeste que le système économique impose sa violence dans tous les champs de la vie humaine et tout le long de cette vie.

L’actuelle réforme des retraites l’illustre parfaitement. Elle génère beaucoup d’inquiétude, toutes générations confondues : au regard d’un marché du travail aléatoire, les jeunes s’inquiètent pour eux-mêmes mais aussi pour leurs parents qu’ils voient fatigués de leur travail ; réciproquement, les parents, qui se projetaient dans une retraite prochaine, s’inquiètent en plus pour leurs enfants ; quant aux grands-parents, ils s’inquiètent pour tous.

« Sacrifier votre présent pour un futur meilleur » nous radote le gouvernement depuis maintenant 40 ans !

Mais en matière de futur, les gens ont plutôt le sentiment de se le faire spolier. Plus personne n’est dupe des fallacieux arguments économiques de ces Pinocchio de la politique. D’ailleurs, le président du COR (Conseil d’Orientation des Retraites) vient lui-même de pointer ce mensonge, réaffirmant que « les dépenses de retraite sont relativement maîtrisées ; dans la plupart des hypothèses, elles diminuent à terme ».

Et même si ces dépenses ne devaient pas diminuer, il y aurait 1000 manières de trouver les recettes !

Car la question de fond – comme sur tous les sujets économiques – n’est pas le déséquilibre des caisses de retraite mais bien celui du rapport capital-travail, par ailleurs injuste dans ses fondements. Alors que ce capital ne cesse d’enfler et de se concentrer sous forme de dividendes dans les mains d’une petite minorité, seul le fruit du travail salarial (de plus en plus exsangue) fait l’objet de redistribution, avec la bénédiction des gouvernements devenus notoirement les instruments de ce capital.

Pour nous humanistes, qui plaçons l’Être humain comme valeur centrale, qui œuvrons pour « sortir du champ de la nécessité pour avancer vers le champ de la liberté », cette question de fond – sous-jacente aux slogans et mots d’ordre de syndicats et de partis – doit se convertir en une question existentielle.

Car au-delà de la retraite, ce déséquilibre prive les gens de leur légitime aspiration à avoir une vie digne et un travail qui a du sens. Et même cette retraite, dernière étape de la vie, il en défigure le sens : pour les plus nantis, elle devient un temps absurde de consommation de divertissements, de soins de santé avant abandon dans un Ehpad privé quand les plus pauvres sont précipités vers une mort précoce.

Pourtant, hors de cette logique économique mortifère, cette période de la vie ne devrait-elle pas plutôt être consacrée à la transmission d’une expérience accumulée, à l’implication sociale, à la joie d’être entouré et, in fine, à celle de sentir que l’on a contribué jusqu’au bout à l’histoire contemporaine ?

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