Des millions de femmes se sont unies, main dans la main, le long de la côte de l’État indien du Kerala : c’était le 1er janvier 2019. Un très long cordon que la presse a appelé « mur des femmes » a parcouru 620 kilomètres le long de la côte indienne du Kerala, rapporte le Times of India : « […] des millions d’Indiennes se sont serré la main sur les 620 kilomètres de côtes du Kerala : du nord au sud pour former un « mur des femmes » contre les conservateurs religieux qui se sont opposés à la décision [historique] de la Cour suprême autorisant les femmes ayant leurs règles à entrer dans le temple de Sabarimala. »

Antécédents

Une « première fois historique » : Bindu Ammini (42) et Kanaka Durga (44) ont franchi le seuil de l’un des temples hindous les plus sacrés, le temple de Sabarimala. Elles ont été les premières à franchir le pas historique après « qu’en septembre, la Cour suprême avait levé l’interdiction d’entrée pour les femmes « en âge d’avoir leurs règles », entre 10 et 50 ans, car elles étaient considérées comme impures. »

Quand Ammini et Durga quittèrent le temple, les gardiens effectuèrent les rites de « purification » pour « décontaminer » la place : dans la société indienne, patriarcale, classiste et conservatrice, en effet, les femmes, ayant leurs règles, sont encore considérées « impures ». Cependant, la protestation s’est répandue dans toute la région : le gouvernement du Kerala, dirigé par le Parti communiste (marxiste) de l’Inde (Pci(m)), a soutenu le droit à la liberté religieuse des femmes : « Nous avons donné un ordre permanent à la police de fournir toute la protection possible à toute femme qui veut entrer au temple, » a déclaré Pinarayi Vijayan gouverneur. Le PCI, contestant ouvertement la décision des gardiens et du gouvernement central de Modi de prendre le parti des « purificateurs » au nom de la tradition, a appelé à une mobilisation expliquant les raisons du non-sens du geste des gardiens.

Suite à la mobilisation, Pinarayi Vijayan a demandé le renvoi des gardiens du temple qui ont offensé et piétiné la dignité des femmes et qui ont  » retiré le jugement de la Cour suprême. ».

Traduction : La décision du tantri [N.d.T.  prêtre védique des temples hindous du Kerala.] de fermer le temple de Sabarimala pour purification après l’entrée de deux femmes dans le sanctuaire est une violation du verdict de la Cour suprême. Une action pour outrage au tribunal devrait être intentée contre lui.

Protestation non-violente

La chaîne humaine a été promue par le PCI et soutenue par 176 organisations dont le nombre réel n’est pas encore connu, bien que les organisateurs aient parlé de plus de 5 millions de personnes présentes. Bien que la presse ne soit pas bienveillante envers la gauche et les communistes, le journal Times of India, après la mobilisation massive, a rapporté : « Le nombre de femmes qui sont descendues dans la rue à l`initiative du gouvernement et du parti communiste (marxiste), représente la conscience élargie des femmes et la force des aspirations en matière de parité, au Kerala et en Inde. Les sommets régionaux et nationaux du PIC ont exprimé leur grande satisfaction :  » Le bureau politique adresse ses vœux et ses félicitations aux femmes du Kerala et aux 176 organisations sociales et de masse pour le « mur des femmes » historique du 1er janvier. La participation de plus de 55 lakhs [environ 5,5 millions] de femmes, la participation interclasses de différentes castes/communautés et de tous les secteurs sociaux, a donné un message fort d’unité pour soutenir les valeurs de la renaissance du Kerala, les droits des femmes et les réformes sociales. Au moment où les forces de droite dirigées par RSS et le gouvernement de Modi tentent d’imposer des idéologies rétrogrades dans tout le pays, ce mur de femmes a une signification plus large et encouragera une résistance accrue.