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Vingt-sept journalistes, employés et techniciens de la chaîne TV Pública ont été empêchés de pénétrer dans les locaux de la chaîne, le 4 septembre 2012 à Asunción, au motif qu’ils ne “pouvaient pas continuer” à exercer leurs fonctions. Si certains avaient eu vent, le 31 août dernier, d’un nouveau train de départs forcés, aucun n’a reçu d’avis préalable à son licenciement. La plupart avaient manifesté leur opposition au coup de force parlementaire contre Fernando Lugo, le 22 juin dernier, lors de l’émission “Micrófono Abierto” (“micro ouvert”) diffusée le soir même et cible, depuis lors, de suspensions régulières.

Une première purge au sein des médias publics créés durant le mandat de Fernando Lugo – TV Pública, Radio Nacional et l’agence d’informations IPParaguay – avait déjà eu lieu trois semaines après le coup de force. Nous ne pouvons pas croire, au vu du cette méthode du fait accompli, aux arguments administratifs avancés par le Secrétariat à l’Information et à la Communication pour le Développement (Sicom). Au mépris des règles élémentaires du droit du travail, ce renvoi de 27 journalistes ne fait hélas que prolonger la chasse aux sorcières amorcée après la destitution présidentielle du 22 juin. Il s’agit d’une atteinte grave au pluralisme, dont le seul effet sera d’accentuer les divisions au sein d’un pays meurtri et isolé. Nous sommes prêts à soutenir les journalistes victimes de cette purge dans leurs futures démarches en justice”, a déclaré Reporters sans frontières.

D’après Martín Sannemann, actuel ministre de l’Information et de la Communication, ce train de licenciements est dû à l’expiration, le 31 août, d’un contrat passé entre TV Pública et l’Organisation des États ibéroaméricains pour l’éducation, la science et la culture (OEI), offrant les ressources nécessaires au versement des salaires. “Un faux prétexte”, selon ces derniers, qui rappellent que TV Pública avait d’abord conclu un accord avec le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), complété par un autre avec l’OEI pour une période de trois à quatre mois. Les mêmes précisent que l’ancienne administration avait obtenu un budget de 10 milliards de guaranis (environ 2 millions d’euros), largement suffisant pour maintenir les salariés dans leurs fonctions. Leur colère est d’autant plus vive que Martín Sannemann avait d’abord promis, lors d’une réunion tenue le 15 août dernier, qu’il n’y aurait pas de licenciements, mais seulement du retard dans le versement des mensualités.

“Beaucoup ont appris leur départ cette matinée de mardi au moment d’arriver au travail. Le gardien avait sur lui la liste des personnes à qui il devait interdire l’entrée”, a confié Jazmín Acuña, ancienne chargée de projet de TV Pública, elle-même renvoyée. “Cette liste noire est une claire persécution idéologique contre des professionnels de la communication recrutés sous le gouvernement de Fernando Lugo. Elle fait partie des actions arbitraires contre la liberté d’expression de la part du régime putschiste de Federico Franco”, a dénoncé le journaliste et réalisateur Manuel Cuenca, lui aussi licencié.

Outre Jazmín Acuña et Manuel Cuenca, les employés concernés se nomment : Diego Verón, Joaquin Serrano, Ricardo Quintana, Cristina Martinez, Patricia Armoa, Deisy Diaz Ruiz, Maricarmen Sequera, Mario Saldivar, Aleydis Franco, Hugo Isasi, Sergio Cáceres, René Pérez, Ingrid Groos, Emiliano Miranda, Héctor Ledesma, Rubén Romero, Edgar Pérez, Carlos Vera, David Mac Cruz, René Santacruz, Esteban Ortega, Sady Barrios, Germán Solís, Diego Segovia et Federico Velázquez.

Les indices d’inquiétude en matière de liberté d’information s’accumulent au Paraguay depuis le 22 juin. Le pays pâtit également de situations d’impunité persistantes, comme dans le cas de l’assassinat, le 3 mars 2011, de Merardo Alejandro Romero Chávez, directeur de programme pour la radio communautaire La Voz de Ytakyry, assassinat dont les commanditaires présumés bénéficient d’une scandaleuse mansuétude judiciaire.