Après deux jours passés à Genève pour un congrès proposé par son organisation, Rajacopal parcourt le monde, sensibilisant Ongs, monde politique et civil sur la situation dramatique des « sans terre » en Inde mais aussi de par le monde. Son analyse lucide et son action déterminée forcent l’admiration et le respect. Le 2 octobre prochain, anniversaire de la mort de Gandhi, une marche débutera en Inde, pour une année de revendications au droit à la terre pour les plus pauvres. Un combat démonstratif, digne, qui sert déjà d’inspiration aux paysans de France, d’Afrique et d’Amérique latine.

Nous avons rencontré ce monsieur à l’attitude aussi cohérente que le discours. L’échange fut de grande qualité, autour de trois questions.

Pressenza est une agence de presse virtuelle, internationale, pour la non-violence et la paix. Rajagopal, vous vous revendiquez “non-violent”.
Qu’est-ce que la violence pour vous ? et la non-violence ?

Face à la situation actuelle, quelle alternative avons-nous ?
1. Le silence
2. La violence.
Celui qui utilise son cerveau, sa réflexion, se rend compte que ce ne sont pas des solutions. Que le silence est en fait une façon de laisser faire la violence.
Donc, tu dois agir, mais comment ? Par la non-violence. C’est la seule alternative.
On comprend que la violence est directe – on la voit, comme la guerre en Irak, en Afghanistan – et indirecte : la pauvreté, le manque de nourriture, la corruption…. Comprendre que la violence n’est pas uniquement physique aide à réagir correctement. Face à la corruption, à l’exploitation humaine, tu es en colère. La révolte est une vertu mais peut conduire à la violence. Après la colère, je décide en toute conscience d’être non-violent.
La stratégie et les outils ne sont pas les mêmes face à la violence directe ou indirecte.

La non-violence, c’est aussi un changement de mentalité. Comment voyez-vous d’opérer cette transformation humaine plus profonde ?

Le modèle éducatif d’aujourd’hui n’aide pas. Il promeut l’arrogance à celui qui a un diplôme, le discrédit sur celui qui n’en a pas. Il ne nous rend pas humble, poli. Il nous fait regarder l’autre comme un stupide. En Inde, les femmes sont regardées comme des êtres inférieurs. L’éducation manque dans ce sens et c’est suivant ce modèle qu’on prend les terres aux paysans, moins éduqués.
La question est : comment utiliser l’éducation non plus pour exploiter l’autre ? Comment passer d’une éducation de marché vers une éducation humaine ? Cette “attitude” doit être ce nouveau modèle d’éducation.

Souvent, nos discussions sont externes. Mais il y a aussi un voyage intérieur. Je regarde mon attitude et je la transforme. Le voyage intérieur est important. L’éducation actuelle ne nous apprend pas à aller à l’intérieur.

Dans la situation d’aujourd’hui, j’amène ce changement par le dialogue. Au lieu d’être “meilleur”, je cherche à être une “meilleure personne” et à inviter l’autre à faire de même. Cela, tu peux le faire quand tu es crédible. Donc, la préoccupation est d’être de plus en plus crédible pour pouvoir conseiller d’autres et ainsi, avancer.

La pression peut aussi faire changer l’attitude : si 200 personnes se mettent devant toi, tu es bien obligé de changer d’attitude ! Mais c’est provisoire.

Lors des ateliers de la non-violence proposés aux jeunes, il y a de nombreux mécanismes et activités dans ce sens. Un exemple : le soir, nous prenons des textes et des chansons de différentes religions et nous les chantons tous, expérimentant ainsi la convergence de l’esprit religieux, peu importe ta caste ou ta croyance.

Auriez-vous une phrase, un conseil, une recommandation à l’attention de nos lecteurs ?

« The speed of violence is growing because non-violence is too slow. People who believe in Non-violence must go quicker, use non-violence to solve problems, take more responsabilities ; Come together, take your responsabilities. »
(La vitesse de la violence s’accélère parce que la non-violence est trop lente. Ceux qui croient dans la non-violence doivent agir plus vite, utiliser la non-violence pour résoudre les problèmes, prendre plus de responsabilités.
Rassemblons-nous, prends tes responsabilités.)

Pour plus d’information, pour accompagner les marches soit physiquement, soit financièrement, contactez l’association : http://www.ektaparishad.com/ , également représentée en Belgique et en Suisse, entre autres.