La flottille mondiale Sumud, une mission de sensibilisation. Et le témoignage de Greta Thunberg a mis Israël au pied du mur.

Les informations faisant état des mauvais traitements subis par Greta Thunberg et d’autres membres de la flottille Global Sumud ont suscité un vif débat international. Suite aux dénonciations de la militante suédoise et aux témoignages de plusieurs journalistes et compagnons de voyage, Israël a démenti catégoriquement ces témoignages, les qualifiant de « mensonges flagrants ».
Cette version contraste fortement avec les témoignages de première main de journalistes, de parlementaires et de membres de la mission humanitaire de retour en Europe.

La militante écologiste Greta Thunberg a déclaré aux autorités suédoises avoir subi des « traitements cruels » lors de sa détention en Israël après avoir été arrêtée et débarquée d’un des navires de la flottille Global Sumud, comme l’a rapporté le Guardian. Dans un courriel envoyé par le ministère suédois des Affaires étrangères à des proches de Greta Thunberg, selon le journal britannique qui a pris connaissance du message, un responsable ayant rendu visite à la militante en prison a déclaré qu’elle était « détenue dans une cellule infestée d’insectes, avec trop peu de nourriture et d’eau ».

« L’ambassade a pu rencontrer Greta », peut-on lire dans le courriel. « Elle a signalé une déshydratation. Elle n’a pas reçu suffisamment d’eau et de nourriture. Elle a également déclaré avoir développé des éruptions cutanées qu’elle soupçonne d’être causées par des punaises de lit. Elle a parlé de traitements cruels et a déclaré avoir dû rester assise pendant de longues périodes sur des surfaces dures. » Le représentant du ministère suédois ajoute : « Une autre détenue aurait déclaré à une autre ambassade l’avoir vue [à Greta Thunberg, ndlr] forcée de tenir des drapeaux pendant qu’on la prenait en photo. Elle se demandait si des images d’elle avaient été diffusées. » La jeune militante, connue pour ses positions pacifistes et écologistes, a ouvertement dénoncé des conditions de détention « humiliantes » et « inhumaines ».

Le journaliste Lorenzo D’Agostino a rapporté que Greta avait été « enveloppée dans un drapeau israélien et exposée comme un trophée ». Ce geste symbolique de moquerie a suscité l’indignation dans le monde entier.
Alessandro Mantovani, journaliste à Il Fatto Quotidiano, rentré en Italie avec d’autres militants, a confirmé le climat d’oppression. « C’était pire pour Greta que pour nous tous », a-t-il déclaré. Il a ajouté qu’il avait « les yeux bandés, les poignets liés par des serre-câbles, contraint de rester des heures sur l’asphalte de la jetée sous le soleil, sans eau ni possibilité de parler à un avocat ».

« Ils nous ont traités comme des animaux »

Paolo Romano, conseiller régional de Lombardie pour le Parti démocrate, a également déclaré avoir été « traité comme des animaux ». « Ils nous ont mis à genoux, face contre terre. Si nous bougions, ils nous frappaient. Ils se moquaient de nous, nous insultaient et nous battaient », a-t-il témoigné. « C’étaient des violences physiques et psychologiques. »

Israël nie tout en bloc dans une publication (sur X, le ministère israélien des Affaires étrangères a déclaré que « tous les droits légaux des détenus ont été pleinement respectés », arguant que « Greta elle-même et d’autres ont refusé d’accélérer leur expulsion et ont insisté pour que leur détention soit prolongée ». Selon le gouvernement de Tel-Aviv, « la militante n’a déposé aucune plainte officielle auprès des autorités israéliennes, car les allégations de mauvais traitements sont totalement infondées »). Mais les propos des militants dressent un tableau bien différent : une gestion répressive et punitive d’une action humanitaire née pour la paix.

Un coup porté à l’image d’Israël

Le cas de Greta Thunberg, qui a toujours soutenu la cause palestinienne et dénoncé les ravages environnementaux causés par le conflit, porte un coup dur à l’image d’Israël dans le monde. La jeune militante, qui a embarqué sur la Flottille pour documenter la mission et témoigner des souffrances à Gaza, est devenue, sans le vouloir, un symbole de l’arbitraire et de la violence qui entourent encore la question palestinienne.

Ses propos ont réveillé l’opinion publique mondiale, mettant Israël au pied du mur face à une évidence morale : la persécution de ceux qui luttent pacifiquement pour les droits humains.

Un réveil collectif

La flottille mondiale Sumud – le terme sumud en arabe signifie « résistance ferme et digne » – avait quitté des ports européens dans le but de briser le blocus naval israélien et d’acheminer de l’aide humanitaire à Gaza.

Durant la traversée, les navires ont été attaqués au large de la Crète par des drones et des dispositifs acoustiques ; l’un d’eux, le Marinette, a ensuite été intercepté à environ 70 milles nautiques des côtes. Tous les militants ont été arrêtés et transférés au port israélien d’Ashdod, où ils ont été détenus et interrogés pendant plusieurs jours.

Leur libération et leur retour en Italie représentent non seulement une victoire diplomatique, mais surtout une victoire morale et politique : un signe que la solidarité internationale ne peut être arrêtée par la force.

Un pays qui s’éveille

L’accueil à l’aéroport de Fiumicino n’était pas seulement une cérémonie d’affection : c’était le symbole d’une Italie qui se réveillait, retrouvant sa voix et sa conscience collectives après des mois de mobilisations massives pour la paix et la Palestine.

Dans les rues, dans les universités, dans les ports, dans les usines, un sentiment commun grandit : celui de ceux qui refusent d’être complices des guerres ni de se taire face à l’injustice.

La nuit romaine qui a accueilli le retour des « compagnons de la Flottille » a le parfum de longues pages de solidarité populaire. Plus qu’un simple « bienvenue », c’est un message clair adressé au monde : la paix et la justice sont inébranlables, même en pleine mer.

Réactions internationales : Amnesty, l’ONU et un appel à la justice

Face aux témoignages de mauvais traitements et de tortures psychologiques et physiques – notamment ceux partagés par Greta Thunberg, des journalistes, des militants et des députés –, des organisations de défense des droits humains comme Amnesty International ont fermement condamné l’interception de la flottille mondiale Sumud. Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty, a qualifié d’« illégale » l’interception de la flottille mondiale Sumud, affirmant qu’il s’agissait d’une attaque délibérée contre des citoyens en mission pacifique, engagés dans une action humanitaire. Selon Amnesty, Israël continue de violer le droit international, ignorant ses obligations légales de protéger les civils sous occupation et de garantir l’accès à l’aide essentielle.

Les Nations Unies et plusieurs gouvernements étrangers ont également exprimé leur inquiétude : le principe de protection des droits des détenus, les normes du droit international humanitaire et l’interdiction de la détention arbitraire et des mauvais traitements ont été invoqués avec force. Les organismes internationaux ont appelé à garantir le droit à l’assistance juridique, à mener des enquêtes impartiales et transparentes, et à ce que la détention soit respectueuse de la dignité humaine.

C’est le dernier élément qui donne corps aux plaintes des militants : il ne s’agit pas de paroles isolées, mais de demandes fondées sur des normes et des traités internationaux, soutenues par des réseaux mondiaux qui veillent au respect des droits humains.

Le retour des militants italiens de la Flottille Globale Sumud ne représente donc pas une fin, mais un nouveau départ. Leur voyage vers Gaza, interrompu par l’arrogance des armes, a déjà atteint son objectif : raviver la conscience collective, briser le mur du silence et apporter un message d’humanité là où il est en train de disparaître.

Aujourd’hui plus que jamais, nous devons continuer à briser le silence, par la musique, par les mots, par la rue, par chaque geste de fraternité. Car chaque acte de solidarité, même le plus petit, est un pilier de la paix.

 

Chanson et vidéo : Break the Silence. De Laura Tussi et Fabrizio Cracolici

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