Carte des 14 régions proposées en 2014.

Parce que je partage totalement le point de vue exprimé ci-dessous et parce que je ne saurais dire mieux, je reproduis, avec l’accord de son auteur, l’argumentation qui fonde le rejet de la réforme territoriale. Une réforme qui répond à une volonté de plus de l’Union européenne de démanteler les Etats, seuls en capacité de résister – si tant est que leur gouvernement le veuille – à la main mise du secteur privé sur nos vies. De quoi pèseront les nouvelles régions face aux firmes multinationales auxquelles les Etats peinent déjà tellement à s’opposer ?

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Par Céline Piot (conseillère municipale à Mont-de-Marsan)

Tous les journaux du Sud-Ouest traitent du même sujet : quelle région sera réunie à l’Aquitaine ? Midi-Pyrénées ? Limousin ? Poitou-Charentes ? Or, en nous invitant à signer telle pétition pour préférer l’association avec une région plutôt qu’avec une autre, en nous présentant l’action de tel parlementaire qui souhaite changer le projet actuel, on nous fait approprier une réforme territoriale dont, pourtant, on ne veut pas.

On nous amuse au lieu de nous expliquer les enjeux du projet qui veut se débarrasser du triptyque « nation, départements, communes » pour le remplacer par « Europe, régions, intercommunalités », dans le but de détricoter l’héritage révolutionnaire. Le découpage du territoire issu de la Révolution française voulait briser les chaînes de la féodalité ; pour atteindre cet objectif, il fallait transférer le pouvoir au peuple et en permettre l’exercice au plus près des citoyens. À l’inverse, en cherchant à régionaliser le pays, l’acte III de la décentralisation éloigne le territoire du citoyen pour que le contrôle du politique soit inopérant, pour que la technocratie prenne le pas sur la délégation de souveraineté et il transforme le cadre national, qui était un espace d’émancipation collectif, en une entité de compétitivité où règne le marché roi.

Alors qu’on nous présente cette réforme comme une occasion de faire des économies financières (la fin du fameux « mille-feuille »), on laisse les échelons les plus coûteux et les moins démocratiques (les syndicats mixtes, les syndicats de pays…) ; alors qu’on nous répète à l’envi que l’agrandissement des régions est une absolue nécessité, on maintient la région la plus petite (Nord-Pas-de-Calais) dans sa même configuration ; alors qu’on nous dit vouloir moderniser la vie politique, on ne consulte pas le peuple par voie référendaire. Il faut dire aussi que, dès lors qu’ils sont consultés, les citoyens rejettent ce projet, ce qui revient à réaffirmer le primat de l’unité et de l’indivisibilité du peuple (référendum régional en Alsace du 7 avril 2013), alors que les politiques et éditorialistes ne cessent actuellement d’écrire, pour mieux nous en persuader, que le peuple est favorable à ladite réforme…

Si l’intérêt financier et politique est loin d’être prouvé, pourquoi le gouvernement s’acharne-t-il à vouloir faire passer cette réforme dont personne ne veut, à part les « barons » des fiefs régionaux ? En réalité, il répond à une commande de la Commission européenne qui lui permettra de négocier directement avec les régions pour mieux effacer, voire détruire l’État-nation, pourtant seul garant de l’unité nationale et rempart contre les visées nationalistes et communautaristes. Pour toutes ces raisons, ce projet doit être rejeté en bloc !