Face aux menaces qui pèsent sur les récifs coralliens, une commune de la Réunion développe une initiative d’éco-volontariat. L’objectif : former des plongeurs non-scientifiques au suivi et à l’inventaire de la biodiversité marine.


par Barnabé Binctin pour Reporterre

Les touristes vous en parlent avec des étoiles (de mer) dans les yeux. Les scientifiques, eux, avec beaucoup plus d’inquiétude. Les récifs coralliens, et leurs écosystèmes associés tels que les herbiers et les mangroves, vont mal et leur beauté est menacée. « Partout, les récifs coralliens s’amenuisent », déclarait l’an dernier Ban Ki-Moon, le secrétaire général des Nations Unies.

Fonctions écologiques fondamentales

« Ils souffrent de destruction directe à cause de projets d’infrastructures comme des grands ports. Ils souffrent aussi de pollution, par les effluents qui viennent de Terre. Surtout, ils souffrent aujourd’hui des conséquences du réchauffement climatique », explique Aurélie Bocquet, chargée de mission à l’UICN (Comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature).

« Et le réchauffement climatique, c’est ce qui est devant nous », s’alarme Bernard Salvat, professeur émérite à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes et spécialiste de ces écosystèmes. « Les dégradations d’origine humaine sont presque des menaces du passé. Le plus gros danger désormais est l’augmentation de la température des eaux et l’acidification des océans ».

Or si les récifs coralliens ne représentent que 0,2 % de la surface des océans, ils assurent 25 % de la biodiversité mondiale, remplissant des fonctions écologiques fondamentales.

Formation et science participative

Comment protéger les lagons aux eaux turquoises abritant raies mantas, tortues luths, dugongs et autres murènes zébrées ? Par la sensibilisation et l’auto-apprentissage veut croire la municipalité de Saint-Paul à la Réunion. L’île au cœur de l’Océan Indien possède des coraux particulièrement jeunes, âgés d’environ 8 000 ans.

Depuis 2009, la mairie a mis en place un programme de formation intitulé Reef Check, en partenariat avec l’association ARVAM (Agence pour la Recherche et la Valorisation Marines). Des biologistes marins encadrent ainsi des bénévoles, non scientifiques, qu’ils forment aux techniques de suivi et d’inventaire en matière de biodiversité marine. Des cours de plongée et des excursions pratiques sont organisés afin que les volontaires s’initient aux méthodes de comptage de biodiversité dans les récifs.

L’idée : améliorer la connaissance de l’état de santé des récifs et mieux comprendre leur évolution sur le littoral réunionnais. Pour en faire une science participative : « Le volontariat, c’est ce qui nous fera avancer dans le bon sens, nous avons besoin de tout le monde », assure Joseph Sinimale, le maire de Saint-Paul.

La responsabilité de la France

« La protection des récifs coralliens ne peut plus être seulement une affaire de scientifiques », confirme Bernard Salvat. Par cet « éco-volontariat », les responsables espèrent favoriser la sensibilisation de l’ensemble des usagers. « La plongée permet une prise de conscience bien plus importante que les images et les grands discours », dit Aurélie Bocquet.

Le projet de la Réunion fait partie d’un programme global d’éducation à l’environnement et d’autres « Reef check » se développe à travers le monde, avec pour devise : « Observer pour mieux connaître et protéger ». Le projet de Saint-Paul à la Réunion a reçu récemment la palme IFRECOR, remise par l’institut spécialisé dans la protection des récifs coralliens.

La ministre des Outre-Mer, George-Pau Langevin, qui remettait le Prix le 25 novembre, a par ailleurs rappelé la responsabilité de la France dans la protection de ce patrimoine, en tant que seul pays au monde à posséder des récifs coralliens dans les trois océans de la planète. Et en tant qu’hôte du grand rendez-vous de décembre 2015 sur le climat…


Source : Barnabé Binctin, pour Reporterre

Original de l’article publié sur le site de notre partenaire

Photos : Reef Check