Le projet de loi Moscovici sur une prétendue séparation des activités bancaires ne concerne que 1% de l’activité des banques.

Séparer les activités bancaires de prêts et de dépôts des activités spéculatives était une des leçons tirées de la grande crise des années 30 au siècle passé et ce fut fait dans bien des pays, à commencer par les USA. Dans les années 90, la vague néo-libérale de dérégulation mit fin à cette séparation et l’épargne des citoyens fut utilisée par les banquiers pour leurs opérations spéculatives. Avec les conséquences que l’on sait à partir de 2008.

En France, les grands artisans de la dérégulation financière furent ceux qui se prétendent socialistes : Fabius, alors Premier ministre et Strauss-Kahn, ministre de Jospin. Un disciple de ce dernier, Moscovici, poursuit l’œuvre néfaste.

Il a tout cédé au lobby des banquiers dans la préparation d’un projet de loi censé concrétiser une promesse dite phare de F. Hollande : une loi de séparation des activités bancaires. Ce projet est soumis à l’examen du Parlement dans la plus totale indifférence des médias qui dressent un nuage de fumée avec le Mali, Florence Cassez et le mariage pour tous.

Or, comme vient de le révéler une audition organisée par la Commission des finances de l’Assemblée nationale, le projet Moscovici ne concerne, s’il n’est pas amendé, que 1% des activités des banques. Voici, grâce au travail de la journaliste Irène Inchauspé, quelques infos à ce propos. Je conseille une visite de son site :

 http://www.challenges.fr/journaliste/7199/irene-inchauspe.html

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« Ambiance ce matin dans la salle 6350 de l’Assemblée Nationale. La commission des Finances auditionnait Jean-Paul Chifflet, directeur général du Crédit Agricole, Jean-Laurent Bonnafé, directeur général de BNP Paribas et Frédéric Oudéa, PDG de la Société Générale. Histoire de connaître leur point de vue sur le projet de loi de « séparation » des activités bancaires, dont l’objet est d’isoler dans une filiale les activités « non utiles au financement de l’économie ».

Après des exposés lénifiants des trois banquiers, Karine Berger prend la parole : « je suis un peu étonnée, j’ai l’impression que vous n’êtes pas spécialement gênés par cette loi. » Elle n’en reste pas là et demande notamment aux trois banquiers de bien vouloir lui dire quelle part représente ces activités spéculatives dans les revenus de la BFI (qui regroupe les activités de marché de la banque) et dans ceux totaux de la banque. Un brin agacée car elle a demandé ces chiffres à la FBF qui ne lui a toujours par répondu.

A quoi sert une loi qui ne concerne que 1% de l’activité des banques ?

C’est Frédéric Oudéa qui répond, les autres, courageux mais pas téméraires, préférant se taire. « Cela représente entre 3 et 5% de nos activités de BFI, qui représentent elles-mêmes 15% des revenus totaux de la banque. » Agitation dans la salle. Pas besoin de calculette pour trouver que cela fait 0,75% (5% de 15%) des revenus totaux de la banque. Emoi : « alors cela veut dire que disons 99% de vos activités ne seront pas concernées par la loi ? »  Réponse d’Oudéa : « ce sera au superviseur d’en décider, moi je n’en sais rien. »

Le mal était fait. Car évidemment, la question était sur toutes les lèvres : à quoi sert cette loi si elle ne concerne que 1% de l’activité des banques ? « Je vous remercie de nous avoir donné ce chiffre Mr Oudéa, nous allons réfléchir à remplir un peu plus cette future filiale. », lance un député.

Christian Noyer tente de calmer le jeu 

Le chiffre travaillant sérieusement les députés, c’est au gouverneur de la banque de France, Christian Noyer, auditionné après les députés, qu’on repose la question. « J’avais plutôt en tête entre 5 et 10%, je ne vois pas comment cette banque arrive à 1% ». « Mais 10% de quoi ? » demande Karine Berger. Silence. Le gouverneur ne sait plus, ne se souvient plus. Les députés hallucinent.

Christian Noyer se penche vers Danièle Nouy, patronne de l’Autorité de Contrôle Prudentiel (ACP) : « ah oui, c’est bien de la BFI » finit-il par reconnaître. Il confirme donc le chiffre de Frédéric Oudéa. Pour essayer de faire bonne figure, le gouverneur renchérit : « Il faut se féliciter que ce chiffre soit si faible, cela montre que les banques ont vraiment changé de modèle depuis la crise. » Facile.

Comment éviter que la loi se transforme en coquille vide ?

Gilles Carrez s’active aussi, bien conscient que ce 0,75% sera le seul élément que l’on retiendra de 4 heures d’audition. « Ce serait dommage de se focaliser là-dessus, indique-t-il. Après tous nous légiférons bien sur des sujets qui concernent 1 sur 10.000″. Pas convaincant. Oui, mais quand même, il serait bien que la filiale des activités cantonnées ne soit pas une « coquille vide », sinon à quoi bon légiférer? Si les députés en sont convaincus, ils vont devoir rédiger des amendements pour les débats devant le Parlement qui auront lieu les 12,13 et 14 février.

En se heurtant à une grosse difficulté : le caractère très technique des activités de marché. La question de Valérie Rabault, députée socialiste, à Christian Noyer en témoigne: « combien représente selon vous la part du «prop trading» dans le book des opérations de market making ? » Même traduite en français (que représentent les opérations pour compte propre dans le livre des activités de teneur de marché), cette interrogation a plongé plus d’un député dans la perplexité. De plus, il était 13h15 et les ventres criaient famine. »

© Irène Inchauspé,

http://www.challenges.fr/finance-et-marche/20130130.CHA5665/loi-bancaire-frederic-oudea-le-patron-de-la-societe-generale-met-les-pieds-dans-le-plat.html