Le vendredi 31 janvier le Conseil constitutionnel français a confirmé la légalité d’une interdiction d’exportation des pesticides dont l’utilisation est interdite dans l’UE.

Le Conseil constitutionnel a ainsi rejeté le procès intenté par BAYER, SYNGENTA et d’autres fabricants regroupés au sein de l’association professionnelle UIPP [N.d.E. production de pesticides] contre la loi sur l’agriculture et l’alimentation (Egalim). Les entreprises avaient fait appel parce qu’elles considéraient que la liberté d’entreprendre garantie par la Constitution était limitée par l’interdiction d’exportation qui entrera en vigueur à partir de 2022. Cependant, le Conseil constitutionnel a examiné les droits de liberté d’entreprendre par rapport aux droits à la protection de la santé et à préserver un environnement intact, garantis par la Constitution, puis il a déclaré légal l’application de la loi sur l’agriculture et l’alimentation (Egalim).

Alors que BAYER a immédiatement évoqué les conséquences dévastatrices pour ses affaires en France et a menacé d’émigrer, les experts en droit de l’environnement et les militants ont salué cette décision. L’avocat Sébastien Mabile l’a même qualifiée d’ « historique ».

La Coordination contre les méfaits de Bayer CBG (en allemand Coordination gegen BAYER-Gefahren/CBG), a longtemps critiqué la pratique des doubles standards dans la commercialisation des pesticides et considère que la décision du juge n’est que cohérente. [N.d.E. La CBG rend compte des problèmes et des dangers engendrés par la multinationale de l’industrie chimique et pharmaceutique].

« Il est de pratique courante chez BAYER de revendre des produits avec des toxines à d’autres pays qui ne sont pas encore prêts pour cela [N.d.E. décalage entre le vote des lois et l’application], après une interdiction dans ce pays. Cela montre que les entreprises sont totalement indifférentes à la vie et à la santé des gens. La seule chose qui compte, ce sont les profits. Maintenant, l’Allemagne doit suivre le mouvement ! Ici aussi, il faut clairement interdire aux empoisonneurs de BAYER d’exporter leurs poisons agricoles, qui ne sont plus commercialisables au sein de l’UE, vers l’Afrique, l’Asie, l’Amérique du Nord et du Sud ou ailleurs », a déclaré Marius Stelzmann, directeur général de CBG.

Rien qu’au Brésil, la multinationale, basée à Leverkusen, propose douze substances qui sont interdites dans l’Union européenne en raison de leur potentiel dangereux : carbendazime, cyclanilide, éthiprole, éthoxysulfuron, fenamidone, indaziflam, ioxynil, oxadiazon, propineb, thidiazuron, thiodicarbe et thirame. Pour justifier cette pratique, BAYER explique succinctement : « Il existe différentes conditions sociales, économiques ou même climatiques dans le monde. Par conséquent, les cadres juridiques diffèrent également de temps en temps. »

En fait, le géant de l’agro-alimentaire devrait faire le contraire et distribuer des substances moins dangereuses au lieu de substances plus dangereuses dans les pays du Sud. Le taux d’analphabétisme étant élevé dans ces zones de vente, beaucoup ne peuvent pas lire les avertissements sur les emballages agrochimiques. De plus, de nombreux agriculteurs ne disposent pas de vêtements de protection appropriés. Il n’est donc pas surprenant que la plupart des empoisonnements se produisent dans les pays en voie de développement et émergents.

Lors de l’assemblée générale annuelle de BAYER en avril 2019, Alan Tygel, membre de la CAMPAGNE PERMANENTE CONTRE LES POISONS AGRICOLES ET POUR LA VIE, de Rio de Janeiro, a cité les chiffres du Brésil : 2.185 décès entre 2007 et 2017 : « Pour vous, Européens, le carbendazime est interdit, et les trois autres substances mentionnées ont des limites qui sont 1.200 fois plus basses qu’au Brésil. Nos corps brésiliens sont-ils plus résistants aux toxines agricoles que les corps des Européens ? », a-t-il demandé au Conseil d’administration et aux actionnaires.

À propos de l’auteur :

« La coordination contre les méfaits de BAYER (CBG) est unique au monde. Elle contrôle l’une des sociétés les plus puissantes depuis plus de 30 ans et se bat pour la protection de l’environnement et la sécurité de l’emploi, avec des recherches persistantes, des actions de protestation et des apparitions à l’assemblée générale du groupe et avec la participation des écologistes et les personnes affectées dans plus de 40 pays. Car une entreprise comme BAYER pose de nombreux problèmes chez nous et dans les pays du sud : empoisonnement aux pesticides, déchets toxiques, produits pharmaceutiques dangereux, conséquences génétiques, accidents. Les autorités et les gouvernements détournent souvent le regard ou s’inclinent devant les pressions des lobbyistes. Cela rend le travail de coordination d’autant plus important. Les blessés doivent être aidés afin qu’ils puissent se défendre. (Extrait de la présentation du CBG – Coordination contre BAYER-Hazards eV) 

Site Web:  www.cbgnetwork.org

 

Traduction, Maryam Domun Sooltangos

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