Les dirigeants européens, c’est-à-dire les gouvernements des 27 Etats membres et les plus hauts responsables des institutions européennes n’ont guère d’égards pour les principes démocratiques. On le savait depuis 1957, tant il est vrai que la mise en œuvre de la méthode communautaire (= transférer progressivement des matières de plus en plus sensibles politiquement du niveau national vers des organes supranationaux dépourvus de légitimité démocratique) est un processus d’appauvrissement démocratique.

Mais, si averti qu’on soit, on demeure chaque fois stupéfait de l’audace dont ces dirigeants font preuve pour déposséder toujours davantage les citoyens de tout droit de regard sur des institutions et des politiques qui affectent directement leur vie.

Alors qu’on nous tient un discours sur les pouvoirs accrus du Parlement européen  – qui ne sont pas contestables sans qu’on puisse soutenir que nous soyons en présence d’une authentique institution parlementaire –  les Chefs d’Etat et de gouvernement viennent de demander à ce Parlement de réduire ses pouvoirs à néant sur l’essentiel : le budget.

En effet, seize mois avant les élections européennes de juin 2014, ils viennent d’adopter un budget pluriannuel qui porte sur la période 2014-2020 (ce budget pluriannuel est prévu par l’article 312 du Traité sur le fonctionnement de l’UE). Il s’agit d’un cadre qui fixe les plafonds maximums qui ne peuvent être dépassés pour chaque politique. Le Parlement européen a le pouvoir de rejeter ce budget. S’il l’approuve, l’assemblée qui sera élue l’an prochain sera liée par ces choix. D’autant que la procédure de révision du budget pluriannuel à mi-parcours, normalement prévue, a été exclue cette fois. Ce qui signifie clairement que, peu importe le résultat des élections, le plus important des choix sera de toute façon scellé.

C’est dire le peu de considération dont témoignent les dirigeants européens pour ces élections ramenées à ce qu’elles sont en réalité : une comédie pour faire croire au caractère démocratique de l’intégration européenne. Et ces dirigeants, ainsi que leurs valets médiatiques, auront ensuite le culot de déplorer la faible participation des électeurs et des électrices à un scrutin devenu sans utilité !

Le Parlement dispose d’un vrai pouvoir, dont il se sert malheureusement trop peu, car il préfère jouer le jeu d’un processus de co-décision où il finit presque toujours par s’enliser dans des compromissions minables. Mais il détient le pouvoir de dire non. Il faut souhaiter que cette fois, devant un tel mépris, les parlementaires vont s’indigner et se révolter. Et rejeter ce budget médiocre à tous égards. Le contraire donnerait des arguments à ceux qui, déjà, lancent pour 2014 le mot d’ordre de boycott d’une élection qui ne sert qu’à cautionner une oligarchie.

Source : www.jennar.fr