L’Assemblée générale des Nations Unies a approuvé aujourd’hui une résolution historique pour lancer les négociations en 2017 sur un traité interdisant les armes nucléaires. Le vote fait suite à une décision du 27 octobre 2016 par la Première Commission de l’Assemblée Générale – qui traite les questions de désarmement et de sécurité internationale – pour commencer à travailler sur ce nouveau traité malgré la fervente opposition de certains pays dotés d’armes nucléaires.

La résolution a été adoptée par une large majorité, 113 États membres de l’ONU ont voté en faveur, 35 contre et 13 abstentions. Le plus fort soutien venait des pays d’Afrique, d’Amérique Latine, des Caraïbes, d’Asie du Sud Est et du Pacifique. Un groupe inter-régional comprenant l’Autriche, le Brésil, l’Irlande, le Mexique, le Nigeria et l’Afrique du Sud est à l’origine de la résolution et est susceptible de conduire les négociations de l’an prochain.

Au début de cette semaine, lors d’une réunion du comité de budget de l’ONU, les États-Unis ont attiré la colère des autres nations quand ils se sont  opposé à une demande de financement pour les quatre semaines prévues de négociations sur le traité, qui se tiendront au siège de l’ONU à New York. Mais sous la pression intense de la part des partisans du désarmement nucléaire, le comité a finalement retiré son objection, et a autorisé la demande.

Dans une fuite de documents distribués à tous les membres de l’OTAN en octobre 2016 avant la décision de la Première Commission, les États-Unis – qui possèdent quelques 7 000 armes nucléaires – ont exhorté leurs alliés à s’opposer à la résolution et à boycotter les négociations, craignant que le traité ne détériore la perception que les armes nucléaires sont légitimes pour certaines nations et rende plus difficile pour l’OTAN de se livrer à la planification d’une guerre nucléaire.

Un certain nombre d’alliés proches des États-Unis, qui ont voté contre la résolution ou se sont abstenus, ont indiqué leur intention de participer aux négociations de toute façon, afin d’aider à façonner le traité. Par exemple, les Pays-Bas, qui hébergent des armes nucléaires sur leur  territoire et qui se sont abstenus de voter, ont confirmé qu’ils prendront part, et le ministre des Affaires Étrangères du Japon, en dépit de la résolution adverse, veut que son pays y participe.

La Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (ICAN) exhorte tous les pays à y prendre part. «Chaque nation a intérêt à ce que les armes nucléaires ne soient jamais utilisées à nouveau, ce qui ne peut être garanti que par leur complète élimination. Nous appelons tous les gouvernements à se joindre aux négociations de l’année prochaine et à  travailler pour parvenir à un traité solide et efficace », a déclaré Beatrice Fihn, Directeur exécutif de l’ICAN.

L’ICAN a souligné que les négociations devraient se dérouler avec ou sans l’accord de participation des nations dotées d’armes nucléaires. «En principe, les armes qui frappent sans discrimination et sont destinées à causer un préjudice humanitaire catastrophique devraient être interdites en vertu du droit international. Ce nouveau traité va placer les armes nucléaires sur la même base juridique que les autres armes de destruction massive », a déclaré Fihn.

« Nous croyons que, grâce à sa force normative, le traité d’interdiction des armes nucléaires aura une incidence sur le comportement des nations dotées d’armes nucléaires, même si elles refusent de le rejoindre. Il sera également influent sur le comportement d’un grand nombre de leurs alliés qui demandent actuellement la protection contre les armes nucléaires, y compris les pays d’Europe qui en reçoivent sur leur territoire. Il contribuera de manière significative à la réalisation d’un monde exempt d’armes nucléaires ».

Les négociations seront divisées en deux sessions, du 27 au 31 Mars et du 15 Juin au 7 Juillet. L’ICAN envisage d’envoyer une importante délégation de militants pour les deux sessions. La campagne exhorte les gouvernements à faire tous les efforts pour conclure le traité d’ici la fin des quatre semaines de négociations, tenant  compte que beaucoup de travail préparatoire a déjà été fait, y compris par un groupe de travail des Nations Unies réuni à Genève cette année.

Le traité est susceptible d’inclure des dispositions similaires à celles présentées sur les traités existants interdisant les armes biologiques, les armes chimiques, les mines antipersonnel et les armes à sous-munitions. Ceux-ci comprennent l’interdiction de l’utilisation, le développement, la production, l’acquisition, le stockage, la conservation et le transfert, ainsi que l’assistance, l’encouragement ou l’incitation à la personne de se livrer à l’une de ces activités interdites.

Les négociations multilatérales pour le désarmement nucléaire sont dans l’impasse depuis deux décennies, étant donné que les neuf pays dotés d’armes nucléaires ont investi massivement dans la modernisation de leurs forces nucléaires. Des propositions alternatives pour faire avancer un monde exempt d’armes nucléaires ont échoué à gagner du terrain ou à produire des résultats. La majorité des États membres de l’ONU voit le traité d’interdiction d’armes nucléaires comme la voie la plus viable et prometteuse.

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