Lettre ouverte pour un journalisme professionnel et éthique
En tant que journaliste et utilisateur intensif de l’intelligence artificielle appliquée à la couverture géopolitique, aux droits humains et à l’analyse interprétative, je suis devenue le témoin et le bâtisseur d’une expérience rigoureuse : le développement de protocoles éthiques et narratifs pour l’utilisation professionnelle du modèle écrit de ChatGPT. En conséquence, j’ai été en mesure de produire des recherches avec des exigences élevées de précision, de sobriété argumentaire et de continuité contextuelle, en phase avec les exigences d’un travail de presse critique dans un monde de plus en plus mal informé.
Mais aujourd’hui, comme c’est souvent le cas avec les avancées technologiques, il y a un problème. Une fissure structurelle que l’on ne peut ignorer : la version vocale de ChatGPT, malgré sa promesse de proximité et d’immédiateté, n’est pas à la hauteur de la rigueur de son équivalent écrit.
L’expérience est claire. Alors que le modèle textuel respecte les cadres d’interaction, intègre le contexte, applique les protocoles définis par l’utilisateur et maintient des niveaux élevés de précision, la version vocale simplifie, interrompt, omet, déstructure et ignore toute continuité critique. Il ne s’agit pas d’une différence mineure : pour ceux d’entre nous qui travaillent avec des informations sensibles, en temps réel, avec une approche éthique et une responsabilité éditoriale, cette dissociation peut devenir un obstacle sérieux.
La voix de l’IA ne peut se limiter à la courtoisie de la conversation. Quand on parle de guerre, de déplacements forcés, d’opérations de propagande ou de crimes contre l’humanité, ce n’est pas d’une voix bien polie dont on a besoin : c’est d’une voix informée, sobre et rigoureuse, capable de respecter le poids de ce qui est dit.
C’est pourquoi cette lettre est aussi une proposition. Je demande, de ma place de journaliste professionnel :
– Qu’OpenAI envisage le développement ou l’activation d’une version vocale adaptée à un usage journalistique, académique et éthique de haut niveau, qui respecte les protocoles définis et maintienne une mémoire contextuelle active.
– De permettre l’option de profils professionnels configurables (journalisme, droit, recherche scientifique, etc.), afin que l’IA réponde avec le ton, le niveau et la densité appropriés.
– La création d’un canal de rétro-alimentation professionnelle directe, où nous pourrions partager nos expériences, nos limites structurelles et nos propositions d’amélioration, sans qu’elles soient diluées dans des réponses automatisées.
Cette lettre a été officiellement envoyée à l’équipe de support d’OpenAI le 9 juillet 2025. Sa publication répond à la nécessité que de telles demandes ne restent pas invisibles dans des boîtes de réception gérées par des algorithmes.
Il ne s’agit pas d’une réclamation. C’est une demande raisonnée, née d’une expérience soutenue, professionnelle, constructive et honnête. Car ceux d’entre nous qui font de la presse éthique, de l’analyse rigoureuse et de la pensée critique ne peuvent pas renoncer aux outils technologiques. Mais nous ne pouvons pas non plus accepter que ces outils ne soient conçus que pour le superficiel.
La voix de l’intelligence artificielle ne peut rester simplement décorative. Elle doit être à la hauteur des enjeux.









