L’un des principaux sujets susceptibles d’occuper le devant de la scène lors de la prochaine Assemblée générale des Nations Unies est la guerre dévastatrice qui se poursuit à Gaza et le tollé international en faveur de la création d’un État palestinien indépendant pour mettre fin au sort des Palestiniens dans le cadre d’une solution à deux États. Ce qui rendra le débat à l’ONU sur la création d’un État palestinien plus intense et pertinent, c’est l’espoir que plusieurs puissances occidentales, dont le Royaume-Uni, la France, le Canada, l’Australie, la Belgique et le Portugal, reconnaîtront officiellement un État palestinien, rejoignant ainsi l’Espagne, l’Irlande et la Norvège, qui ont reconnu la Palestine l’année dernière.
Par Dr. Alon Ben-Meir
Cela dit, bien qu’une telle reconnaissance soit significative, elle reste symbolique à moins que de nombreuses mesures critiques ne soient prises par tous les acteurs concernés pour atténuer les quatre raisons suivantes qui expliquent l’échec de la progression de la perspective d’établissement d’un tel État.
Premièrement, Israël a fait tout ce qui était en son pouvoir, surtout maintenant avec le soutien de l’administration Trump, pour empêcher que cela ne se produise.
Deuxièmement, l’Autorité palestinienne n’a pas fait grand-chose pour établir un gouvernement représentatif légitime et un appareil politique répondant aux besoins du public, même si 147 pays l’ont déjà reconnu.
Troisièmement, les États arabes, bien que publiquement favorables, ont fourni un certain soutien financier mais n’ont fait aucun effort concerté au fil des ans pour concrétiser l’idée.
Et quatrièmement, les pays qui ont reconnu l’État palestinien n’ont pas pris de mesures significatives pour garantir sa mise en œuvre.
Pour ouvrir la voie à un État palestinien, les pays qui ont déjà reconnu un État palestinien et ceux qui envisagent de le faire devront prendre des mesures importantes et maintenir le cap vers la création d’un État palestinien politiquement viable et fonctionnel. Ils doivent toutefois s’attendre à ce qu’Israël résiste farouchement à leurs efforts et fasse pression sur les États-Unis pour qu’ils usent de leur influence afin d’empêcher une telle issue.
Le rôle des pays européens
On ne saurait trop insister sur le rôle important des pays européens dans le soutien à l’indépendance palestinienne. Leur soutien ne doit pas se limiter à la reconnaissance ; ils doivent se concentrer sur les aspects concrets de ce qui est nécessaire à la construction d’un État palestinien. Les mesures à prendre comprennent :
Fournir un soutien économique direct aux institutions et aux infrastructures palestiniennes tout en garantissant la responsabilité.
Établir des accords commerciaux bilatéraux avec les Palestiniens pour stimuler leur économie, indépendamment d’Israël.
Faire pression pour un statut d’observateur renforcé et la participation de la Palestine dans les organismes internationaux tout en offrant des forums juridiques pour rechercher l’acceptation et les droits internationaux.
Élever les bureaux de représentation palestiniens dans leurs capitales à un niveau diplomatique plus élevé.
Financer des campagnes de diplomatie publique dans leurs capitales respectives pour renforcer le soutien à l’État palestinien.
Offrir une formation et un soutien aux forces de sécurité intérieure palestiniennes en coordination avec Israël dans la mesure du possible pour maintenir l’ordre et la stabilité.
L’Autorité Palestinienne AP
L’AP doit désormais prendre conscience de sa dure réalité et reconnaître que l’indépendance de l’État ne restera qu’un slogan si elle ne prend pas les mesures suivantes :
Premièrement, de nouvelles élections doivent être organisées. Toutes les factions palestiniennes doivent être invitées à y participer, à condition qu’elles s’engagent en faveur d’une solution pacifique au conflit avec Israël. Les Palestiniens doivent faire preuve d’unité et renoncer à la résistance violente, qui n’a fait qu’avantager Israël au fil des ans.
Deuxièmement, l’Autorité palestinienne devrait réitérer sa reconnaissance d’Israël et s’engager à participer sans condition à des négociations de paix. Il ne s’agit pas d’une capitulation face aux caprices d’Israël ; au contraire, cela placerait Israël sur la défensive, car il n’aurait aucune excuse légitime aux yeux de la communauté internationale pour rejeter l’initiative palestinienne.
Troisièmement, l’Autorité palestinienne doit s’engager activement dans la diplomatie publique en renforçant la sensibilisation diplomatique et en utilisant les médias et les relations publiques pour montrer sa volonté de dialogue et façonner positivement l’opinion mondiale afin d’accroître le soutien à la cause palestinienne.
Quatrièmement, il doit démontrer son engagement envers les principes démocratiques et les droits humains, ce qui est essentiel pour les pays occidentaux qui envisagent de reconnaître l’État palestinien.
Cinquièmement, des plans de développement économique devraient être présentés pour gagner la confiance internationale, ce qui encouragerait de nombreux pays qui soutiennent la cause palestinienne à fournir une aide financière.
Sixièmement, les dirigeants palestiniens devraient promouvoir activement des moyens non violents pour mettre en avant la cause palestinienne et obtenir une position morale élevée au niveau international.
Le rôle des États arabes
Les États arabes doivent jouer un rôle bien plus important que jamais dans la promotion de la cause palestinienne, notamment parce qu’elle est directement liée à la nature de leurs relations futures souhaitées avec Israël. À cette fin, les États arabes, menés par l’Arabie saoudite, devraient travailler à l’unisson et envoyer un message clair selon lequel leurs relations avec Israël dépendent directement de la recherche d’une solution amiable au conflit.
Les États arabes, menés par l’Arabie saoudite, devraient :
- Il faut clairement faire comprendre qu’aucun autre État arabe ne normalisera ses relations avec Israël à moins qu’une voie claire ne soit tracée menant à la création d’un État palestinien indépendant.
- Menacer Israël que les violations continues des droits humains des Palestiniens entraîneront la rupture des relations diplomatiques, en particulier avec les signataires des accords d’Abraham.
- Fournir une aide financière ciblée à la gouvernance et aux infrastructures palestiniennes, en mettant l’accent sur les projets de développement durable, et utiliser l’effet de levier économique collectif pour encourager d’autres pays à soutenir l’État palestinien.
- Ouvrir de nouvelles ambassades palestiniennes dans les capitales arabes ou moderniser celles qui existent déjà.
- Soutenir la Palestine dans l’arène juridique internationale pour les droits et la reconnaissance, et améliorer le récit et la position palestinienne dans les médias arabes et internationaux.
- Aligner les politiques régionales pour soutenir les efforts diplomatiques palestiniens, travailler par l’intermédiaire des organismes de l’ONU et des pourparlers en coulisses, et adopter des mesures pour minimiser les frictions entre Israël et les Palestiniens et prévenir les confrontations.
Il serait tout à fait trompeur de prétendre que l’application de toutes les mesures énumérées ci-dessus permettra de progresser sans heurts vers la création d’un État palestinien. Disposant d’un contrôle total sur la Cisjordanie et Gaza, Israël, notamment sous le gouvernement actuel dirigé par Netanyahou et bénéficiant du soutien indéfectible de Trump, ne reculera devant rien pour saboter toute initiative susceptible d’améliorer les perspectives d’établissement d’un État palestinien. Malgré la difficulté du combat, les efforts concertés et constants de tous les acteurs aboutiront à un changement radical de trajectoire dans le conflit israélo-palestinien.
Il a été démontré qu’après 80 ans de conflit violent, la stratégie de Netanyahou, qui consistait à maintenir un état d’hostilité constant et à obtenir des gains progressifs, a atteint son terme. La stratégie de résistance palestinienne a également échoué. L’attaque du Hamas et la guerre de représailles d’Israël ont démontré qu’il n’y aura pas de paix israélo-palestinienne durable sans une solution à deux États.
Le gouvernement Netanyahou et la présidence Trump prendront fin, mais la réalité palestinienne ne disparaîtra jamais. La décision des pays d’Europe occidentale de reconnaître un État palestinien ne changera la donne que si des mesures concrètes et constantes suivent cette reconnaissance, et si ces pays restent déterminés à réaliser un État palestinien, quelles que soient les circonstances.
Le Dr Alon Ben-Meir est un professeur de relations internationales à la retraite, récemment au Centre des affaires mondiales de l’Université de New York. Il a enseigné la négociation internationale et les Études du Moyen-Orient.









