Nous, peuples indigènes du bassin amazonien, protégeons l’Amazonie depuis des millénaires grâce à nos connaissances et à notre sagesse ancestrales. Des organisations environnementales et des droits de l’homme ainsi que la communauté scientifique nous ont rejoint dans ce combat.

Aujourd’hui, tous ensemble, nous appelons à conclure un accord mondial pour la protection permanente de 80% de l’Amazonie d’ici à 2025, afin de stopper le point de non-retour et de répondre à la crise planétaire en lançant une grande transformation. Il est temps que la communauté internationale, les gouvernements, la société civile, les sociétés … nous rejoignent pour protéger notre planète.

L’Amazonie est la forêt tropicale la plus étendue et la plus riche en terme de diversité biologique et culturelle au monde. C’est l’habitat de 511 peuples indigènes, dont 66 groupes qui vivent volontairement complètement isolés ou presque. 300 langues sont parlées dans cette vaste région répartie sur 9 pays (Brésil, Bolivie, Pérou, Equateur, Colombie, Venezuela, Guyane, Surinam et Guyane Française).

Ce bassin abrite un tiers des espèces végétales et animales de notre planète, et 20% de l’eau douce du monde. Il est le cœur biologique de notre planète  Il garde de grandes quantités de carbone en stock, régule le climat continental et mondial, produit de l’oxygène et des précipitations, et dirige les systèmes climatiques. Les Territoires Indigènes (IT) qui s’étendent physiquement sur 237 millions d’hectares sur le bassin amazonien, et les Aires Protégées Indigènes et Nationales (APN) sont essentielles pour protéger l’Amazonie.

Ils couvrent environ 50% de cette région. Près de 45% de la forêt amazonienne intacte se trouve sur les territoires indigènes, cela représente une superficie plus grande que la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, l’Italie, la Norvège et l’Espagne réunies (FAO -FILAC 2021, pages 12-13).

L’Amazonie a déjà perdu 17% de sa surface de forêt, et 7% de la forêt tropicale ont été endommagés  (FAO -FILAC 2021, pages 12-13). Les scientifiques ont alerté sur le fait que si l’ensemble de la déforestation et de la dégradation passent au-delà de 20%, le système atteindra un point de basculement irréversible qui pourrait entraîner la mort régressive de l’ensemble de l’écosystème.

Cela entrainerait la libération massive d’émissions de dioxyde de carbone et aurait des conséquences catastrophiques pour l’écosystème et pour la stabilité climatique mondiale. Nous sommes à la veille d’un point de basculement ou d’un point de non-retour. Nos actions dans les prochaines années détermineront le destin de notre planète pour les millénaires à venir. Pour sécuriser l’intégrité des systèmes hydrologiques, de la biodiversité et du rôle fondamental que joue l’Amazonie en tant que régulateur du climat mondial, il faut qu’au moins 80% de ses forêts restent indemnes.

Ceci est un appel en faveur d’un accord mondial pour la protection permanente de ces 80% de la forêt amazonienne d’ici à 2025, accepté par tous les gouvernements d’Amazonie, approuvé par les populations, les peuples indigènes et la communauté internationale.

Le Pacte pour l’Amazonie exige :

  1. Une vision régionale pan-amazonienne qui débouche sur un plan stratégique commun basé sur les lignes directrices strictes du Consensus Amazonien.
  2. Suivant les directives strictes du Consentement Libre, Préalable et Eclairé (CLPE) : pour atteindre 80% de protection d’ici à 2025, chaque pays amazonien doit développer des Plans d’Action Nationaux pour le Biome Amazonien et détailler leurs engagements pour atteindre l’objectif de 80% d’ici à 2025
  3. Ce processus doit intégrer la participation de la société civile dans sa globalité, incluant les sociétés civiles indigènes, les peuples indigènes qui ont été les gardiens de ce biome tout au long des millénaires écoulés.
  4. 100% des terres indigènes légalement reconnues et délimitées, et l’allocation de ressources financières permanentes pour permettre leur titrage et leur expansion.
  5. La mise en place d’un modèle de gouvernance accompagné d’une représentation politique et de la reconnaissance du rôle des peuples autochtones dans la réalisation de cet objectif aux niveaux national et international.
  6. Un moratoire immédiat sur la déforestation et la dégradation industrielle de toutes les forêts primaires.
  7. La définition d’une politique forestière et de zonage qui permette la création de zones non accessibles sur les zones restées intactes – pas de route ni autre zone exclusive aux activités industrielles.
  8. La restauration des terres endommagées.
  9. La création de réserves indigènes ou d’aires cogérées, protégées et élargies pour les communautés indigènes et locales qui ne sont pas actuellement répertoriées comme IT ou APN et autres territoires (OECM). L’état doit garantir et être responsable d’assurer la protection des peuples indigènes volontairement complètement isolés ou presque.
  10. Mettre fin aux principaux moteurs de la déforestation actuelle et future et aux pressions de développement industriel en suspendant l’octroi de nouvelles licences et le financement des activités minières, pétrolières, de l’élevage du bétail, des grands barrages, de l’exploitation forestière et toute autre activité industrielle.
  11. L’annulation de la dette conditionnée à un moratoire permanent sur l’extraction industrielle dans les territoires indigènes et les zones protégées.
  12. L’engagement du secteur financier à respecter les droits des peuples autochtones et à mettre fin à la déforestation dans toutes les chaînes d’approvisionnement qu’il finance.
  13. La transparence et responsabilité du secteur financier et des chaînes de valeur.
  14. La communauté internationale doit adopter des politiques et des programmes cadres immédiats afin de garantir le flux continu de ressources pour atteindre cet objectif.
  15. La communauté internationale doit mobiliser les ressources financières nécessaires pour couvrir les frais d’accès aux services de base des communautés autochtones, consolider leur autodétermination et renforcer la gestion intégrée des territoires, les moyens de subsistance durables et l’utilisation des connaissances ancestrales.

Nous appelons les pays d’Amazonie à déclarer l’état d’urgence et à arrêter immédiatement l’expansion des activités industrielles dans le bassin amazonien. Il faut mettre fin immédiatement à l’expansion d’activités industrielles destructrices, aux politiques gouvernementales et aux subventions publiques toxiques qui permettent de continuer à détruire les forêts.

L’état d’urgence devrait permettre de s’attaquer aux origines de la déforestation, et en même temps, de laisser de la place à la conception et à la mise en œuvre de stratégies visant à des changements et des transformations durables.

Les pays industrialisés doivent reconnaitre leur responsabilité dans le changement climatique et comprendre le rôle déterminant de l’Amazonie dans la régulation des changements climatiques. Ils doivent fournir toutes les ressources nécessaires pour assurer une transition juste pour ceux d’entre nous qui vivons dans le biome et pour leurs propres citoyens.

Il est grand temps d’agir !

Les peuples indigènes des neuf pays amazoniens invitent les gouvernements, les scientifiques, les villes, les institutions financières et tous les secteurs de la communauté mondiale qui souhaitent agir pour la planète à prendre des actions pour la planète, à nous rejoindre et à soutenir cette initiative. Signer cette déclaration est une première étape pour éviter d’atteindre le point de non-retour en Amazonie et protéger 80% des forêts d’ici à 2025.

Voici la Coordinadora de Organizaciones Indígenas de la Cuenca Amazónica – COICA et ses organisations membres dans les 9 pays, qui agissent au nom des nations indigènes et des populations d’Amazonie :

AIDESEP, Asociación Interétnica de Desarrollo de la Selva Peruana – Association Interethnique pour le Développement de la Forêt Tropicale Péruvienne
APA, Association of Amerindian Peoples of Guyana – Association des Peuples Amérindiens de Guyane
CIDOB Orgánica, Confederación de Pueblos Indígenas del Oriente Boliviano  – Confédération des Peuples Indigènes de Bolivie
COIAB, Coordinadora de las Organizaciones Indígenas de la Amazonía Brasileña – Coordination des Organisations Indigènes de l’Amazonie Brésilienne
CONFENIAE, Confederation of Indigenous Nationalities of the Ecuadorian Amazon – Confédération des Nationalités Autochtones de l’Amazonie Equatorienne
OPIAC, National Organisation of Indigenous Peoples of the Colombian Amazon – Organisation Nationale des Peuples Indigènes de l’Amazonie Colombienne
ORPIA, Regional Organisation of Indigenous Peoples of the Amazon (Venezuela) – Organisation Régionale des Peuples Indigènes de l’Amazonie Vénézuélienne
OIS, Indigenous Organisations of Suriname – Organisation Autochtone du Surinam

FOAG, Federation of Indigenous Organisations of French Guiana – Fédération des Organisation Autochtones de Guyane Française

Par solidarité avec les nations indigènes et les populations d’Amazonie, le Comité Exécutif de l’initiative « Amazonie pour la Vie » : protéger 80% d’ici 2025 : Stand.earth, Amazon Watch, AVAAZ, Wild Heritage, RAISG, One Earth, Artists for the Amazon, and Noo World. COICA, Coordinadora de las Organizaciones Indígenas de la Cuenca Amazónica (Organisme de Coordination des Organisations Indigènes du bassin amazonien)

Pour ajouter votre organisation à l’initiative, il suffit de cliquer sur ce lien et de compléter les informations requises :

Traduction de l’anglais, Frédérique Drouet