Les ONG allemandes Urgewald et FacingFinance, soutenues par l’ENAAT (European Network Against Arms Trade – Bruxelles) ont lancé fin juin de cette année la base de données « ExitArms » qui couvre les années 2015 à  2020. Cette base de données  met en relief que « les producteurs d’armes financés par l’UE exportent vers des pays belligérants », il s’agit là de pas moins de 33 parties. Nombre de despotes et d’autocrates sont les bénéficiaires de ces livraisons mortifères qui leur permettent de commettre d’innombrables violations des droits de l’homme et crimes de guerre.

 

Bruxelles, Berlin | 30 juin 2022
Communiqué : La base de données « ExitArms » démontre que les producteurs d’armes financés
par l’UE exportent vers des belligérants


Les organisations de défense de l’environnement et des droits humains Facing Finance et Urgewald ont
publié cette semaine la base de données « ExitArms » (www.exitarms.org). Il s’agit de la première base de
données publique et mondiale sur les entreprises impliquées dans les exportations d’armes vers des parties
belligérantes. Le lancement est soutenu par ENAAT, le réseau européen contre le commerce des armes.
À ce jour, la base de données recense les années 2015 à 2020. Elle répertorie environ 500 entreprises qui
ont été impliquées dans près de 1 400 exportations d’armes tout au long de la chaîne d’approvisionnement,
soit directement soit par le biais de filiales ou de joint-ventures. Ces exportations ont approvisionné 33
protagonistes impliqués dans 52 guerres, pour la plupart intra-étatique.


Le point de départ de la base de données est le Baromètre des Conflits de Heidelberg permettant de
sélectionner les conflits atteignant un certain niveau d’intensité, ainsi que les acteurs impliqués, d’une part,
et la base de données sur les transferts d’armes du SIPRI indiquant les transferts internationaux des
principales armes conventionnelles, d’autre part. Dans un troisième temps, Facing Finance et Urgewald ont
méticuleusement étudié la « chaîne d’approvisionnement en armes » au niveau de l’entreprise, de la
conception au transport de l’arme ou du système d’armes produit.


L’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte, l’Inde et le Pakistan figurent parmi les belligérants les
plus approvisionnés dans le monde entre 2015 et 2020. Les trois guerres qui ont été le plus alimentées en
armes sont la guerre en Libye, le Yémen et le conflit du Cachemire. Les dix entreprises qui ont fourni le plus
de belligérants au cours de cette période sont : Rostec (21 belligérants), Raytheon et Airbus (14 chacun),
Leonardo (13), Lockheed Martin (12), BAE Systems, et Pratt & Whitney et Boeing (10 chacun), AVIC et
Rolls-Royce (9 chacun).


L’UE ne devrait pas financer les entreprises qui fournissent des armes aux parties belligérantes
Parmi ces dix premiers fournisseurs, Leonardo est le premier bénéficiaire du Fonds européen de défense
(FED), un programme de l’UE dédié à la recherche et au développement d’armement depuis 2017.
L’entreprise a jusqu’à présent reçu au moins 28 millions d’euros provenant de l’argent du contribuable
européen pour développer la prochaine génération d’armement. Airbus est le 5e bénéficiaire du FED avec
des subventions européennes s’élevant jusqu’à présent à au moins 10 millions d’euros.

Parmi les 10 premiers bénéficiaires du Fonds européen de défense pour la période 2017-2020, 8 sont
actuellement enregistrés dans la base de données ExitArms comme fournissant des armes à des parties
belligérantes : Leonardo, Indra, Safran, Thales, Airbus group, Saab, Hensoldt et KMW-Nexter.
Laëtitia Sédou, chargée de projet à ENAAT, alerte : « Pour éviter que les armements financés par l’UE ne
finissent par alimenter les conflits, l’UE devrait appliquer des normes plus strictes lors de la sélection des
projets dans le cadre du Fonds européen de défense, et en particulier ne pas financer les entreprises
d’armement qui ont l’habitude de livrer des équipements militaires aux parties prenantes aux conflits. »

Le secteur financier devrait refuser le ‘greenwashing’ de l’industrie de l’armement
Ces dernières décennies, les banques, les compagnies d’assurance et les fonds de pension ont commencé à
adopter les normes internationales de l’ONU et de l’OCDE, qui prônent le respect des droits humains dans
les pratiques commerciales, entre autres les critères sociaux et éthiques.

« L’industrie de la défense semble considérer que les standards éthiques et sociaux internationaux ne
s’appliquent pas à elle, rappelle Thomas Küchenmeister. Si le secteur de la finance ne veut pas devenir une
simple ‘machine à ‘greenwashing’ et perdre toute crédibilité, il ne doit jamais classer l’industrie de
l’armement comme durable ou sociale. »


« La base de données ExitArms ne montre que la partie émergée de l’iceberg, ajoute Niels Dubrow, expert
en armement chez Urgewald, mais elle prouve empiriquement que l’industrie de l’armement n’a aucun
scrupule et arme systématiquement les parties prenantes aux conflits. Tant que ce sera le cas, les
entreprises trouvées dans la base de données ExitArms devraient être exclues des prêts, assurances,
investissements et mandats de souscription des institutions financières. »


Facing Finance, Urgewald et l’ENAAT critiquent la tendance actuelle des institutions financières individuelles
à assouplir leurs politiques de financement et/ou d’investissement existantes en matière d’exportation
d’armes. Bien que l’invasion russe de l’Ukraine soit maintenant utilisée comme justification, cette tendance
a commencé bien avant la guerre, comme l’illustre le débat houleux sur la taxonomie de l’UE, sous forte
influence du lobby de l’industrie de l’armement.
 

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