Exposition Europalia – Beaux-Arts de Bruxelles. A ses débuts, le train est le symbole ultime de la modernité. C’est un outil majeur de la révolution industrielle. Il porte les espoirs de développement et d’enrichissement les plus fous, mais cristallise aussi les angoisses et le rejet du changement.

Dès les années 1820, apparaissent les premières lignes de chemin de fer en Grande-Bretagne, nées des besoins de l’exploitation minière. La Belgique est la première à emboîter le pas et en 1835, Léopold Ier inaugure une ligne ferroviaire reliant Bruxelles à Malines.

Le train modifie la société en profondeur. Il bouleverse le rapport au temps et à l’espace. Partout il tisse sa toile : au sein des villes, où les gares, ponts de métal ou voies ferrées mordent toujours plus sur le tissu urbain ; mais aussi dans les campagnes où le train fait intrusion, déchirant le paysage. Il devient aussi un outil du tourisme naissant, promu à grand renfort d’affiches et décliné en trois classes, que des dessinateurs, tel Daumier, se régalent à observer.

A la fin du XIXe, les impressionnistes s’emparent de sujets modernes, dont celui du chemin de fer. Nuages de vapeur, mouvement des trains, lumières changeantes de la gare et de ses alentours sont autant d’aspects que Monet, Caillebotte, De Nittis ou Ottmann s’efforcent de restituer. A la même époque, les frères Lumière réalisent L’arrivée d’un train en gare de la Ciotat. Cinéma et photographie feront eux aussi la part belle à l’univers ferroviaire.

C’est également la société moderne— sa vitesse, sa violence et les sensations qu’elle génère – qui intéresse les futuristes comme Severini, Baldessari ou Sant’Elia. Boccioni sera quant à lui l’un des premiers à s’intéresser aux aspects psychologiques du voyage.

Les surréalistes adoptent le point de vue du voyageur : les aspects psychologiques prennent le pas sur l’attrait de la modernité. Freud et ses recherches sur le train et ses effets sur les passagers nourrissent leur travail. Max Ernst s’intéresse au microcosme du compartiment, Blaise Cendrars associe voyage et processus introspectif. De Chirico, Delvaux ou Magritte génèrent des images de réalités alternatives, peuplées de mouvements immobiles, de trains hors du temps, habitant un monde étrange, voire inquiétant.

En janvier 1877, Claude Monet s’installe près de la gare Saint-Lazare. Désireux de s’atteler à un sujet résolument moderne et urbain, le peintre obtient du directeur des Chemins de fer de l’Ouest l’autorisation officielle de dresser son chevalet à l’intérieur de la gare. L’exposition présente quelques-uns de ses tableaux de la gare Saint-Lazare.  Présentés à la troisième exposition des Impressionnistes en 1877, de nombreux critiques reconnaissent sa remarquable capacité à restituer la vie de la gare, ses couleurs et ses bruits.

Voici une exposition qui retrace l’émotion, l’inspiration, la crainte et l’espoir suscités par les trains et les gares.

Photos de Igor Pliner, igor@pliner.be

La gare Saint-Lazare, Monet