Est-ce les guerres et les génocides qui dominent nos vies, ou est-ce notre conscience nihiliste qui les engendre ? Comment avons-nous pu perdre la capacité d’éprouver de la gratitude pour le processus humain des cinq derniers millénaires ?

Au cours du siècle dernier seulement, le développement humain a été exponentiel. Médecine, communication, transports, production alimentaire, énergie, logement : chaque aspect de la vie a été transformé d’une manière que nos ancêtres n’auraient jamais pu imaginer. Pourtant, dans les pays les plus riches, le suicide et la dépression explosent. Que nous manque-t-il ?

Nous avons peut-être l’impression que seule la survie peut donner du sens, comme s’il fallait tout détruire avant de renouer avec notre moi le plus élémentaire. Mais c’est un faux retour. La véritable connexion naît lorsque nous nous reconnaissons comme partie intégrante d’une continuité plus vaste : le prolongement de nos parents et de leurs parents avant eux, les héritiers d’innombrables générations qui ont bâti et lutté pour que nous puissions vivre à ce niveau de connaissance, d’interconnexion et de possibilités.

Être reconnaissant n’est pas un geste sentimental. C’est une reconnaissance de responsabilité. La gratitude nous place dans le processus humain : conscients de ce que nous avons reçu, prêts à aller de l’avant. Sans elle, nous sombrons dans la plainte et le désespoir. Grâce à elle, nous acquérons la force d’affronter ce qui n’est pas résolu et la clarté nécessaire pour décider de ce qui doit être traité en priorité.

Imaginez si les nations incarnaient cet esprit. Si Israël, au lieu de vivre dans une insécurité permanente, pouvait se réjouir de l’opportunité offerte par la communauté internationale et agir comme un État parmi ses voisins. Si l’Ukraine, historiquement située entre l’Europe et la Russie, pouvait considérer sa place comme un pont plutôt qu’un champ de bataille. Si les États-Unis reconnaissaient que leur prospérité n’était pas un accident, mais le fruit de migrations mondiales, de recherches partagées et d’efforts humains collectifs, et réagissaient en partageant connaissances et ressources au lieu de les accaparer. Ce n’est pas un hasard si le siège des Nations Unies a été établi à New York : une ville construite par le monde, abritant une institution destinée au monde. Ce choix illustre en lui-même l’interdépendance et la contribution de l’humanité. Si les entreprises, reconnaissantes de leur place dans la société, veillaient à ce que les bénéfices et les innovations profitent à tous plutôt qu’à quelques-uns.

Il n’y a pas de sentiment plus valorisant que de reconnaître la contribution des autres à sa propre vie. Vivre dans la gratitude, c’est être prédisposé à aimer la réalité que nous construisons ensemble et à ressentir le devoir de la transmettre, élargie et digne, à ceux qui suivront.