José Manzaneda, coordinateur de Cubainformación : Cuba est un pays de culture qui produit de nombreux artistes (1). Des professionnels de la musique (2) ou de la danse (3) qui résident sur l’île ont pu obtenir une reconnaissance et une promotion à l’international, sans aucune condition politique. Ce n’est pas le cas de la littérature.

Ceux qui ont réussi à publier dans des maisons d’édition étrangères sont en majorité ceux qui centrent leur œuvre littéraire et ses déclarations publiques sur la critique du gouvernement et du système politique de l’île.

Telle que fut à son heure de gloire l’écrivaine Zoé Valdés (4), ce sont aujourd’hui des auteurs comme Iván de la Nuez (5) ou Vladimir Hernández (6), dont les œuvres ont pour thématique centrale la condamnation et la satanisation de la Révolution cubaine, qui sont les favoris des grandes maisons d’édition. Ils ont droit également à une large diffusion de leurs livres au moyen d’interviews (7) (8) et de revues de presse dans les journaux principaux de référence, la plupart appartenant aux propres groupes éditoriaux. Rafael Rojas, un autre auteur aux positions similaires, a droit à une colonne quotidienne dans des journaux importants comme El Pais (9). Amir Valle dirige même une séquence à la télévision publique allemande Deutsche Welle (10).

Et ils ne sont pas uniquement soutenus par les médias corporatifs. La nouvelle presse digitale supposée « progressiste », eldiario.es, par exemple, est également un espace de promotion pour les romanciers qui, tels que Carlos Manuel Álvarez (11) ou Wendy Guerra (12), orientent systématiquement leur création littéraire sur la condamnation du gouvernement de l’île.

Il se passe la même chose avec les livres au sujet de Cuba qui sont écrits par des journalistes d’autres nationalités. Uniquement ceux qui décrivent l’île comme une société en décomposition ou la Révolution comme un processus néfaste ont les portes ouvertes des grandes maisons d’édition et accès à une diffusion médiatique importante (13). C’est le cas des livres de l’argentine Gabriela Esquivada (14), du chilien Patricio Fernández (15) ou de l’espagnol Vicente Botín (16). A contrario, n’importe quel livre allant dans le sens contraire sera condamné aux circuits marginaux d’impression, de distribution ou de diffusion alternative (17). Sans interviews, sans articles ni revues de presse.

C’est la même censure éditoriale et médiatique à l’international que connaissent des centaines d’écrivains et d’écrivaines de Cuba, résidant à l’intérieur ou à l’extérieur du pays, dont leur pêché est de faire de la littérature plutôt que de la politique (18). Comme dans n’importe quelle partie du monde, l’immense majorité des romans écrits dans l’île raconte des histoires, il ne s’agit pas d’une littérature d’ordre politique. Pour autant, ce n’est pas pour cela qu’ils cessent de traiter durement la société de leur pays et les problèmes de leur temps (19).

Nous pouvons apprécier le point de vue idéologique de la presse dans les rubriques nécrologiques, par exemple. Concernant la mort de Daniel Chavarría (20) cette année, auteur d’un roman noir qui, bien que né en Uruguay, vécu à Cuba et s’est toujours présenté comme écrivain cubain, nous constatons qu’il y a eu quelques brèves revues de presse centrées sur son œuvre, sans la moindre référence à son militantisme communiste (21). La presse, espagnole par exemple, a traité de la même manière la disparition du narrateur cubain Miguel Mejides (22), dont l’implication dans la politique culturelle du pays ou à l’Union des Ecrivains et Artistes de Cuba n’ont pas été des éléments diffusés (23). A contrario, concernant la mort du poète Rafael Acidas, nous avons pu lire, plus que sur son œuvre, sur les désaccords politiques avec le gouvernement cubain et sa caractérisation comme « écrivain dissident » (24) (25).

Cuba est un pays de culture, d’art et de littérature, mais le Big Brother éditorial et médiatique qui contrôle et décide de ses publications et diffusions est déterminé à ne sélectionner que les auteurs qui sont fonctionnels à son idéologie et ses intérêts (26).

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Traduction de l’espagnol, Romane Vilain.

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