La Commission pour la Clarification de la Vérité en Colombie a remis son rapport final, qui raconte les histoires des victimes sur la violation de leurs droits, les modèles de victimisation et où la reconnaissance des auteurs est bienvenue, dans le but de trouver une réparation symbolique pour les personnes affectées par la clarification de ce qui s’est passé dans le contexte du conflit armé et d’entamer un chemin vers la réconciliation.

La Commission de la Vérité a remis son rapport final Hay Futuro, si hay Verdad (Il y a un avenir, s’il y a la vérité) le mardi 28 juin. Pour la création de ce texte, plus de 30 000 victimes et auteurs de crimes en Colombie et dans 27 pays où ils sont en exil ont été entendus.

Le dernier chapitre du rapport comprend également des recommandations formulées après avoir analysé le conflit armé en Colombie, la violation des droits humains et l’écoute des communautés paysannes, afro, indigènes, roms et autres citoyens pendant trois ans et demi, depuis la signature de l’accord de paix à La Havane, à Cuba, en 2016.

Onze commissaires ont participé à l’enquête et à la rédaction du rapport. Ils étaient chargés de parcourir le pays et avaient également la possibilité de disposer de 28 Maisons de la Vérité, créées pour que les citoyens puissent venir avec leurs histoires sur la violation des droits des différentes victimisations subies dans le cadre du conflit armé. En outre, il s’agit de connaître la manière dont ont agi certains tiers civils et agents de l’État, qui ont participé par action ou par omission à une guerre incontrôlée, dans laquelle la population civile a été la plus touchée.

Au cours de ces années, la Commission de la vérité a reçu quelque 1 802 rapports de cas de victimes, de dynamiques du conflit armé et de violations du droit international humanitaire de la part d’organisations de victimes de tout le pays, qui ont rassemblé chacun des cas qui endeuillent les familles colombiennes.

Cette feuille de route a été remise à la société civile, au ministre de l’Intérieur Daniel Palacios et au président entrant Gustavo Petro, accompagné de sa vice-présidente Francia Márquez.

Dans le texte, une demande est faite au gouvernement de « mettre les institutions au service de la citoyenneté et de la reconstruction de la société », comme l’indique le président de la Commission de la vérité, le père Francisco de Roux.

 

Francisco de Roux appelle au pardon

Image: www.comisiondelaverdad.co

« Nous n’avions aucune raison

de nous habituer à l’ignominie

de tant de violence

comme si elle ne nous concernait pas,

alors que notre propre dignité

était mise en lambeaux entre nos mains ».

Déclaration de la Commission de la Vérité

Dans son discours, le président de la Commission de la Vérité, le prêtre jésuite Francisco de Roux, a appelé les Colombiens, indépendamment de leur ethnie, de leur opinion politique, de leur classe sociale ou économique, à générer à partir du rapport, un espace de réconciliation qui permette la construction d’une société sans violence et sans vengeance, qui se retrouve entre les mains de tous, mais en mettant davantage l’accent sur les jeunes, qui écrivent aujourd’hui l’avenir du pays.

En outre, M. De Roux a appelé ceux qui ne reconnaissent pas le rapport, qui sont hors la loi ou qui considèrent le conflit comme un moyen médiatique de rester au pouvoir, « à arrêter la guerre de tous les côtés et à être des participants à la construction d’un environnement inclusif et participatif, basé sur le respect des droits humains et de la différence ».

Le Père De Roux a ajouté dans son discours que « la participation d’auteurs de crimes provenant de l’État, des paramilitaires, des guérilleros, des hommes d’affaires et de certains anciens présidents a été d’une grande importance pour contribuer à la Vérité ». Il a également salué leur courage en reconnaissant leurs responsabilités éthiques, politiques et pénales dans les cas de viols, d’assassinats, de faux positifs [NdT. : meurtres de civils par des membres de l’ armée nationale colombienne, dans le but de faire passer ceux-là pour des guérilleros morts au combat lors du conflit armé colombien. Ces assassinats avaient pour objectif d’améliorer les résultats des brigades de combat.], de massacres et autres violations des droits humains.

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« Nous avons devant nous la possibilité

en tant que corps responsable d’une nation,

de faire nôtre la blessure de nos 10 millions de victimes,

et de nous racheter dans une nation

inclusive, juste et réconciliée ».

Déclaration de la Commission de la Vérité

Avant de conclure son discours, le Président de la Commission a repris les questions initiales que les 11 membres de la Commission ont posées pour mener à bien l’analyse du conflit armé en Colombie : Pourquoi le pays n’a-t-il pas arrêté l’État et les groupes illégaux ? Pourquoi l’État n’a-t-il pas arrêté le conflit sachant que les citoyens étaient les seuls touchés ? Qui a impulsé le conflit armé ? Où étaient le Congrès et les partis politiques ? Que faisaient les dirigeants ? Quel était le rôle des médias et des responsables de l’information ? Quel était le rôle des universités et des églises ?

Enfin, la Commission a demandé que le dédommagement des victimes par la vérité soit une priorité, au-dessus de l’extradition. Elle a également appelé le nouveau gouvernement à mettre pleinement en œuvre l’Accord de Paix, en mettant l’accent sur la redistribution des terres.

 

Gustavo Petro a accueilli les recommandations

Le président élu, Gustavo Petro, reçoit le rapport |  Image: www.comisiondelaverdad.co

Lors de la présentation du rapport de la Commission de la Vérité, le président élu a accepté les recommandations et a indiqué que « cet effort est considéré comme une approximation de la vérité, où les mots mènent à des idées et celles-ci à des histoires. Par conséquent, ce rapport ne doit pas être considéré comme un moyen de vengeance, mais comme un mécanisme de réconciliation, de coexistence, de paix et de non-répétition du conflit armé ».

Avant de conclure son discours, le président élu Gustavo Petro s’est engagé à lire les recommandations en détail et à les mettre en œuvre dans le cadre de l’Accord de Paix et de la loi.

 

Qu’a livré la Commission de la vérité ?

Cet organe, composé de 11 membres, a d’abord fourni le rapport final qui est divisé en plusieurs chapitres, dont les récits des victimes, le rôle des auteurs de crimes (l’État, les hommes d’affaires et les groupes armés illégaux), une analyse générale du conflit armé colombien ; puis une section de recommandations dont on espère qu’elles seront mises en œuvre et acceptées afin de poursuivre la recherche de la vérité, de la justice et de la réparation pour les victimes.

Ce rapport, qui sera publié par chapitres sur la plateforme de la Commission de la Vérité, disposera également d’outils numériques et pédagogiques qui permettront à tous les Colombiens et étrangers de prendre connaissance de son contenu, grâce à des vidéos, des jeux et de courtes explications qui le rendront facilement accessible. Et il disposera de traductions dans différentes langues et d’un soutien pour les personnes handicapées.

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«  Il existe toujours un conflit multipartite

qui pourrait prendre de l’ampleur

dans une autre période de confrontation totale

si des mesures sérieuses ne sont pas prises

pour construire une paix globale ».

Déclaration de la Commission de la Vérité

En outre, la Commission pour la vérité présentera une exposition artistique qui restera au Musée national de la mémoire ainsi que des archives audio et vidéo sur les droits humains et leurs violations, qui seront disponibles sur la plate-forme numérique de la Commission pour la vérité. Comisión de la Verdad.

 

Qu’est-ce que la Commission de la vérité ?

La Commission est une institution de l’État colombien, de niveau constitutionnel, autonome et indépendante, qui a été créée par l’Acte législatif 01 de 2017, suite à la signature de l’Accord de Paix à La Havane, Cuba, en 2016.

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« Nous apportons un message

d’espoir et de futur

pour notre nation

abîmée et brisée ».  

Déclaration de la Commission de la Vérité

Cet organisme devait publier tous les six mois un rapport sur son travail de recherche de la vérité, en collaboration avec les institutions étatiques et les organisations civiles, afin de garantir que les victimes et la société colombienne sachent comment les événements se sont produits, pourquoi ils se sont produits et qui en est à l’origine.

La Commission était également chargée de compiler des informations, de clarifier les schémas et les causes qui expliquent la violence, ainsi que d’élaborer des recommandations pour la construction d’institutions démocratiques et la prévention de la violence ou de la répression.

 

Quelle est la prochaine étape pour la Commission de la Vérité ?

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« Nous appelons à accepter

la responsabilité éthique et politique

face à la vérité des dommages brutaux causés,

et à le faire avec sincérité de cœur ».

Déclaration de la Commission de la Vérité

Après la remise du rapport final Hay Futuro, si hay Verdad (Il y a un Futur, s’il y a la Vérité), la Commission consacrera les deux mois restants de son mandat à la socialisation du rapport et laissera une délégation de sept personnes chargée de surveiller la mise en œuvre des recommandations données au gouvernement entrant.