Un nouveau projet de diagnostic de la santé des sols sera initié cette année dans le bassin versant de la baie Missisquoi. Financé par le Lake Champlain Basin Program, le projet est piloté par l’équipe de l’Organisme de bassin versant de la baie Missisquoi en collaboration avec l’équipe scientifique de l’Institut de recherche et développement en agroenvironnement (IRDA).

L’objectif principal de l’étude, laquelle se fonde largement sur la télédétection, est de mettre au point un outil cartographique permettant aux producteurs agricoles de la région, ainsi qu’aux agronomes et techniciens qui les conseillent, d’évaluer l’étendue et la gravité de la compaction des sols ainsi que le niveau de dégradation de leur structure, et d’en mesurer les impacts sur le rendement des grandes cultures. À terme, cette cartographie permettra de dégager des pratiques culturales et d’aménagement des terres qui favoriseront la remise en état des sols dégradés.

La réalisation de l’étude répond à une préoccupation croissante des producteurs agricoles de la région quant à la perméabilité de leurs sols, laquelle est généralement considérée comme un facteur déterminant du rendement des cultures sous notre climat pluvieux et frais. Un sol aéré, perméable et portant, c’est-à-dire apte à supporter les charges par les roues, assure à la fois le drainage de l’excès d’eau et sa rétention en période de sécheresse, et favorise le développement des racines, de même que le recyclage et le prélèvement, par les végétaux, des éléments nutritifs du sol.

Au cours des dernières années, de nombreux agriculteurs ont investi dans le drainage de leurs champs après avoir constaté des problèmes à cet égard ; la solution a consisté alors à réduire l’espacement entre les lignes de drains souterrains. Cependant, bien souvent, ce problème de drainage révèle une dégradation de la structure du sol et une compaction croissante. L’abandon des prairies dans la rotation des cultures ainsi que le passage répété de « poids lourds » lors des opérations d’épandage d’engrais et de récoltes sur sols humides contribuent à cette détérioration.

L’outil de diagnostic réalisé dans le cadre du projet permettra de déterminer l’emplacement des champs en mauvais état et de recommander, sur mesure, des pratiques culturales de conservation des sols, telles que l’introduction de cultures d’enfouissement (engrais verts) ou des améliorations à apporter au drainage de surface des terres. Ces interventions bénéficieront autant aux entreprises agricoles qu’à l’ensemble de la population du bassin versant.

Soulignons que sur les terres dégradées, qui y perdent en perméabilité, on assiste à un important ruissellement de surface, ce qui provoque l’érosion du sol et la migration des fertilisants qu’il comporte vers les cours d’eau et, ultimement, vers la baie Missisquoi. Investir sur mesure dans la santé des sols, c’est donc aussi contribuer à améliorer la qualité de l’eau.

L’étude s’appuie sur deux volets complémentaires, soit la télédétection et les observations à la ferme. Le premier met à profit la technologie LiDAR, qui permet de recueillir des données d’imagerie topographique par radar et laser à l’aide de satellites ou d’avions, et de les conserver dans des bases de données mises à la disposition des chercheurs. Les images obtenues permettent d’identifier avec précision les champs dont le sol est dégradé. C’est l’équipe de l’IRDA qui se chargera de ce volet.

Quant aux observations à la ferme, qui seront réalisées en collaboration avec des entreprises agricoles de la région et le personnel de l’OBVBM, elles permettront de valider et d’interpréter les données de télédétection, et de décider des actions à prendre dans le but de remédier à la dégradation des sols et aux déficits de rendement. Bien que la démarche cible particulièrement la compaction ou la dégradation de la structure du sol, on pourra éventuellement investiguer les autres causes probables d’un déficit dans les rendements : problèmes de configuration topographique, de drainage inadéquat, de faible rétention d’humidité, de fertilité insuffisante ou de pH du sol. Dans le cadre du projet, on a prévu de tenir des journées d’information durant l’été et des ateliers d’échanges en hiver. 

Aubert Michaud

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