Comme les anciens l’ont dit il y a plusieurs centaines d’années : Sursum corda ! (1)(2)

Cette expression latine signifie « élevons les cœurs ». C’est l’attitude à recommander dans les temps actuels, des temps étonnamment semblables à ceux du célèbre film de science-fiction «le jour où la Terre s’arrêta » (3). Aujourd’hui, l’arrêt n’est pas dû à des extra-terrestres mais à un virulent petit virus.

Il y a encore quelques semaines, l’arrêt de la planète tel que nous sommes en train de le vivre était impensable, inimaginable, impossible. L’économie décidait de tout et pour tous. Mais pour la première fois dans l’histoire humaine, près de la moitié des habitants de la Terre allaient, ensemble, agir pour s’immobiliser. C’est ainsi que nous sommes restés chez nous, à penser à nous-même, à nos proches, à la solitude, à la mort, à l’existence et au sens de notre vie vécue et aussi à vivre.

Depuis le confinement, si je suis bloqué à mon domicile et que je ne peux pas travailler, ce qui dicte ma conduite ou ce qui me valorise change. Je cherche alors qui pourra confirmer mon existence. Je me tourne vers les autres, à travers les médias sociaux, à travers les écrans. Et je m’interroge :

  • « Pourquoi je vis ? »,
  • « On peut vivre sans travailler ?  »,
  • « Qu’allons-nous faire après ? »,
  • « Qu’allons-nous devenir ? »,
  • « Et si mes proches devaient mourir loin de moi, sans moi ? »,
  • « Et la spiritualité ? »,

Et pendant toutes ces heures chez moi, je prends conscience que :

  • « Nos proches sont infiniment précieux et importants »,
  • « J’ai peur de mourir »,
  • « Mon enfant est heureux parce que, même enfermé(e), je suis présent avec lui/elle »,
  • « Les personnes les plus essentielles à la vie d’une société sont aussi les plus humbles »,
  • en somme, « j’existe parce que tu existes » !

Nos certitudes ont été battues en brèche et la peur de ne pas suivre les modèles reconnus dans la société s’est effacée face à la peur d’un virus véloce et violent. Mon regard sur les autres a changé l’espace d’un moment : j’ai pu voir autre chose que des fonctions ou des objets qui seraient essentiellement à mon service. C’est l’humain que j’ai vu. « J’ai vu l’humain en toi ! ». J’ai ressenti tes peurs, j’ai admiré ton courage et même parfois l’abnégation  avec laquelle tu as affronté des situations qui pouvaient te mettre en danger de mort. J’ai vu et j’invite à regarder comment certaines personnes se sont mises à aider les autres, spontanément, sans attendre de retour, sans chercher autre chose qu’être utile « aux autres ». Agissant, simplement, « pour les autres », pour la vie des autres, pour la vie.

Pour  l’après le confinement, chacun a ses idées, ses désirs, ses inquiétudes. N’oublions pas les « belles expériences avec l’humain » que nous venons de vivre. Profitons de cette époque étonnante pour « battre le fer tant qu’il est chaud » et, de tout notre être, lançons les images les plus brillantes dont nous soyons capables pour notre futur. Oui, profitons du confinement et de l’après-confinement pour élever nos cœurs vers cette société de justice et d’équité à laquelle nous aspirons.

Je sais, ce n’est pas facile.  Et ce n’est pas mécanique. Cela part d’un geste émotif qui déborde d’enthousiasme, comme au moment où tu prends dans tes bras ton bébé qui vient de naitre, et qu’avec tout ton cœur tu lui cries « Merci, merci d’être venu à nous, dans ce temps et cet espace ! ».

Ces instants où l’on reconnait l’Humain en l’autre et en soi sont très beaux, précieux et puissants !

Je crois que s’efforcer de voir l’humain dans « l’autre » peut provoquer un phénomène nouveau, une puissante réaction en chaîne qui, action après action, renforce la compréhension réciproque et génère l’enthousiasme nécessaire au changement.

« …Et pour avoir de l’enthousiasme, il faut avoir une direction dans la vie. Ce qui vous enthousiasme vous propulse dans une direction, quelque chose vous dépasse dans la situation que vous vivez, vous élève vers le haut… » (1).

A toi qui me lis, SURDUM CORDA !

Charles

 

Notes

(1) Extraits de la discussion de membres d’une communauté du Message avec Silo à Peñalolén (Chili) le 11 juin 2005.

(2) Sursum corda est une expression latine prononcée dans la plupart des célébrations liturgiques des Églises chrétiennes. Elle est prononcée par le prêtre et signifie « Élevons notre cœur ».

(3)  Film : Le jour où la terre s’arrêta.

En 1951, Robert Wise imagine le premier film de science-fiction mettant en scène un Alien non belliqueux.

L’histoire : Lors d’une journée d’été ordinaire en pleine guerre froide, une soucoupe volante traverse les cieux américains et se pose à Washington. La population, prise de panique, ne sait pas comment réagir face à cet évènement. Témoin de la vie terrienne, Klaatu l’extraterrestre, porte un message d’amour. Mais devant l’incompréhension des terriens, pendant quelques heures, il immobilise toutes les activités, en provoquant une panne générale électrique partout sur Terre, stupéfiant ainsi tous les habitants et les amenant à prendre conscience qu’ils existent. Que chacun compte et que le futur dépend de chacun.

Le message du film : Nous ne sommes pas omnipuissants comme on se plait à le croire et la Vie et notre futur valent plus que tous les systèmes politico-économiques.

L’article original est accessible ici