Quelles sont les options de rechange à l’automobile ? Sont-elles assez séduisantes pour diminuer l’usage de la voiture solo ? À l’heure actuelle, la réponse à cette dernière question, c’est non. La vaste majorité de nos déplacements se font encore sur quatre roues, avec un moteur à essence. 

Et le remplacement par une voiture électrique ne règle pas nécessairement le problème de l’engorgement ou de l’obésité. Cocktail transport En fait, les experts parlent désormais de changer nos comportements en adoptant un «cocktail transport», c’est-à-dire l’utilisation de moyens de transport différents en fonction des circonstances. Par exemple, on peut faire une partie du trajet en auto, puis faire le reste en transport en commun, à vélo ou à pied. Ou utiliser d’autres options (voir l’encadré en fin de texte). 

En fait, rappelle l’organisme Équiterre, le concept de cocktail transport est né dans les années 1990. Il est popularisé depuis par Équiterre et Vélo Québec. Ces organismes disent que le cocktail transport est un mélange intelligent de moyens de transport qui permet de ne pas dépendre à 100   %  de la voiture : transports actifs et collectifs, taxi, autopartage, vélopartage, vélo, location de véhicule, covoiturage, marche… Les bénéfices ne sont pas qu’environnementaux. Un ménage typique consacre le quart de ses revenus aux transports, soit 10 912 $ par année pour l’automobile, selon l’Association canadienne des automobilistes (CAA), pour une utilisation moyenne de 18 000 km par année. 

Or, si vous pratiquez le cocktail transport, les coûts pour votre famille peuvent chuter entre 50 %  et 75 % , affirme Équiterre. Et la plupart des études scientifiques concluent que, pour tous les déplacements urbains, la voiture prend le plus de temps, comparé aux autres modes de transports. 

Le vélo, sur de courtes distances, vous permet d’arriver systématiquement en premier. Un bon moyen de planifier ses transports en mode cocktail: en utilisant des applications comme Google Maps, Apple Plans ou Transit. Elles vous permettent de choisir le meilleur moyen pour vous déplacer d’un point A à un point B, selon l’itinéraire le plus approprié, en indiquant la durée du déplacement. De plus, Transit indique les horaires ou la disponibilité de plusieurs moyens de transport: métro, autobus, Bixi, autopartage. 

À cette liste s’ajoute le menu «   Se déplacer   »  du site web de la STM, qui permet d’obtenir un itinéraire à partir d’une adresse de départ et d’arrivée. Autopartage Des applications offrent le covoiturage classique, comme Amigo Express, Netlift, covoiturage.ca, qui permettent de jumeler des personnes et des employeurs. Exo dispose aussi d’un service de covoiturage qu’on peut découvrir à partir du menu «   Me déplacer/Autres moyens de transport   »  sur son site internet. 

Le service d’autopartage le plus connu, Communauto Flex, est disponible partout dans l’arrondissement, sauf dans Cartierville. On peut réserver un véhicule pour des plages fixes ou sur demande, à partir de son téléphone. Certains Montréalais ont abandonné leur voiture et ne dépendent que de l’autopartage pour se déplacer. Ils réalisent de juteuses économies. 

D’autre part, il est possible de partager des voitures privées à titre de propriétaire ou d’utilisateur invité, à l’aide de l’application Turo. À Ahuntsic, l’organisme LocoMotion offre l’autopartage le moins cher en ville. Une trentaine de propriétaires de véhicules (petite ou grosse voiture, auto électrique) prêtent gracieusement leur véhicule aux participants (on s’inscrit en ligne: locomotion.app). L’objectif est de diminuer le recours à la voiture individuelle. Le tarif, révisé semestriellement, ne couvre ainsi que l’essence, l’usure et la couverture d’assurance additionnelle. 

LocoMotion organise, depuis deux ans, le Défi partage ton auto, qui dure un mois. Il s’agit de quatre rencontres citoyennes sur un mois portant sur des thèmes comme le coût de la voiture individuelle, son usage, les options de remplacement possibles, etc. 

Les participants sont ainsi encouragés à prêter leur voiture aux membres de LocoMotion. «   Nous remettons en moyenne environ 200 $ de prix de participation à chaque participant, comme des billets de transport en commun ou de taxi, ou des cartes cadeaux d’une boutique de vélo du quartier   », révèle Frédéric Bataille, agent de mobilisation chez Solon et organisateur du Défi. 

L’été dernier, le Défi a recruté une quinzaine de participants. Sachant que la population de l’arrondissement dépasse de peu les 134 000 personnes, la mesure a-t-elle un effet ? 

«   On se dit que nous tentons de convaincre un automobiliste à la fois pour briser la dépendance à l’auto   » , répond M. Bataille. Option de rechange traditionnelle à l’auto : le taxi. 

Il est offert sous sa forme classique (les sociétés de taxi ont développé leurs propres applications pour téléphones) ou en mode partage. Sous cette formule, il y a évidemment la multinationale Uber, mais, surtout, Montréal a vu naître son compétiteur, Eva, qui dessert également l’aéroport. Eva est une coopérative et ses chauffeurs sont davantage rémunérés que ceux d’Uber. Certains sont rebutés par les tarifs de certains modes de transport alternatifs à l’automobile, jugés élevés ? 

Une course en taxi ou en autopartage par semaine coûte souvent beaucoup moins cher que l’utilisation de l’automobile pour le même trajet, stationnement et carburant inclus. Vélopartage Outre Bixi, LocoMotion offre un service gratuit de de partage de vélos, de vélos cargo et de vélos électriques dans Ahuntsic. 

On s’inscrit en ligne, on consulte la carte et on réserve son vélo avec son téléphone pour une ou deux heures, ou même une journée. Les vélos cargos, qui permettent de transporter de jeunes enfants, sont particulièrement prisés. De même que les vélos électriques, qui permettent aux gens de tester si ce type de vélo en vaut la peine. L’été, le service ne dérougit pas. LocoMotion offre aussi l’emprunt de remorques à vélo. La majorité des utilisateurs s’en servent pour faire des courses ou déménager de petits objets. Elles sont souvent utilisées pour faire son épicerie au Marché Jean-Talon. 

L’organisme dispose de stationnements à vélo dédiés dans les parcs Henri-Julien et Saint-Alphonse. Vélos et remorques de LocoMotion sont aussi offerts l’hiver, car ils sont «   hébergés   »  chez des particuliers.

Vélo d’hiver 

La dernière frontière pour la majorité des gens, c’est de pédaler en hiver. Faire le saut constitue, pour la plupart d’entre nous, une énorme barrière psychologique. Ce qui est, avouons-le, inusité pour un peuple nordique. Ailleurs dans le monde, le vélo d’hiver fait partie des mœurs. Ainsi, on peut admirer de nombreuses vidéos sur YouTube montrant des écoliers pédalant nonchalamment en plein hiver vers leur école primaire d’Oulou, en Finlande. Ou des grand-mamans de cette ville qui font leurs courses à vélo, à moins 25 degrés. Oulou est aussi froide et enneigée que Montréal. Ce n’est qu’un endroit parmi d’autres. 

À Montréal, le taux de rétention des cyclistes en hiver (le rapport entre le nombre de cyclistes comptés de décembre à mars et celui de juin à septembre) est passé de 8,4 %  à l’hiver 2016-2017 à 13,6 %  à l’hiver 2020- 2021, selon Vélo Québec. L’organisme estime que 180 000 Québécois pédalent l’hiver. 

La firme Éco-compteur a enregistré 64 000 passages à vélo en janvier 2020 (dernier chiffre disponible) sur les pistes cyclables de Montréal. La firme affiche même sur son site la photo d’un embouteillage cycliste hivernal sur une piste cyclable, un phénomène récurrent. Ils sont donc des milliers de Montréalais qui s’adonnent au vélo d’hiver, dont une bonne part venant d’AhuntsicCartierville. 

Surtout avec le REV et les pistes Prieur et Sauriol. En fait, pédaler en hiver n’est ni dangereux ni compliqué. La chaussée est dégagée et sèche 98 %  du temps (il ne neige en fait que quelques jours par hiver et la neige est rapidement enlevée de la chaussée) et le réseau cyclable est largement déneigé. (Ahuntsic-Cartierville compte 36,8 km de voies cyclables entretenues l’hiver, dont 18 km de pistes protégées). 

Il suffit de savoir comment s’habiller, y aller mollo, par étapes. Vélo Québec offre toute une série de conseils sur son site web (bit.ly/3TIfxDm). L’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville a accordé une aide financière de 22 650 $ à Solon pour son Défi vélo d’hiver. 

En novembre, ce programme a généré plus de 300 inscriptions en quinze minutes et une centaine de participants ont bénéficié d’une aide financière d’environ 200 $ (notamment pour acheter des pneus à crampons). 

L’argent provenait du Programme Climat municipalités du Gouvernement du Québec. Et comme nous ne sommes pas prophètes en notre pays, sachez que les cyclistes montréalais sont considérés comme des durs à cuire, rapportent des organismes de promotion du vélo dans les grandes villes américaines. Nos cyclistes d’hiver peuvent bomber le torse ! 

Stéphane Desjardins

L’article original est accessible ici