Par Robert Reich

Je n’avais pas l’intention de faire de commentaires à propos du discours mensonger de Trump sur l’état de l’Union, mais c’étaient de si gros mensonges – en particulier sur le plan économique – que je me suis senti obligé. Voici, pour rappel, l’état réel de l’Union :

1. EMPLOIS : La création mensuelle moyenne d’emplois est passée de 223 000 en 2018 à 176 000 en 2019. Le taux d’emploi des adultes en âge de travailler a moins augmenté que lors de la reprise d’Obama, et reste nettement inférieur à celui des autres pays développés. Le rythme de création d’emplois est également nettement plus lent qu’il ne l’a été pendant le mandat d’Obama.

2. SALAIRES : La croissance des salaires s’est ralentie, sauf dans les États où les salaires minimums ont augmenté. La famille américaine type reste aujourd’hui plus pauvre qu’avant le début de la crise financière de 2007. Le salaire moyen d’un travailleur à temps plein (encore faut-il faire partie des chanceux qui travaillent à temps plein) est encore inférieur de plus de 3 % à ce qu’il était il y a 40 ans.

3. TAXES : La baisse de l’impôt de l’administration républicaine de Trump a été un énorme échec.

On nous avait promis une augmentation des investissements des entreprises, mais ces derniers se sont contractés pour le troisième trimestre consécutif – une première depuis la Grande Récession de 2009. Au lieu de cela, la baisse de l’impôt a déclenché une vague record de rachats d’actions – environ 800 milliards de dollars en 2018.

Si elle est mise en œuvre à 100%, la baisse de l’impôt de 2017 se traduira par des augmentations d’impôts pour la plupart des 80% des foyers les plus démunis.

Et elle a entraîné des déficits record en temps de paix (près de 1 000 milliards de dollars pour l’exercice 2019) dans un pays supposé proche du plein emploi. Même avec de faibles investissements, les États-Unis ont dû emprunter des sommes astronomiques à l’étranger : les données les plus récentes montrent que les emprunts étrangers s’élèvent à près de 500 milliards de dollars par an, avec une augmentation de plus de 10 % de la position d’endettement net des États-Unis en un an seulement.

Il n’y a eu aucun effet positif sur les travailleurs moyens. Au contraire, si elle est pleinement mise en œuvre, la baisse de l’impôt de 2017 engendrera des augmentations d’impôts pour la plupart des 80 % des foyers les plus pauvres.

4. COMMERCE : Le déficit commercial de 2018 a été le plus important jamais enregistré. Même le déficit du commerce avec la Chine a augmenté de près d’un quart par rapport à 2016.

5. CROISSANCE : La croissance du dernier trimestre n’a été que de 2,1 %, ce qui est bien moins que les 4 %, 5 % ou même 6 % que Trump avait promis de réaliser, et encore moins que la moyenne de 2,4 % du second mandat d’Obama. C’est une performance remarquablement médiocre si l’on considère le renfort apporté par le déficit de 1 000 milliards de dollars et les taux d’intérêt très faibles.

6. DROITS DES TRAVAILLEURS : L’administration Trump a systématiquement affaibli les droits des travailleurs. Plus de huit millions de travailleurs seront laissés pour compte par la règle des heures supplémentaires de Trump. Les travailleurs recevront 1,4 milliard de dollars de moins que dans le cadre de la règle de 2016. La nouvelle règle de l’administration Trump concernant les relations employeur-employé a coûté 1 milliard de dollars aux travailleurs.

7. SANTÉ : Des millions d’Américains ont perdu leur assurance maladie, et le taux de non-assurés est passé, en deux ans seulement, de 10,9 % à 13,7 %. L’espérance de vie américaine, déjà relativement faible, a chuté au cours de chacune des deux premières années de la présidence de Trump, et en 2017, la mortalité à la quarantaine a atteint son taux le plus élevé depuis la Seconde Guerre mondiale.

8. CLIMAT : les pertes liées au changement climatique ont déjà atteint de nouveaux sommets aux États-Unis, qui ont subi plus de dommages matériels que tout autre pays – atteignant environ 1,5 % du PIB en 2017.

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Robert Reich, est professeur émérite de politique publique à l’Université de Californie, à Berkeley, et maître de recherche au Blum Center for Developing Economies. Il a été secrétaire au Travail dans l’administration Clinton, poste pour lequel Time Magazine l’a nommé  l’un des dix secrétaires de cabinet les plus efficaces du XXe siècle. Il a écrit quinze livres, dont les best-sellers Aftershock, The Work of Nations, Beyond Outrage et, Saving Capitalism. Il est également rédacteur en chef fondateur du magazine The American Prospect, président de Common Cause, membre de l’Académie américaine des arts et des sciences et co-créateur du documentaire primé « Inequality For All ». Le dernier livre du Reich est The Common Good. Il est aussi co-créateur du documentaire original de Netflix Saving Capitalism, qui est désormais diffusé.

 

Traduit de l’anglais par Maryam Domun Sooltangos

L’article original est accessible ici