D’ici quelques jours, la nouvelle Commission Vérité, Justice et Réconciliation devrait voir le jour au Mali, si les députés la valident. Elle devra faire la lumière sur les crimes commis depuis les années 1960.

La commission aura du travail, puisqu’elle devra se pencher sur toutes les exactions commises au Mali depuis l’indépendance, de la corruption aux atrocités des groupes armés dans le Nord. Ce projet ambitieux suscite de l’espoir dans le Nord du Mali… mais qui soulève aussi de nombreuses questions.

Parler de tout

Ils seront quinze membres, et sept groupes de travail à plancher sur ce vaste sujet. Une commission qui, pour l’heure, n’est qu’à l’état de projet, mais devrait se substituer à la commission actuelle, pour le dialogue et la réconciliation, rattachée au Ministère de la Réconciliation nationale. Or, parmi les exigences de la société civile malienne et de l’opposition, il y a celle de l’indépendance de la nouvelle structure : pour mener à bien son travail, il faut que la future commission puisse évoquer tous les thèmes, toutes les responsabilités, sans tabou.

« Le pardon est possible »

C’est dans le nord du pays que les atrocités ont été les plus nombreuses et nous avons demandé au responsable du Conseil des jeunes de Tombouctou ce qu’il pensait de cette idée de commission. Sahi Ibrahim attend la paix, condition sine qua non du développement de sa région : « Les Tombouctiens attendaient ça. Parce qu’ici, à Tombouctou, notre confort viendra de la paix et du pardon. »

Un pardon qui passera effectivement par la parole, de l’avis de Diarine Traoré Yattara. Cette responsable de l’Association Al Hamdullilah pour les femmes à Tombouctou, a tenu à rester vivre dans le nord du pays, qu’elle n’a pas quitté, même au pire des violences de 2012 : « Le pardon est possible. Quand il y a justice, peu importe qu’on soit blanc ou noir, nous sommes des frères et soeurs. Ce sont nos enfants qui ont pris les armes pour nous attaquer, nous ne pouvons pas ne pas leur pardonner, mais en s’asseyant à la même table pour que ça ne se répète plus. »

Des difficultés en vue

Et pourtant, au fil de la conversation avec Diarine Traoré Yattara, on sent la tension toujours vive : « Mon père a été l’un des premiers fellaghas à avoir pris les armes, en 1962, à Kidal. Mais aujourd’hui, je suis pour la paix. Quand ceux qui ont pris les armes cette fois disent qu’il s’agit d’une vengeance pour leurs parents, c’est faux. Ils sont intéressés par le banditisme et le trafic de drogues. Ils sont allés en Libye pour se former. Les désarmer pour arrêter ça, ce sera difficile. »

Des militants des droits de l’Homme espèrent que la future commission parviendra à écouter les victimes, bien sûr, mais aussi les auteurs des exactions. Et à panser durablement, pas seulement par la parole, les maux de la société malienne.