Depuis 2008, dans un contexte de réduction de dépenses de santé publique, les pouvoirs publics ont largement encouragé l’automédication pour les maladies bénignes. Cette volonté est largement relayée par l’industrie pharmaceutique.

 

LOGIQUE DE MARCHE

Lors de la présentation de la 2e édition de l’Observatoire européen sur l’automédication mis en place par l’Afipa (association des industriels du secteur), Pascal Brossard, son président, regrettait que le marché de l’automédication soit moins développé en France que dans la plupart des pays européens. La part de marché en volume de l’automédication se situait en 2013 à 15,7 % en France, contre une moyenne européenne de 25,7%. En dépit de tous les discours prônés par les défenseurs de l’automédication valorisant la responsabilité des patients, les préoccupations principales restent économiques : on est bien loin de la notion de santé publique et de l’éducation des malades.

LOGIQUES DES PATIENTS

Du point de vue du public, on constate différentes raisons de recourir à l’automédication.

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D’une part, les déremboursements de nombreux médicaments, les problèmes posés par les dépassements d’honoraires plus fréquents  amènent certaines personnes à vouloir se soigner par elles-mêmes.

D’autre part, pour les maux bénins ou récurrents, certaines personnes considèrent qu’elles n’ont pas besoin de recourir aux médecins et reprennent les prescriptions antérieures. Cependant, pour les professionnelles de santé, même dans ce cas, cette pratique ne s’avère pas toujours la meilleure en termes de santé et d’efficacité (risques d’effets secondaires, d’interactions médicamenteuses, de mauvais usage du médicament par une durée trop longue des traitements ou surdosage).

LA QUESTION DE L’USAGE ECLAIRE

L’automédication s’appuie aussi sur la généralisation de l’accès aux informations sur la santé et les traitements médicaux, notamment via internet. Les médecins ont généralement du mal à accepter cette évolution et encore moins à l’accompagner. C’est à dire qu’ils ont du mal à céder une petite part de leur pouvoir qui permettraient aux patients mieux comprendre les enjeux autour de leur propre santé. Cette difficulté des professionnels mine la confiance des patients, ridiculise tout volonté de les responsabiliser tant en renforçant le recours à l’automédication.

Parallèlement, les textes officiels, les différents rapports, diabolisent l’armoire à pharmacie familiale posant le problème du mésusage du médicament et de dates de péremption. L’acte d’automédication semble ainsi nécessairement impliquer un achat de médicament.

D’un point de vue social, l’automédication vise à faire des individus des consommateurs assurant financièrement leurs dépenses de santé mais sans pour autant leur permettre d’être aptes à choisir un traitement adapté. En effet, il n’y a pas véritablement d’éducation à la santé qui permettent au public de se construire un jugement éclairé en matière d’automédication.

Catherine Masoda et Carole Partaix, pharmacienne