« Écran, mon bel écran, dis-moi qui a raison en ce royaume virtuel qui nous promettait tant ? »

Il y a certains dictons qui, lorsque je les vois arriver dans une discussion, me font craindre ce que je redoute le plus, un échange qui tourne au débat idéologique permettant de s’affranchir d’une réalité qui nous dérange parce qu’elle ne colle pas à nos représentations.

C’est le cas de cette expression, « L’enfer est pavé de bonnes intentions ». J’ai remarqué qu’on l’emploie souvent pour s’exonérer de devoir avancer des arguments solides, en jetant un soupçon généralisé sur les propos de son interlocuteur. Il devient alors très difficile de poursuivre sereinement le dialogue et, lorsque l’on perd sa sérénité, c’est là que les ennuis commencent. On se met soi-même à employer des arguments (qui n’en sont plus tout à fait), que l’on va regretter par la suite…

Alors je me suis interrogé sur le sens réel de cette expression et je me suis aperçu, à ma grande surprise, qu’elle comportait dans son énoncé une sorte d’oxymore qui ne fonctionne pas vraiment. L’enfer ne se manifeste dans nos vies que lorsque nous abandonnons notre éthique, que nos intentions s’égarent, en d’autres termes, qu’elles sont devenues mauvaises. Vous remarquerez que j’emploie le terme « devenues », car pour moi il est essentiel de ne jamais oublier que le bien précède toujours le mal, ce dernier n’étant que l’absence du premier, l’expression du vide qui en résulte.

De bonnes intentions peuvent avoir du mal à se concrétiser, mais elles ne créent pas l’enfer, et n’en pavent certainement pas les avenues. Une intention c’est comme la mise en mouvement de ce que l’on porte en soi, et lorsqu’elle part du bon endroit, sa résultante, une fois atteinte, a de bonne chance de l’être aussi.

Pour évoquer le côté obscur de la force, et pour rester dans la métaphore urbaine (tiens, ça ne marche pas avec la nature…), je dirais plutôt, « L’enfer est placardé de belles paroles ». C’est comme cela, d’ailleurs, que certains peuvent se laisser séduire par des discours enjôleurs qui cachent des intentions pourtant loin d’être louables !

Il est un autre proverbe à connotation « religieuse » qui, en général, ne souffre pas de discussion et crée chez nous un élan positif à son énoncé : « Aide-toi, le ciel t’aidera. » L’enfer c’est souvent ça, lorsqu’on se sent réduit à l’inaction, convaincu que le monde entier s’est ligué contre nous, alors qu’il n’a même pas conscience de notre existence !

« Nous pouvons faire tomber les murs virtuels que nous avons érigés et nous pouvons voir le monde entier comme une seule et unique entité. Nous devons considérer tous les êtres humains qui vivent sur terre comme faisant partie de notre famille et reconnaître que chaque être humain a une contribution positive à apporter dans le monde. » Prem Rawat