Volkswagen, après le scandale mondial du trucage de ses moteurs, s’attend à ce que les Etats-Unis lui infligent une amende de 18 milliards de dollars. Une question peut se poser: ces amendes servent-elles aussi une stratégie économique américaine ?

D’autres firmes européennes ont ont eu à subir par le passé les foudres de la justice américaine. Au-delà de la réalité des faits reprochés par exemple à la firme allemande, ces amendes servent-elles aussi la stratégie économique américaine pour contrer les entreprises étrangères et plus largement pour imposer sa politique étrangère?

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Les amendes, une arme de destruction économique massive?

En 2014, la BNP s’était en effet vue infliger une amende de 8, 9 millliards de dollars. La raison? La banque française avait enfreint l’embargo américain sur certains pays en finançant avec des dollars des transactions au profit de clients en Iran, au Soudan et à Cuba.

Autres banques à avoir fait les frais de la politique américaine, la seconde banque d’Allemagne, Commerz bank, qui en mai dernier a  été frappée d’une amende d’1, 45 milliard de dollars pour avoir aussi financé des transactions en dollars pour le compte de clients en Iran et au Soudan. L’italienne UniCredit, Deutsche Bank et la Société générale sont toujours dans le collimateur de la justice américaine pour des faits identiques.

La liste est donc longue de ces banques qui pour garder leur licence bancaire aux Etats-Unis, ont dû payer des amendes astronomiques pour avoir violé des embargos et sanctions décidés seuls par les Etats-Unis: la britannique Standard Chartered qui a versé 340 millions de dollars; le Crédit Suisse pour plus de 2,5 milliards de dollars; le crédit agricol qui devrait être fixé sur une amende de plus de 1 milliards de dollars.

Unilatéralisme des sanctions…

Pour justifier juridiquement ces amendes, les Etats-Unis s’appuient sur un système de sanctions qu’ils adoptent de façon unilatatérale. Seulement voilà, en théorie, les seuls régimes de sanctions approuvés au niveau international, et donc légaux, sont ceux des Nations Unies. Ces sanctions sont alors votées par l’Assemblée générale et le Conseil de Sécurité et s’imposent à tous les membres des Nations Unies.

Toutes sanctions décidées unilatéralement sont donc techniquement illégales et servent la plupart du temps à imposer une politique étrangère particulière. Si environ treize régime de sanctions ont été décidés par le Conseil de Sécurité (Al-Qaïda, Corée du Nord, Guinée-Bissao, Irak, Libéria, Libye, RDC, Somalie…), les États-Unis sanctionnent environ 70 pays.

C’est alors l’Office of Foreign Assets Control qui supervise ces sanctions américaines Une liste de «Specifically designated nationals» est constamment mise à jour. Elle touche autant des Etats, des individus que des entités. Aujourd’hui, cette liste fait plus de 980 pages.

…et extra-territorialité de la justice

Pour prendre le cas emblématique de BNP Parisbas, la banque n’avait brisé aucun interdit français ou européen dans ses échanges avec le Soudan, l’Iran et Cuba. Plus encore, BNP Paribas ne dépend pas des Etats-Unis, son siège social étant en France et son actionnariat principalement européen.

Pourtant c’est bien le droit américain qui s’est appliqué aux transactions qui ont mené à sa condamnation. Autrement dit les décisions unilatérales de politiques étrangères des Etats-Unis ont un effet extra-territorial, et s’appliquent à quiconque voulant commercer avec un État sanctionné par eux. Cela revient tout simplement à dire que les États-Unis légifèrent pour le monde entier.

Le système-dollars 

C’est surtout le contrôle exercé par les Etats-Unis sur le dollar qui leur permet de fait d’appliquer ces sanctions hors de leurs frontières.

D’abord parce que le billet vert est toujours la principale monnaie de réserve au monde et qu’il est impliqué dans 85% des transactions sur le marché mondial des changes. Aucune société ou banque internationale ne peut envisager de se voir retirer sa licence qui lui donne accès au marché américaine mais également au marché des changes international, sous peine d’être condamné économiquement.  

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Mais plus largement, le dollar confère encore une grande suprématie celle de mécanisme de compensation des transactions en dollars. Concrètement, cela suppose que toutes les transactions en dollars doivent être conformes à la loi des Etats-Unis, même lorsqu’elles se déroulent entre deux acteurs dont aucun n’est américain, en un lieu situé hors des Etats-Unis. Toute transaction effectuée en dollars doit donc respecter le cadre légal américain.

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C’est ce qui a permis de sanctionner tant de banques et entreprises qui avaient réalisé des transaction en dollars avec des pays frappés d’embargo par les Etats-Unis.

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