L’Ambassade Humaniste a organisé, le samedi 26 avril 2025 à Malaga, en Espagne, une conférence placée sous le thème : « Diplomatie parallèle et le défi de défendre les causes justes ».
Voici une synthèse des interventions :
1- Le contexte mondial actuel, marqué par une instabilité croissante
Dans son allocution inaugurale, Maître Lalla Saïda YASSIN, avocate et présidente de séance, a ouvert les travaux de la conférence en exposant les motivations profondes qui ont conduit à l’organisation de cette rencontre internationale. Elle a souligné d’emblée que le contexte mondial actuel, marqué par une instabilité croissante et des redéfinitions d’alliances stratégiques, exige une lecture nouvelle et audacieuse des dynamiques diplomatiques contemporaines.
Selon elle, la diplomatie ne peut plus être perçue comme un champ réservé aux seuls États et aux canaux officiels, mais doit aujourd’hui intégrer des approches innovantes, inclusives et transversales, prenant en compte les acteurs émergents que sont les ONG, les diasporas, les intellectuels, les artistes, les jeunes et les mouvements citoyens. Elle a insisté sur le fait que les bouleversements géopolitiques actuels – qu’il s’agisse des conflits armés, des tensions identitaires, des crises migratoires, des rivalités énergétiques ou des mutations technologiques – ne se limitent plus aux sphères politiques ou économiques, mais s’infiltrent profondément dans les structures sociales, les mentalités collectives et les équilibres culturels et régionaux.
Dans cette perspective, Maître YASSIN a plaidé pour une relecture humaniste de la diplomatie, fondée sur les valeurs de paix, de justice, de respect des diversités et de coresponsabilité mondiale. Elle a mis en garde contre les dangers d’une diplomatie figée, coupée des réalités humaines, incapable de répondre aux aspirations profondes des peuples à plus de dignité, de sécurité et de reconnaissance mutuelle.
C’est dans cet esprit qu’elle a souligné la portée stratégique de l’organisation de ce colloque en Espagne, un pays à la croisée de plusieurs mondes culturels, historiques et géopolitiques, et espace de dialogue privilégié entre l’Europe, l’Afrique du Nord et l’Amérique latine. Elle a indiqué que le choix de ce lieu n’est pas fortuit, mais reflète une volonté délibérée de rapprocher les points de vue, d’ouvrir des passerelles de coopération et de favoriser un dialogue franc, apaisé et constructif autour des grands enjeux du moment.
Enfin, elle a exprimé le vœu que cette conférence serve de laboratoire d’idées et de plateforme d’initiatives concrètes, contribuant à redéfinir les contours d’une diplomatie plurielle, sensible aux réalités du terrain, et capable de porter avec force et légitimité les grandes causes justes, à commencer par celle du Sahara marocain, mais également toutes les causes humaines universelles.
2- Adaptation du concept de Diplomatie Humaniste
Dans son allocution, le Coordinateur Général de l’Ambassade Humaniste, M. Mohamed EL KODADI, a livré une réflexion lucide et prospective sur les mutations profondes que traverse le monde contemporain. Selon lui, l’humanité est engagée dans une nouvelle phase historique, marquée par l’effacement progressif des frontières traditionnelles et l’émergence d’une interdépendance humaine, sociale, culturelle et environnementale de plus en plus manifeste. À l’heure où les crises géopolitiques, les défis climatiques, les tensions identitaires et les fractures sociales s’accentuent, il devient urgent – voire vital – de repenser les cadres d’action diplomatique à la lumière d’un socle de valeurs partagées, fondées sur l’humanisme, la solidarité, la justice et le respect mutuel.
EL KODADI a ainsi souligné la nécessité de construire un nouveau système de référence éthique et relationnel, capable de rapprocher les civilisations, de désamorcer les conflits et de promouvoir une paix fondée sur la dignité humaine, la coopération interculturelle et le dialogue permanent. Dans cette optique, il a mis en avant le rôle central de la diplomatie parallèle, qu’il définit comme une diplomatie d’initiative, de proximité et d’innovation, enracinée dans la société civile, dans l’intelligence collective et dans les dynamiques citoyennes transnationales.
À travers ses multiples canaux de communication – médiatiques, associatifs, artistiques, académiques ou numériques – et grâce à ses actions de terrain menées aux quatre coins du globe, cette forme de diplomatie s’illustre par sa capacité à porter la voix des peuples, à défendre les causes justes souvent marginalisées sur la scène officielle, et à déconstruire les discours biaisés ou hostiles.
Il a notamment mis l’accent sur la question du Sahara marocain, rappelant qu’elle constitue l’un des terrains privilégiés d’intervention de la diplomatie parallèle. Cette dernière œuvre activement à sensibiliser l’opinion internationale aux réalités historiques, politiques et sociales de cette cause nationale, et à déconstruire les narratifs instrumentalisés par certains États ou groupes d’intérêts dans le but de nuire à la souveraineté du Royaume.
Mais au-delà du Sahara, M. EL KODADI a élargi sa perspective à l’ensemble des causes nationales et internationales justes, affirmant que la diplomatie parallèle a vocation à défendre tous les peuples privés de reconnaissance, les territoires ignorés, les cultures menacées ou les voix muselées, avec une énergie militante et une approche éthique profondément enracinée dans l’humanisme universel.
Par la richesse de ses formes d’expression – qu’il s’agisse de conférences, de mobilisations internationales, de production de savoirs, de campagnes de sensibilisation ou de coopérations interculturelles –, cette diplomatie constitue, selon lui, un levier organisationnel stratégique, capable d’apporter des angles de vue complémentaires à ceux de la diplomatie institutionnelle. Là où cette dernière peut parfois être contrainte par des considérations politiques, protocolaires ou économiques, la diplomatie parallèle agit avec souplesse, proximité et réactivité, souvent là où l’action étatique atteint ses limites.
En conclusion, M. EL KODADI a plaidé pour une synergie active et intelligente entre la diplomatie officielle et la diplomatie parallèle, affirmant que c’est dans cette complémentarité assumée, équilibrée et respectueuse que réside l’avenir d’une action diplomatique capable de répondre aux défis complexes de notre temps et de faire émerger un ordre international plus juste, plus humain et plus durable.
3- Évolution de la diplomatie parallèle au Maroc
Parmi les interventions marquantes de cette conférence, celle du journaliste et analyste politique Dr HAYOUN Abdelaziz s’est distinguée par sa profondeur historique et sa portée analytique. Dans son intervention, il a proposé un éclairage rétrospectif sur l’évolution de la diplomatie parallèle au Maroc, en retraçant ses origines, ses moments clés et sa maturation progressive.
Dr HAYOUN a mis en évidence une période charnière dans l’histoire politique récente du Royaume : la fin des années 1970 et le début des années 1980, une époque marquée par de profonds bouleversements régionaux et mondiaux, mais aussi par une effervescence intellectuelle et militante sur la scène nationale. Il a souligné que c’est au cœur de ce contexte historique que s’est levé un acteur nouveau et déterminant dans le champ diplomatique : la jeunesse marocaine, portée par la vitalité de ses mouvements étudiants, syndicaux et associatifs.
Cette jeunesse, animée par un profond attachement aux causes nationales – au premier rang desquelles figure la question du Sahara marocain – s’est engagée avec conviction dans des initiatives spontanées, audacieuses et souvent novatrices, visant à porter la voix du Maroc au-delà des frontières institutionnelles traditionnelles. Cette diplomatie alternative, fondée sur l’engagement, la solidarité et la mobilisation des diasporas, a permis de faire entendre des récits autres, de déconstruire des discours hostiles et de tisser des alliances naturelles avec les peuples du monde.
Au fil des décennies, a-t-il poursuivi, cette diplomatie citoyenne s’est structurée, professionnalisée et consolidée, passant d’un mouvement spontané à une force agissante dotée de réseaux, de relais et d’une légitimité grandissante. Aujourd’hui, cette diplomatie parallèle ne se contente plus d’accompagner l’action extérieure du Royaume : elle en devient un complément stratégique, un levier d’influence souple mais puissant, capable d’atteindre des publics souvent inaccessibles à la diplomatie étatique.
Dr HAYOUN a insisté sur le fait que le Maroc intègre désormais pleinement cette dynamique dans sa politique étrangère, en l’inscrivant dans une vision claire, cohérente et prospective. Cette vision repose sur la valorisation des forces vives de la société civile, qu’il s’agisse d’intellectuels, d’artistes, de militants associatifs, de journalistes ou encore de Marocains résidant à l’étranger, dont le rôle dans le rayonnement international du pays est aujourd’hui reconnu et soutenu.
En conclusion, il a souligné que l’avenir de la diplomatie marocaine – dans un monde de plus en plus interconnecté, instable et multipolaire – repose en grande partie sur la capacité à conjuguer les efforts de la diplomatie officielle avec l’agilité, l’innovation et la proximité humaine que seule la diplomatie parallèle peut offrir. Il a ainsi appelé à renforcer les synergies entre les deux sphères, dans un esprit de complémentarité, de mutualisation des compétences et de service de l’intérêt supérieur de la Nation.
4- L’Ambassade Humaniste, un acteur structurant de la Diplomatie Parallèle
L’expert international Pedro Altamirano a, pour sa part, tenu à exprimer son estime et son admiration pour le rôle pionnier que joue l’Ambassade Humaniste sur la scène internationale, soulignant la pertinence de son action, la clarté de sa vision, ainsi que son engagement constant en faveur des causes humaines, justes et universelles.
Il a mis en avant la capacité remarquable de cette institution à fédérer des compétences marocaines, issues tant de la diaspora que du territoire national, autour d’un projet global porteur d’un humanisme actif. Un projet qui transcende les clivages idéologiques et culturels pour s’inscrire dans une logique de diplomatie de proximité, inclusive, participative et résolument tournée vers l’avenir.
Pedro Altamirano a salué la manière dont l’Ambassade Humaniste s’est imposée, au fil des années, comme un acteur structurant de la diplomatie parallèle, en réussissant à conjuguer action de terrain, plaidoyer international et rayonnement culturel. À ses yeux, cette diplomatie citoyenne et indépendante constitue aujourd’hui un complément stratégique incontournable à la diplomatie officielle, notamment dans le traitement des grandes causes humanistes, sociales et géopolitiques contemporaines.
Il a également mis l’accent sur la capacité de l’Ambassade Humaniste à tisser des liens solides de coopération interculturelle entre les peuples, en favorisant l’échange, la compréhension mutuelle et la reconnaissance réciproque, au-delà des barrières linguistiques, religieuses ou identitaires. Cette démarche, selon lui, participe activement à la prévention des conflits, au renforcement du dialogue intercivilisationnel, et à la construction d’un ordre international plus équilibré et plus respectueux de la diversité des nations.
Dans cette dynamique, il a particulièrement souligné la portée méthodologique et symbolique de l’approche participative adoptée par l’Ambassade dans l’organisation de cette conférence, réunissant experts, acteurs associatifs, décideurs, universitaires et militants venus d’horizons divers. Il a salué cette initiative comme un tournant qualitatif majeur dans l’évolution du concept même de diplomatie humaniste – une diplomatie qui replace l’humain au centre de toute démarche, donne la parole aux oubliés des arènes internationales et agit là où les canaux institutionnels traditionnels peinent parfois à intervenir.
Enfin, Pedro Altamirano a conclu en affirmant que ce modèle, fondé sur l’écoute, la coopération et le respect des différences, représente l’avenir des relations internationales, à l’heure où le monde fait face à des défis globaux qui exigent des réponses concertées, solidaires et profondément enracinées dans les valeurs universelles de paix, de justice et de dignité.
5- Reconnaître, Encadrer et Protéger légalement les initiatives diplomatiques non étatiques
Lors de son intervention, l’avocate Maître Ijlal Al-Houlani, a mis en lumière un volet essentiel mais souvent négligé de la diplomatie parallèle : son cadre juridique. En s’appuyant sur une analyse rigoureuse des textes internationaux et des pratiques observées sur le terrain, elle a souligné l’importance de reconnaître, encadrer et protéger légalement les initiatives diplomatiques non étatiques, qui jouent aujourd’hui un rôle croissant dans les relations internationales et dans la défense des causes universelles.
L’avocate Maître Ijlal Al-Houlani a rappelé que si la diplomatie parallèle s’appuie sur la société civile – ONG, mouvements associatifs, plateformes citoyennes, intellectuels, artistes ou membres des diasporas –, elle reste vulnérable aux pressions politiques, aux restrictions administratives et aux représailles, notamment dans les régimes autoritaires ou dans les contextes de conflit. Les acteurs de cette diplomatie non officielle se heurtent régulièrement à des limitations arbitraires de leur liberté d’expression, de réunion, de déplacement ou d’intervention publique, ce qui compromet leur efficacité et parfois même leur sécurité personnelle.
Dans ce cadre, l’intervenante a insisté sur le rôle fondamental du droit international, en particulier les instruments relatifs aux droits de l’homme, dans la protection des activistes, des lanceurs d’alerte, des défenseurs des droits et des ONG engagées dans des causes légitimes. Elle a cité à cet égard plusieurs conventions internationales, dont le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de l’homme (1998), ainsi que les résolutions du Conseil des droits de l’homme de l’ONU relatives à la liberté d’association et d’expression.
Elle a plaidé pour la mise en place d’un cadre normatif plus clair, cohérent et respecté, qui permettrait de reconnaître la diplomatie parallèle comme un acteur légitime du dialogue international, au même titre que les institutions officielles. Selon elle, cette reconnaissance juridique devrait s’accompagner de mécanismes de protection effectifs, permettant aux diplomates citoyens d’agir sans crainte de censure, de répression ou de discrédit injustifié.
L’avocate Maître Ijlal Al-Houlani a également appelé à une mobilisation collective de la communauté internationale, notamment des États démocratiques, des organisations internationales, des universités et des réseaux juridiques, pour renforcer la sécurité juridique et opérationnelle des initiatives citoyennes transnationales, en particulier celles engagées dans la promotion de la paix, de la justice, des droits humains et du dialogue interculturel.
Enfin, elle a conclu en soulignant que la diplomatie parallèle ne doit plus être perçue comme une entité périphérique ou concurrente, mais comme un partenaire nécessaire, parfois pionnier, dans la construction d’un ordre international plus équitable et participatif. Elle a ainsi invité les juristes, les chercheurs et les décideurs à repérer, documenter et codifier les bonnes pratiques existantes, en vue de créer un référentiel juridique international solide pour la diplomatie citoyenne du XXIe siècle.
6- La nécessité impérieuse de professionnaliser la diplomatie parallèle
Prenant la parole lors de cette rencontre, M. Abdelaziz El Zrouali, expert en communication et en relations internationales, a livré une analyse prospective des grands enjeux qui attendent la diplomatie parallèle à l’échelle mondiale. Dans une intervention à la fois lucide et ambitieuse, il a mis en évidence les multiples défis que doit relever cette forme émergente d’action diplomatique si elle veut pleinement jouer son rôle dans l’architecture internationale contemporaine.
Parmi les priorités qu’il a identifiées figure en premier lieu la nécessité impérieuse de professionnaliser la diplomatie parallèle, qui demeure encore, dans de nombreux cas, marquée par l’amateurisme ou l’initiative isolée. Il a plaidé pour la mise en place de programmes de formation spécialisés, à destination des acteurs non étatiques – responsables associatifs, militants des droits humains, communicants, membres des diasporas ou universitaires –, afin de leur fournir les outils conceptuels, juridiques et techniques nécessaires à une intervention diplomatique efficace, crédible et structurée.
El Zrouali a également insisté sur l’importance de définir des méthodologies de travail claires et rigoureuses, basées sur des principes d’éthique, de transparence, de coordination et d’évaluation. Il a souligné que l’impact réel de la diplomatie parallèle ne peut être mesuré sans une organisation cohérente, une planification stratégique, et des indicateurs d’efficience bien définis. Pour cela, il recommande la création de pôles de réflexion, de laboratoires d’idées, de centres de veille et de plateformes collaboratives, capables d’assurer la continuité, la mémoire et le rayonnement des initiatives citoyennes dans le domaine international.
Autre axe structurant évoqué dans son propos : le renforcement des réseaux de coordination, tant au niveau national qu’international. M. El Zrouali a mis l’accent sur la nécessité d’un travail en synergie entre les différents acteurs de la société civile, mais aussi entre ceux-ci et les institutions étatiques. Il a notamment insisté sur le potentiel d’une coopération intelligente et mutuellement bénéfique entre la diplomatie officielle et la diplomatie parallèle, appelant à dépasser les logiques de rivalité ou de marginalisation.
Pour lui, ce partenariat stratégique doit reposer sur la complémentarité et la reconnaissance des atouts spécifiques de chaque type d’acteur. Tandis que la diplomatie officielle bénéficie de la légitimité institutionnelle et des moyens étatiques, la diplomatie parallèle apporte souplesse, créativité, ancrage de terrain et capacité d’interpellation éthique. Cette dualité, loin d’être antagoniste, peut devenir une force motrice au service des intérêts nationaux, de la paix mondiale et de la justice sociale.
En conclusion, M. El Zrouali a invité à concevoir un nouveau modèle de gouvernance diplomatique partagée, dans lequel les institutions étatiques et les forces vives de la société civile collaboreraient pour porter ensemble les grandes causes contemporaines : la défense des droits humains, la lutte contre le déracinement culturel, la prévention des conflits, ou encore la promotion du dialogue interculturel et interreligieux. Il a souligné que dans un monde en recomposition, c’est par la convergence des intelligences et la structuration des engagements citoyens que la diplomatie parallèle pourra pleinement remplir sa mission historique.
7- Vers de nouvelles stratégies d’action Humaniste
Lors des ateliers thématiques, et plus particulièrement au sein de celui intitulé « Les obstacles à la construction de stratégies diplomatiques efficaces et les mécanismes pour en renforcer le succès », le Professeur Chakir Ben Jelloun, expert en relations internationales, a proposé une analyse fine et actuelle des outils dont dispose la diplomatie parallèle pour accroître sa portée et son efficacité. Il a souligné que dans un monde de plus en plus interdépendant, où les rapports de force ne se jouent plus uniquement dans les sphères gouvernementales, la diplomatie non étatique doit s’armer de nouveaux instruments pour s’affirmer comme acteur incontournable de transformation.
- Renforcement des réseaux transnationaux
Le professeur Ben Jelloun a tout d’abord mis en lumière l’importance stratégique du développement de réseaux de coopération internationaux, citant en exemple l’organisation CIVICUS, un regroupement mondial de la société civile. Il a expliqué que de tels réseaux permettent de dépasser les logiques d’isolement et de fragmentations sectorielles qui affaiblissent les ONG et mouvements citoyens. En mutualisant les ressources, les savoir-faire et les plaidoyers, ces réseaux contribuent à créer des dynamiques d’action coordonnées autour de thématiques globales telles que les droits humains, la justice climatique, l’éducation ou encore le développement durable. Cette mise en réseau, selon lui, constitue une force démultiplicatrice qui permet à la diplomatie parallèle de s’imposer comme un partenaire crédible face aux institutions multilatérales.
- Coopération numérique et mobilisation virtuelle
Le deuxième levier présenté concerne l’intégration des technologies numériques comme outils diplomatiques de nouvelle génération. Le Professeur a évoqué l’exemple emblématique de la campagne mondiale #MeToo, qui a démontré la puissance de la mobilisation numérique pour produire des effets concrets sur les systèmes politiques et juridiques. Il a insisté sur le fait que les plateformes digitales ne sont plus seulement des canaux de communication, mais des espaces de mobilisation, de plaidoyer, d’organisation d’événements à l’échelle mondiale, voire de diplomatie préventive. Grâce à la rapidité de diffusion et à la capacité à créer des communautés d’intérêt à travers les frontières, la diplomatie parallèle dispose désormais de moyens efficaces pour faire entendre ses revendications et influencer l’agenda international.
- Gestion des données et intelligence stratégique
Enfin, le Professeur Ben Jelloun a souligné l’enjeu croissant de la gestion des données dans l’élaboration de stratégies diplomatiques pertinentes. Il a expliqué que les organisations citoyennes et les ONG doivent investir dans des outils d’analyse de données, de cartographie des acteurs, et de veille stratégique, afin de renforcer la légitimité de leurs positions. En produisant des données fiables, chiffrées et contextualisées, les acteurs de la diplomatie parallèle peuvent non seulement anticiper les évolutions géopolitiques, mais aussi soutenir leurs plaidoyers avec des preuves empiriques convaincantes, susceptibles d’influencer les décideurs publics ou les bailleurs de fonds.
8- Une vision globale pour un monde plus humain
Dans son intervention de clôture, M. Merroun Mohammed, membre du comité scientifique et conseiller stratégique auprès de l’Ambassade Humaniste, a dressé une synthèse globale des travaux de la conférence, mettant en exergue les enseignements majeurs, les perspectives ouvertes et les recommandations formulées par les participants.
Les débats nourris et multidimensionnels tenus durant les différentes sessions ont révélé un engagement profond, sincère et structurant en faveur d’une diplomatie citoyenne, inclusive et participative, perçue non seulement comme un relais de l’action institutionnelle, mais comme un acteur à part entière de la transformation sociale mondiale. Cette diplomatie parallèle, telle qu’elle a été redéfinie à Málaga, se veut résolument ancrée dans l’action concrète, tournée vers les populations, et apte à porter la voix des sans-voix, défendre les causes justes et construire des ponts entre les peuples.
Merroun a souligné que cette conférence a marqué un tournant stratégique, en ce qu’elle a permis de fédérer des acteurs issus de divers horizons – chercheurs, diplomates, avocats, journalistes, responsables associatifs, jeunes leaders – autour d’une vision commune : celle d’un monde fondé sur la justice, la solidarité, la dignité humaine et la non-violence.
Résultats concrets et dynamiques futures
Les participants ont également adopté un ensemble de recommandations concrètes, fruit des ateliers et des échanges en plénière. Parmi celles-ci :
- La création d’un centre international de formation en diplomatie humaniste, destiné à outiller les jeunes et les acteurs de terrain ;
- Le renforcement des partenariats entre ONG, universités et institutions publiques en vue de co-construire des actions d’impact global ;
- La mise en place d’un observatoire international des initiatives de diplomatie parallèle, chargé de documenter les bonnes pratiques, d’assurer une veille géopolitique et de soutenir les plaidoyers ;
- L’élaboration de chartes éthiques pour garantir la transparence, l’engagement et la non-partisanerie des actions entreprises.
9- Nomination des nouveaux Ambassadeurs Humanistes
Dans ce cadre, l’avocate Maître Mme Sayer Nora, intervenant lors de la séance de clôture, a souligné l’importance de reconnaître et de valoriser les nouvelles formes d’engagement portées par la diplomatie humaniste. Elle a insisté sur la nécessité de créer des espaces d’expression pour les voix citoyennes, en particulier celles des femmes, des jeunes et des acteurs de terrain, souvent en première ligne dans les luttes pour la dignité, la paix et la justice.
Elle a également salué l’initiative de désigner une nouvelle génération d’ambassadeurs humanistes, les qualifiant d’« acteurs de transition » vers un monde plus solidaire. Pour Mme Sayer, leur rôle sera essentiel dans l’ancrage territorial des valeurs humanistes et dans le tissage de partenariats durables entre les sociétés civiles du Nord et du Sud.
Enfin, elle a exprimé sa conviction que la conférence de Málaga marque une étape décisive vers la reconnaissance institutionnelle de la diplomatie parallèle comme levier stratégique dans la refondation des relations internationales sur des bases éthiques, inclusives et responsables.