À disposition de toutes personnes voulant s’en inspirer pour agir dans le monde.

« Il semble clair que personne ne pourra orienter raisonnablement les processus d’un monde qui se dissout. Cette dissolution est tragique, mais elle jette aussi la lumière sur la naissance d’une nouvelle civilisation, la civilisation mondiale » (Silo, Lettres à mes amis, no. 10)

Préambule

À la suite des échecs des politiques de gauche mises en œuvre dans certains pays d’Amérique latine (Argentine, Brésil, Venezuela…) ; à la suite de l’échec de Syriza en Grèce qui a laissé un sentiment de trahison chez les gens de gauche qui cherchent des alternatives (Plan B, Diem 25…) pour sortir du diktat du système néolibéral ; nous reconnaissant dans les propos de certains représentants de partis quant à la nécessité de (re)créer un « récit » qui donnerait direction et cohésion à des programmes politiques, le Parti Humaniste souhaite, avec ce document, faire un apport tant dans la construction de ce récit collectif et des nouvelles valeurs qui le sous-tendent que dans sa déclinaison en propositions politiques.

En effet, nous pensons que les projets politiques :

1/ ne peuvent plus se résumer en un série de réformes, qui apparaissent comme des réponses ponctuelles et pragmatiques à des situations économiques et sociales cruelles, violentes et déshumanisantes, fruit d’un système mondial agonisant ;

2/ que ces projets doivent s’ancrer dans une vision partagée du futur ;

3/ que cette vision doit prendre appui sur de nouveaux paradigmes : de nouvelles croyances et de nouvelles valeurs qui ne soient pas des slogans sinon un véritable style de vie.

Ce document vise donc à préciser les fondements ainsi qu’à donner une direction et un horizon plus vaste à toutes les alternatives économiques, sociales et politiques que l’on voit à l’œuvre : initiatives citoyennes ou propositions de gauche, qui cherchent un nouveau chemin révolutionnaire, se rendant compte que les méthodes d’analyse et les formes de lutte classiques ne permettent plus de trouver de nouvelles réponses.

Quel serait cet horizon ?

La globalisation du système actuel a pris une direction déshumanisante, amplifiant la souffrance des peuples : aucun être humain ne pourra y échapper. Si un train court vers un précipice, changer de place dans le wagon ne sert que très provisoirement : il faut changer radicalement l’orientation du train.

La Nation Humaine Universelle : un récit commun fondé sur une mystique sociale ancrée dans le cœur des gens ?

Et quelle pourrait-être cette nouvelle orientation ?

Non pas celle que prennent les nationalistes et fondamentalistes de tout style qui ne sont d’ailleurs que l’expression d’un « sauve-qui-peut » fondé sur les valeurs de ce système déshumanisant (repli sur soi, individualisme, compétition entre les peuples ou exploitation, par exemple…). A l’inverse, cette nouvelle orientation doit être l’image de la Nation Humaine Universelle, enracinée comme une aspiration commune dans le cœur de tous les êtres humains. Cette Nation Humaine Universelle serait l’expression de la première civilisation planétaire que l’être humain connaîtra. Elle serait fondée sur les valeurs qui ont caractérisé toutes les périodes humanistes que l’histoire a connues, à savoir :

  1. L’être humain comme valeur et préoccupation centrales (et non Dieu, l’Etat, l’argent, etc.) ;
  2. L’égalité de tous les êtres humains
  3. La reconnaissance et la valorisation des diversités personnelles et culturelles
  4. Le développement de la connaissance au-delà de ce qui est accepté comme vérité absolue
  5. L’affirmation de la liberté d’idées et de croyances
  6. Le rejet de toute forme de violence (économique, religieuse, sexuelle, psychologique, raciale, physique)

Cette image d’une Nation Humaine Universelle ne surgira d’aucun leader sinon du cœur de l’humanité. Elle se manifestera depuis une mystique sociale avec de nouvelles valeurs morales et de nouveaux paradigmes. Elle devra non seulement être l’utopie lumineuse qui oriente les luttes des peuples, mais aussi fonder une conception stratégique à partir de laquelle faire surgir des actions tactiques dont l’action politique, objet de ce document. Cette Nation Humaine Universelle – qui peut ne sembler qu’une simple expression de désirs pour les vieilles générations (Grève générale) – apparaît déjà pour les nouvelles générations comme un horizon visible depuis une nouvelle sensibilité (Rêve général). Celle-ci tourne le dos – autant que faire ce peut – au matérialisme et individualisme ambiants ; elle cherche à promouvoir de nouvelles valeurs dans des actes et non simplement dans des slogans ; elle exprime finalement cette nouvelle mystique sociale qui se fonde sur un nouveau choix encore mal affirmé : celui de la nonviolence.

L’affirmation de la non violence : un préalable à toute révolution sociale, économique et politique

Il est important de rappeler que la perspective d’une Nation Humaine Universelle fondée sur la nonviolence risque de se heurter à la vision « zoologique » prédominante que l’on a de l’être humain : un être humain qui serait violent par nature ; le naturel étant associé à l’immuable, la violence devient par conséquent inéluctable.

Il est certes difficile d’échapper à cette affirmation au regard des diverses barbaries perpétuées au cours de l’histoire humaine. Et les situations de violence actuelles – largement relayées par les médias – entretiennent cette vision, enfermant un autre futur possible.

En outre, cette vision a installé la lutte pour la survie comme unique moteur de toute activité humaine : lutte entre individu, lutte entre classe, lutte clanique, lutte communautariste, rendant difficilement appréhendable toute autre perspective de lutte. Pourtant, à bien considérer les phénomènes, l’être humain n’a véritablement de « naturel » que son intention et sa liberté qui lui permettent d’affirmer ou de nier les situations qui lui sont données de vivre. Loin d’être figé, c’est un être historique et social (fruit d’un processus historique et social) dont le mode d’action est précisément de modifier, de transformer les situations qui lui sont données de vivre ; et notamment, les situations qui génèrent douleur et souffrance (que celles-ci résultent de faits naturels ou de faits sociaux).

« Naturellement intentionnel », l’être humain peut donc faire le choix de la nonviolence personnelle et sociale pour sortir de ces situations violentes et souffrantes.

L’histoire présente de nombreuses expériences en ce sens avec très récemment Gandhi, Martin Luther King ou Mandela, devenus des références dans le cœur de tous les êtres humains.

Actuellement, cette intention vers la nonviolence n’est plus simplement l’apanage de ces hommes d’exception ; on la sent présente partout dans le monde, ce qui est un moment historique très favorable.

Elle s’est manifestée dans les propos de ceux qui – bien que meurtris dans leur chair par les récents attentats – n’ont pas crié vengeance, sinon clamé un message de paix, conscient que la violence des réponses ne ferait qu’alimenter la violence.

Elle s’exprime (ou cherche à s’exprimer) dans les différents mouvements qui émergent partout dans le monde depuis quelques années déjà : 15M, Indignés, Occupied Wall Street et maintenant Nuit Debout. Elle se traduit par de l’écoute, une tentative de s’organiser sans leader et de manière décentralisée, le non-jugement et par des initiatives collectives de non collaboration, de Désobéissance civile, d’altruisme, de solidarité.

Parce qu’elle correspond à une quête profonde de l’humanité, la nonviolence doit être le fondement de toute révolution sociale, économique et politique vers la construction de cette Nation Humaine Universelle.

Un projet politique non-violent en direction de la Nation Humaine Universelle

Un projet politique non-violent se caractérise par la mise en œuvre de mesures favorisant le bien être de l’être humain tout en visant à transformer les conditions qui génèrent de la violence (guerre, système économique fondé sur la compétitivité, démocratie formelle). Ces propositions, perfectibles dans leur étendue et dans leur profondeur, représentent quelques exemples de ce que l’on pourrait faire. Elles constituent des jalons dans la direction de cette Nation Humaine Universelle. Ces propositions pourront être reçues de différentes façons selon leur possibilité d’action par ceux qui – aspirant à ce nouvel horizon – sont d’accord avec elles. Pour certains, cela pourra signifier des idéaux à atteindre, en les considérant comme guide à l’heure d’élire leurs gouvernants. Pour d’autres, cela signifiera des images mobilisatrices à partir desquelles s’organiser pour exiger des gouvernements qu’ils s’occupent de les mettre en place. D’autres verront comme meilleure l’option de participer politiquement et d’avoir de telles propositions dans leurs programmes électoraux. Et ceux qui, aujourd’hui, ont un espace de pouvoir, politique ou économique et aspirent véritablement à un monde meilleur, pourront-ils peut-être essayer d’en appliquer déjà quelques-unes.

Une réelle démocratie

Le pouvoir démocratique a été accaparé par une oligarchie par ailleurs soumise aux intérêts de la finance, rendant la démocratie représentative totalement formelle. Différentes mesures peuvent déjà être prises pour redonner sens à cette démocratie :

  • Une loi de responsabilité politique obligeant les élus à respecter leurs promesses, leur programme et les idées qu’ils avancent ;
  • La prise en compte du vote blanc ;
  • Une révision des conditions de présentation des candidats aux diverses élections dont le droit de vote et d’être élu(e) pour tous les étrangers résidant en France ;
  • La réelle séparation des pouvoirs ;
  • L’utilisation de référendums à différentes échelles.

Par ailleurs, la véritable démocratie est celle qui permet aux citoyens d’exercer vraiment le pouvoir en prenant des décisions. La construction de cette réelle démocratie résultera d’un processus dans lequel la décentralisation des décisions sera nécessaire ainsi qu’une redéfinition du rôle de l’Etat. Elle devra s’enraciner dans les quartiers à travers des initiatives populaires, le rôle des élus étant alors de mettre en œuvre les décisions collectivement construites. Cette organisation à la base sera ultérieurement le fondement pour des décisions à des échelles territoriales plus amples.

Économie

Il convient de remettre l’économie à sa Juste place : au service des êtres humains. La résolution des nécessités de tous les habitants du monde doit être la direction d’un projet politique dans le domaine économique.

Nous n’avons pas besoin de beaucoup d’arguments pour affirmer que le monde dispose de conditions technologiques suffisantes pour répondre à ces nécessités de base partout dans le monde : l’alimentation, la salubrité, la santé, le logement, l’éducation et la culture. Si rien n’est fait dans ce sens, c’est tout simplement que la spéculation monstrueuse du grand capital l’en empêche. Outre la nécessité de redéfinir les différents accords et traités imposés par les diverses institutions (Commission Européenne, FMI, Banque Mondiale, OCDE, OMC…), quelques décisions peuvent être prises pour une économie non-violente :

  • Création de Banque sans intérêt à différentes échelles ;
  • Loi participative des travailleurs qui met dans un rapport d’équité et de coopération les détenteurs du capital et les salariés ;
  • Le Revenu d’existence universel rendu possible par l’avancée technologique, et qui permettra de dissocier la notion d’activité de celle de revenu pour vivre ;
  • Toute autre initiative locale (monnaie, coopérative d’achat, initiative en matière d’énergie…) ; Dans cette économie, le rôle de l’Etat est celui d’informateur et de coordinateur : informer sur les nécessités dans tel ou tel domaine et coordonner les actions à mettre en œuvre.

Relations internationales

Les relations internationales doivent s’orienter impérativement vers une politique de paix. Elle passe par :

  • La sortie de l’OTAN ;
  • Le retrait immédiat des troupes françaises des territoires étrangers (Mali, Côte d’Ivoire, etc.) ;
  • Le désarmement nucléaire ;
  • Le désarmement progressif et proportionnel de l’armement conventionnel ;
  • L’arrêt des ventes d’armes et la reconversion de la technologie permettant leur fabrication ;
  • L’inscription, dans la constitution, au renoncement à utiliser la guerre comme moyen de résoudre les conflits.

Santé, éducation et environnement

La santé, l’éducation et l’environnement ne peuvent pas être des négoces. Ce sont des droits inaliénables pour chaque être humain, impliquant la gratuité, la qualité et la diversité.

  • En matière d’éducation, favoriser l’émergence de nouvelles propositions éducatives qui tendent à transformer les vieux systèmes, dépassés aujourd’hui, et qui intègrent les aspects intellectuels, émotionnels et spirituels des enfants ;
  • En matière de santé, favoriser l’émergence d’une « nouvelle médecine » qui intègre les progrès scientifiques et les connaissances des médecines dites « alternatives », généralement liées à des cultures millénaires.

Prendre soin de l’environnement est une nécessité vitale pour l’humanité. Des mesures réelles doivent être prises :

  • Substituer les combustibles fossiles par des sources d’énergie renouvelables sans recourir au nucléaire ;
  • Favoriser la production d’énergie renouvelable localement ;
  • Reconnaître l’eau comme bien public non privatisable ;
  • Encourager l’agriculture biologique et réglementer l’emploi des biotechnologies (OGM)…